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Dans Courant alternatif n° 251 (juin 2015)

Rassemblements le 18 mai pour le délibéré pour Zyad et Bouna

dimanche 21 juin 2015, par ocl-lyon

Rappelons que ce sont les deux jeunes de Clichy s/ Bois morts dans un transformateur pour échapper à un contrôle policier. Leur mort avait été à l’origine des émeutes de 2005, d’une très grande ampleur.


Comme d’habitude, devrait-on dire, les policiers ont été acquittés par le tribunal de Rennes. Ce verdict scandaleux n’est pas étonnant. Des policiers ont déjà été acquittés alors qu’ils avaient directement donné la mort, alors pour des policiers qui ont laissé des jeunes mourir sans les tuer directement.... Ce verdict est pourtant une réponse provocatrice, à 10 ans de distance, aux nombreuses personnes qui s’étaient indignées violemment, et dont beaucoup, elles, ont été condamnées lourdement. Les familles des victimes avaient appelé à un rassemblement pour le délibéré à Rennes, et dans le maximum de villes possibles devant les tribunaux de grande instance.

Pour la région parisienne

Pour la région parisienne, c’est Bobigny qui avait été choisi, double symbole des acquittements de policiers et des condamnations expéditives de banlieusards. Il y avait environ 400 personnes, ce qui n’est pas si mal. Au départ, la présence policière était discrète, mais les autorités ont néanmoins empêché de monter un barnum (le temps était à la pluie et il y avait à manger) pourtant négocié au préalable. Pas de présence visible des partis politiques ni des syndicats. Beaucoup de journalistes au mètre carré. Il y a eu plusieurs discours, le collectif interfac qui avait organisé le rassemblement, puis des familles de victimes, dont en premier Amal Bentounsi du collectif "Notre police assassine". Elle rappelle l’impunité policière dont jouissent les flics depuis des années, le fonctionnement de la justice face aux familles, du racisme latent dans la police, de la prison qui broie les vies… Plusieurs collectifs sont intervenus, mais sans se présenter. Les interventions s’articulent souvent autour de l’aspect raciste des contrôles policiers. Lorsque la pluie est devenue très forte, certains choisissent de s’abriter juste devant le tribunal où il y a un abri. Le barnum est finalement déplié au grand dam de la flic en civil qui emmerde encore les organisateurs. Les gens se massent de plus en plus devant le TGI. Les CRS sont rentrés à l’intérieur. Des gens commencent à taper sur les vitres en rythme en chantant des slogans. "La police assassine, la justice acquitte", ’’ Pas de Justice pas de Paix","Police partout justice nulle part" ! Un fumigène est installé. Ni une ni deux, les CRS décident de sortir du TGI on ne sait trop pourquoi. Quelques vagues projectiles sont lancés contre eux. C’est donc ensuite une intervention policière assez violente, et d’autant plus facile qu’il s’agissait d’un lieu fermé avec une unique passerelle comme issue.

On peut trouver que 400 personnes c’est peu, mais malheureusement les rassemblements autour des victimes de violences policières dans les quartiers populaires sont peu fréquentés par nos milieux. Et l’appel a sans doute mal circulé hors de nos milieux. On peut cependant remarquer qu’il se produit autour de ce sujet des choses positives en ce moment. Des liens entre les collectifs de familles de victimes se sont tissés : le collectif Ali Ziri était là ainsi que d’autres collectifs. Surtout, ce qui est nouveau, c’est le rapprochement entre les victimes de violences policières dans les quartiers et les victimes de violences policières dans les manifestations. Les collectifs ont fait référence à Rémi Fraisse, des familles de lycéens victimes de flashball étaient là. Ceci peut donner de l’espoir pour l’avenir des mobilisations.

Quelques petites nouvelles d'ailleurs, en vrac.

A Nantes, sous une pluie battante, il y avait une soixantaine de personnes, là encore sans partis politiques ni syndicats, avec de la bouffe, de la musique et des banderoles. Des centaines de personnes se sont également regroupées durant deux heures devant le palais de justice de Marseille, une vingtaine au Havre, près de 200 à Toulouse.
Il y a eu aussi un rassemblement à Lille relaté dans l’encadré ci-dessous.

Zyed et Bouna, on n'oublie pas ! on ne pardonne pas !

Lundi soir, à 18h30, un rassemblement a eu lieu devant le TGI de Lille à l’appel des collectifs de soutien à Zyed et Bouna et de lutte contre les violences policières. Un peu plus tôt dans l’après-midi, le TGI de Rennes a innocenté les deux policiers mis en cause. Circulez, y a rien à voir ! Tel est le message donné par cette justice qui couvre les pratiques quotidiennes de la police qui arrête les habitants des quartiers populaires, les contrôle, les harcèle et parfois les tue. Mais là-dessus, pas un mot. Ce soir, il s’agissait de ne pas laisser passer. Une cinquantaine de personnes se sont réunies autour d’une banderole et d’un micro. Après quelques musiques et extraits de témoignages notamment du frère de Bouna (1), un discours a été prononcé rappelant les faits : des jeunes poursuivis par la police à Clichy sous Bois alors qu’ils repartaient chez eux pour fêter la fin du Ramadam, les jeunes qui entrent dans le transformateur EDF pour fuir, les policiers qui les voient entrer et qui ne réagissent pas, tout juste un appel radio : « s’ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau ». Laconique…

Puis se succèdent quelques collectifs. Le FUIQP (2) rappelle que la police tue quasiment toutes les semaines surtout dans les quartiers populaires et il revient sur les émeutes de 2005 qui ont suivi la mort de Zyed et Bouna et pour lesquelles la répression judiciaire a été terrible. Le collectif du 8 juillet (3) rappelle qu’il est de plus en plus dangereux de se rebeller, en témoignent les victimes de flashball, la police n’hésite plus à viser les têtes ! Enfin Hamid du collectif « Urgence notre police assassine » témoigne de la mort de son frère Lahoucine, tué à Montigny en Gohelle par des policiers, il y a deux ans. Le jugement n’a pas encore eu lieu.

Face à ces injustices et à la lenteur administrative (il a fallu attendre 10 ans pour que soit jugé le meurtre de Clichy sous Bois !), il est important de s’organiser car seule la lutte paie, comme l’a prouvé la récente mobilisation à Montigny en Gohelle (4) qui a permis d’obtenir une reconstitution des faits. Mais la route est encore longue et la relaxe est toujours possible. 2005 a servi de leçon, aujourd’hui il existe de nombreux collectifs de lutte contre les violences policières rassemblant des habitants des quartiers populaires et des militants qui organisent la résistance. Aujourd’hui, quelques organisations politiques se solidarisent de la lutte contrairement à il y a 10 ans où les partis et les syndicats n’ont pas bougé le petit doigt alors que les « banlieues » flambaient. Aujourd’hui, il faut être au clair sur le rôle politique de la police comme le rappelle Matthieu Rigouste : « La police est chargée de dominer, bannir et soumettre les couches sociales qui auraient le plus intérêt à se débarrasser de ce système parce qu’elles en bénéficient le moins. »

Ni oubli, ni pardon.

Organisons-nous contre les violences policières et pour une révolution sociale.

Le C.R.I.M.E et les Mauvais jours finiront

1- https://www.youtube.com/watch?v=rA8...

2- Front uni des immigrations et des quartiers populaires

3- Le 8 juillet 2009 à Montreuil, suite à l’expulsion d’un immeuble occupé, La Clinique, la police nous a tiré dessus au Flashball. Cinq personnes ont été touchées à la nuque, au front et à la clavicule. Joachim a perdu un oeil. Nous nous sommes constitués en collectif pour préparer le procès contre les policiers, nous organiser avec d’autres personnes blessées et enquêter sur les pratiques et les armes de la police.

4- Manifestation le 14 mars dernier, plus de 300 personnes dans les rues de Montigny en Gohelle et Hénin Beaumont. Voir article : http://www.lavoixdunord.fr/region/d...

A la mémoire d'Amine Bentounsi

Le 2 mai a eu lieu une manifestation à la mémoire d’Amine Bentounsi, tué le 21 avril 2012 de plusieurs balles dans le dos par un flic à Noisy le Sec (93). Plus jeune prisonnier de France (13 ans), il alternera les séjours en prison jusqu’à sa mort, à 27 ans. Les circonstances de sa mort sont assez claires. Le flic a buté un mec qui n’était pas en position de le menacer. Cela avait (pour une fois logiquement) abouti à la mise en examen du flic avec comme chef d’inculpation « homicide volontaire ». Cette mise en examen avait eu comme conséquence une levée de boucliers des syndicats policiers sans précédent. Finalement, le policier sera jugé aux assises en janvier prochain pour coups et blessures volontaires. La recherche de vérité est principalement menée par Amal Bentounsi, la sœur d’Amine, qui a créé à cette occasion « Urgence Notre police assassine », collectif dénonçant les meurtres de la police et travaillant en commun avec plusieurs familles de victimes. Ce sont donc eux qui ont appelé à la manifestation du samedi 2 mai au départ de la gare RER de Noisy le Sec. Cette marche a rassemblé environ 200 personnes, ce qui est une hausse significative par rapport à l’année dernière. Le cortège était dynamique, les prises de paroles très riches traitaient à la fois de la complicité de la justice, du racisme des forces de l’ordre et de la douleur de perdre un proche. Ces interventions ont eu lieu devant la ligne de gardes mobiles qui protégeait le commissariat de Noisy le Sec, à deux pas du lieu où est mort Amine. Parmi les gens présents, les milieux politiques étaient assez hétérogènes (enfin, relativement !), ce qui est bon signe pour les mobilisation futures...

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