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Ces jours sont les nôtres, aussi. •décembre 15, 2008

mercredi 17 décembre 2008

(Le texte suivant a été distribué aujourd’hui aux étudiants encerclant le siège de la police, par des gens de l’Association des Immigrés Albanais. Je souhaitais le traduire et le présenter ici parce qu’il montre quelque chose de très important : que des liens de solidarité se forment et se renforcent à travers différents secteurs de la société grecque - une chose merveilleuse !)

Ces jours sont les nôtres, aussi.

Après l’assassinat d’Alexis Grigoropoulos, nous avons connu un état d’agitation sans précédent, une explosion de colère qui semble infinie. Il semble que ce soient les étudiants qui ont été à l’origine de ce soulèvement, qui avec une passion inépuisable et une chaleureuse spontanéité ont renversé la situation dans son ensemble. Vous ne pouvez pas arrêter quelque chose que vous ne contrôlez pas, quelque chose qui s’organise spontanément et dans des conditions que vous ne comprenez pas. C’est la beauté du soulèvement. Les élèves du secondaire font l’histoire et laissent à d’autres le soin de l’écrire et de la classer idéologiquement. Les rues, les objectifs, la passion leur appartiennent.

Dans le cadre de cette mobilisation élargie, derrière les manifestations étudiantes à l’avant-garde, il y a une participation massive de la deuxième génération d’immigrés et également de nombreux réfugiés. Les réfugiés viennent à la rue en petit nombre, avec peu d’organisation, mais de la spontanéité et de l’impétuosité. À l’heure actuelle, ils sont les plus actifs parmi les étrangers vivant en Grèce. Quoi qu’il en soit, ils ont très peu à perdre.

Les enfants d’immigrés se mobilisent en masse et dynamiquement, principalement au travers des actions de l’école secondaire et de l’université ainsi que via les organismes de gauche et d’extrême gauche. Ils sont la partie la mieux intégrée de la communauté immigrée, sa partie la plus courageuse. Ils sont différents de leurs parents, qui sont arrivés ici la tête basse, comme s’ils mendiaient un morceau de pain. Ils font partie de la société grecque, puisqu’ils n’ont jamais vécu ailleurs. Ils ne mendient rien, ils demandent l’égalité avec leurs camarades grecs. Égaux en droits, dans la rue, dans leurs rêves.

Pour nous, les immigrés organisés politiquement, il s’agit d’un second Novembre 2005 Français. Nous n’avons jamais eu l’illusion que lorsque les peuples se soulèveraient de rage, nous serions en mesure de les diriger d’aucune manière. Malgré les luttes que nous avons menées toutes ces années, nous n’avons jamais réussi à atteindre un tel niveau de réponse que celui d’aujourd’hui. Maintenant il est temps à la rue de parler : Le cri assourdissant que nous entendons est pour les 18 ans de violence, de répression, d’exploitation et d’humiliation. Ces jours sont les nôtres, aussi.

Ces journées sont pour les centaines d’immigrés et de réfugiés qui ont été assassinés aux frontières, dans les commissariats de police et sur les lieux de travail. Ils sont pour tous ceux qui ont été assassinés par les flics et les milices. Ils sont pour tous ceux qui ont été assassinés pour avoir osé franchir la frontière et travailler jusqu’à la mort, pour n’avoir pas baissé la tête, ou pour rien. Ils sont pour GRAMOZ PALOUSI, LOUAN MPERNTELIMA, ENTISON GIAXAI, TONI ONOUXA, AMNPTOURAKIM INTRIZ, MONTASER MOXAMENT ASTRAF et tant d’autres que nous n’avons pas oubliés.

Ces jours sont pour la violence policière quotidienne qui reste impunie et sans réponse. Ils sont pour les humiliations à la frontière et aux centres de détention d’immigrés, humiliations qui continuent à ce jour. Ils sont pour l’injustice criante des tribunaux grecs, pour les immigrés et les réfugiés injustement en prison, pour la justice nous est refusée. Même aujourd’hui, dans ces jours et ces nuits de révolte, les immigrés paient un lourd tribu aux attaques de l’extrême-droite et des flics, avec des peines d’emprisonnement et d’expulsion que les tribunaux distribuent avec un amour chrétien aux infidèles que nous sommes.

Ces jours sont pour l’exploitation continue et sans relâche depuis 18 ans maintenant. Ils sont pour les luttes qui n’ont pas été oubliées : dans les faubourgs de Volos, les travaux olympiques, la ville d’Amaliada. Ils sont pour la peine et le sang de nos parents, pour le travail non déclaré, pour les horaires de travail interminables. Ils sont pour les transferts financiers et les frais d’envoi, les contributions que nous versons à la communauté et qui ne sont jamais reconnues. Ils sont pour les papiers d’identité que nous chercherons pendant le reste de notre vie, tel un billet de loterie gagnant.

Ces jours sont pour le prix que nous devons payer pour simplement exister et respirer. Ils sont pour tous les moments où nous avons serré les dents face aux insultes, face aux reniements quotidiens. Ils sont pour tous les moments où nous n’avons pas réagi quand bien même nous avions les meilleurs raisons au monde de le faire. Ils sont pour toutes les fois où nous avons réagi et où nous nous sommes retrouvés seuls parce que nos morts et notre rage ne correspondaient pas aux formes existantes admises, n’apportaient pas de votes, n’étaient pas vendeurs au prime time de l’actualité.

Ces jours-ci appartiennent à tous les marginaux, aux exclus, aux personnes affligées de noms difficilement prononçables et d’histoires incompréhensibles. Ils appartiennent à tous ceux qui meurent chaque jour dans la mer Egée et le fleuve Evros, à tous ceux assassinés à la frontière ou dans une rue du coeur d’Athènes. Ils appartiennent à la communauté rom de Zefyri, aux toxicomanes d’Eksarhia. Ces jours-ci appartiennent aux enfants de la rue Mesollogiou , aux non intégrés, aux étudiants incontrôlable. Grâce à Alexis, ces jours-ci nous appartiennent à tous.

18 ans de rage silencieuse, c'est trop.

A nos rues, pour la solidarité et la dignité !

Nous n'avons pas oublié, nous n'oublierons pas - Ces jours-ci sont les vôtres aussi

Luan, Tony, Mohamed, Alexis …

Tiré de http://emeutes.wordpress.com

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1 Message

  • Lettre des amis d’Alexandros distribuée pendant ses funérailles (10 dec 2008)

    Nous voulons un monde meilleur.
    Aidez-nous.
    Nous ne sommes pas des terroristes,
    des « cagoulés »,
    des « connus-inconnus ».

    NOUS SOMMES VOS ENFANTS.

    Ces « connus-inconnus » …

    Nous avons des rêves.
    Ne tuez pas nos rêves.

    Nous avons de l’élan.
    Ne stoppez pas notre élan.

    SOUVENEZ-VOUS.

    Un temps, vous étiez jeunes aussi.
    Maintenant vous cherchez de l’argent, vous n’êtes intéressés qu’à la vitrine, vous avez pris du poids, vous avez perdu vos cheveux.

    ET VOUS AVEZ OUBLIE.

    Nous attendions votre soutien.
    Nous attendions votre attention,
    nous pensions que nous allions être fiers de vous
    - pour une fois.

    EN VAIN.

    Vous vivez des vies fausses, la tête penchée, vous êtes aliénés, rendus au système…
    Vous avez jeté l’éponge et vous attendez le jour de votre mort.
    Vous n’avez plus d’imagination, vous ne tombez plus amoureux, vous ne créez pas.
    Vous vendez seulement et vous achetez.
    De la marchandise partout.

    L’AMOUR ET LA VERITE ? NULLE PART.

    Où sont les parents ?
    Où sont les artistes ?
    Pourquoi ne sortent-ils pas dans les rues ?

    AIDEZ NOUS, NOUS LES ENFANTS.

    P.S. : Et arrêtez les bombes lacrymogènes. NOUS, nous pleurons tout seuls.

    http://emeutes.wordpress.com/

    Voir en ligne : Emeutes en Grèce

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