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Pour une anthropologie anarchiste

mercredi 24 mars 2010

David Graeber

Pour une anthropologie anarchiste

Anthropologue d’origine américaine, David Graeber est Professeur à l’Université de Londres. Il a effectué ses recherches de doctorat à l’Université de Chicago, dont une période de deux ans au Madagascar (de 1989 à 1991). Il a enseigné aux universités de Chicago, Haverford, New York et Yale, où il a été membre de la faculté pendant huit ans avant d’être renvoyé sans explications en 2005. Il a également été actif au sein de plusieurs groupes d’action directe, dont le Direct Action Network et l’Action mondiale des peuples, en plus de participer à diverses actions lors de manifestations anticapitalistes. Il est l’auteur de Towards an Anthropological Theory of Value.

L’anarchisme, en tant que philosophie politique, est en plein essor. Les principes anarchistes traditionnels − autonomie, association volontaire, autogestion, entraide, démocratie directe − jouent un rôle primordial dans des mouvements radicaux de toutes sortes dans le monde entier.
Et pourtant, cela n’a eu presque aucun écho dans le milieu universitaire. Les anarchistes interrogent souvent les anthropologues sur leurs idées quant aux diverses façons d’organiser la société sur des bases plus égalitaires, moins aliénantes. Les chercheurs, terrifiés à l’idée de se voir accusés de romantisme, n’ont pour seule réponse que leur silence. Et s’il en était autrement ?
Dans cet ouvrage, David Graeber montre que les idées des anthropologues et des anarchistes ont « tendance à se réverbérer » et ce que les uns peuvent apporter aux autres.
Il examine les travaux d’une série d’anthropologues du début du XXe siècle − Alfred Reginald Radcliffe-Brown, Marcel Mauss, Pierre Clastres − pour y déceler des traces d’anarchisme. Il donne des exemples ethnographiques tirés des Piaroa, des Tiv et de ses données sur Madagascar pour analyser les modes de prise de décision, consensuelle ou majoritaire et afin de démontrer que les individus et les groupes sociaux savent fuir l’État en évitant un affrontement violent, trop inégal et fatal.
David Graeber s’appuie sur les contributions de ses prédécesseurs et ses propres recherches pour mettre sur pied le concept du contre-pouvoir, compris comme une ou des institutions prévenant la possibilité potentielle d’émergence de toute forme d’autorité. S’intéresser aux sociétés dites « primitives » permet de constater qu’il existe des sociétés sans État, quasi anarchistes. Selon l’auteur, à rendre ces peuples parfaitement exotiques, l’on se prive d’en tirer des leçons applicables à nos sociétés dites « civilisées ».


David Graeber
Pour une anthropologie anarchiste
Lux Éditeur, Montréal, coll. « Instinct de liberté », 176 p., 14 €
ISBN : 978-2-89596-037-9 / Diffusion-Distribution HarmoniaMundi

Voir en ligne : Lux editeur

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1 Message

  • Pour une anthropologie anarchiste

    1er avril 2010 16:11

    Je n’ai pas encore acheté ce livre, mais je vous informe que "Le Monde" en a fait récemment une petite recension. Qui donne envie d’en savoir plus...

    "Pour une anthropologie anarchiste", de David Graeber : un soulèvement, sans apocalypse

    LE MONDE | 25.03.10

    Et si la tendance lourde à l’abstention, dont le dernier scrutin régional a encore fourni une illustration, loin de traduire une "fatigue démocratique", marquait plutôt la désaffection à l’égard du système du vote à la majorité et de la délégation de pouvoir ?

    Telle est l’une des réflexions qu’inspire la lecture de ce manifeste dû à l’une des figures de la pensée libertaire nord-américaine, l’ethnologue David Graeber. Celui-ci, aujourd’hui professeur à l’Université de Londres après avoir été "remercié" de Yale (Etats-Unis) en 2005, n’a jamais fait mystère de son engagement anarchiste.
    Mais l’originalité de sa démarche tient à ce qu’il s’efforce d’étayer ses positions sur les acquis de sa discipline, l’ethnographie. Ce chercheur de haut vol, âgé de 49 ans, a ainsi passé deux années à Madagascar. Surmontant les réserves de ses collègues, qui, par crainte d’être taxés de "romantisme", renâclent à ériger les sociétés dites "primitives" en modèles de communautés sans Etat valables pour le présent, David Graeber est convaincu qu’elles représentent bel et bien une alternative concrète au monde tel qu’il est.

    Pour autant, il ne cède pas au "primitivisme" qui prône le retour de l’homme à la préhistoire. La démocratie directe et informelle dans laquelle la formation d’un consensus ne lèse personne fait partie de l’actualité la plus brûlante ; que ce soit dans les assemblées de quartiers de Buenos Aires, les municipalités autonomes du Chiapas (Mexique), le Direct Action Network (le réseau qui a réuni les protestataires de Seattle, en 1999) ou... dans un simple orchestre klezmer.

    Tous ces phénomènes établiraient qu’il n’est nul besoin d’une explosion de violence meurtrière pour changer les choses et les pratiques. Le ton jubilatoire et souvent drôle de ce petit essai vient ainsi inverser le mythe léniniste. Celui du révolutionnaire pessimiste qui s’obstine à casser le plus d’oeufs possible pour faire son omelette.

    Reprenant une intuition de l’anthropologue français Pierre Clastres (1934-1977) selon laquelle les sociétés premières étaient déjà des groupes politiques égalitaires qui auraient écarté délibérément la domination de quelques-uns au profit de l’auto-organisation, l’auteur estime que le temps est venu pour l’anarchie de jouer le rôle intellectuel jadis dévolu au marxisme. Ce serait comme une revanche des "sauvages" et de Bakounine, en somme.

    * * * *

    POUR UNE ANTHROPOLOGIE ANARCHISTE de David Graeber. Lux, "Instinct de liberté", 170 p., 14 €
    Nicolas Weill
    Article paru dans l’édition du 26.03.10

    http://www.lemonde.fr/livres/articl...

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