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Argentine : des expulsions et une victoire

jeudi 20 août 2009

Argentine : des expulsions et une victoire


L’expulsion de la coopérative textile Quilmes (ex Filobel-Febatex) intervient dans un contexte de reprise en main contre les locaux occupés dans la région de Buenos Aires (capitale et banlieue).


Quilmes (Ex-Febatex)

Le lendemain de l’expulsion, les travailleurs accompagnés de personnes solidaires dont entre autres, ceux de Oro de Plata (autre entreprise récupérée) et ceux de Sealed Air Argentina (en lutte contres des licenciements) ont manifesté à la Maison de la province de Buenos Aires. Ils exigent que le pouvoir politique cesse de soutenir les patrons escrocs et que soit voté par le Sénat la décision d’expropriation déjà votée par la chambre des députés.
Pendant ce temps, un noyau de travailleurs et des personnes solidaires ont dressé un campement devant l’entreprise.

La coopérative fonctionne depuis cinq mois et commençait à trouver des débouchés à ses produits et donc à se développer. Ils étaient sur le point de signer un accord de coopération avec la Cooperative Unidos por el Calzado (ex Gatic) pour produire des tissus et des fils pour la fabrication de vêtements, à embaucher de nouveaux employés et remettre en route deux machines à l’arrêt depuis le début.

Une commission de travailleurs, réunissant ceux de plusieurs entreprises récemment récupérée, va se réunir afin d’arracher au pouvoir politique la décision d’exproprier les anciens patrons, et ainsi de pérenniser juridiquement l’occupation des locaux et la production en autogestion.

Mardi, ils présenteront un recours juridique devant le tribunal pour demander la remise en question de l’expulsion.

Mercredi 19 août la commission de travailleurs devrait intervenir au niveau politique pour la décision d’expropriation

Ils appellent à une nouvelle manifestation pour le jeudi 20 à la Maison de la Province de Buenos Aires, surtout si rien ne bouge d’ici là

Centres sociaux expulsés et menacés

Le mardi 11 août, le centre social occupé de Almagro (quartier de Buenos Aires) a été violemment expulsé, avec 14 personnes arrêtées et 4 blessées lors des affrontements avec la police.

Ce bâtiment avait été abandonné en 2002 suite à la faillite d’une entreprise et occupé, à l’époque du mouvement des assemblées de quartier de la capitale, par une assemblée du quartier puis par un collectif d’habitants qui y avait développé un travail communautaire, cantine pour enfants, lieux de stockage pour deux coopératives de cartoneros (récupérateurs de cartons et parfois d’autres détritus recyclables) touchant d’ailleurs des subsides de la commune. Les personnes arrêtées ont été libérées mais sont poursuivies et doivent comparaître rapidement devant la justice pour « résistance à l’autorité et blessure » et « usurpation ».

Cet épisode est à situer dans le cadre des oppositions politiciennes entre le maire de droite Macri (et président du célèbre club de foot de la capitale, le Boca Juniors) en pleine offensive contre le kirchnerisme sur la défensive depuis sa déroute aux dernières élections du juin dernier.

Un autre centre occupé a été visé et fermé administrativement, la "Casa Zitarrosa" (centre culturel de rencontre uruguyo-argentin) qui fonctionnait depuis 2005 avec un contrat d’occupation précaire.

D’autres centres occupés sont dans la ligne de mire de la mairie de Buenos Aires en particulier le "Complejo Cultural 25 de Mayo", situés dans le quartier de Villa Urquiza ainsi qu’un immeuble de six étages dans le quartier de Chacarita où fonctionnent une dizaine d’organisations à caractère social ou culturel comme le "Mutual Sentimiento" (regroupant 5 000 membres bénéficiaires) formée à l’origine par des ex-détenus et ex-exiliés politiques de la dictature, une pharmacie sociale de génériques, une association éducative, une radio libre, une coopérative de travail (vêtements), des collectifs d’artistes…

Tous ces espaces occupés l’ont été lors de la vague des mois et années qui ont suivi la crise économique locale et financière local de 2001 et où des dizaines mouvements de quartiers s’étaient créés sous une forme assembléiste et avaient investi des lieux abandonnés (immeubles, hangars, usines, terrains…) pour y développer des activités de promotion de la culture, de la mémoire (les disparus, la dictature), de loisirs sur des bases non commerciales, de travail communautaire et d’entraide sociale. Ces mouvements se faisaient en parallèle avec celui des récupérations d’entreprises, parfois dans les mêmes quartiers, notamment les quartiers populaires de la ville de Buenos Aires.

Une bonne nouvelle toutefois

Dans la province de Neuquen (nord-ouest de la Patagonie), les travailleurs céramistes de Zanon, devenue la coopérative FaSinPat (Fábrica sin patrón) voyaient enfin validé juridiquement l’expropriation de l’entreprise, mise en faillite en 2001. La chambre des députés de la province a voté majoritairement cette mesure qui place les travailleurs dans une certaine sécurité juridique.

Cette victoire tant attendue est le résultat d’une lutte de huit longues années sous le slogan « Zanon appartient au peuple ». Elle a aussi une autre prix : les travailleurs devront rembourser à l’Etat les 23 millions de pesos (4,25 millions d’euros qu’il débourse pour payer le règlement des principales dettes) sous forme de fournitures à la province de produits au coût du marché (tuiles en céramique). Parmi les trois créanciers, on trouve une entité financière dépendant de la banque mondiale et l’Etat au travers d’une structure finançant le “développement productif”. Autrement dit, ces créanciers institutionnels vont se rembourser sur le dos des ouvriers. Pour un ouvrier de la coopérative, c’est la preuve que les anciens patrons ont détournés des subventions destinées à l’investissement avant la mise en faillite frauduleuse de l’entreprise. « Si quelqu’un doit payer les dettes, c’est Zanon qui est poursuivi pour évasion fiscale ».

Le projet d’expropriation préparé par l’Etat et approuvé par l’assemblée régionale de la province de Neuquen en a décidé autrement.

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