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Déclaration du Syndicat étudiant indépendant ‟Action directe” sur l’invasion militaire russe en Ukraine

lundi 10 mars 2014

Le 9 mars 2014

Nous, syndicat étudiant indépendant ‟Action directe” (Ukraine) lançons un appel à nos camarades russes et étrangers, et à tous ceux qui tout simplement ne sont pas indifférents. Nous vous demandons de ne pas rester à l’écart de la situation actuelle, de protester contre l’invasion militaire russe en Ukraine et contre la guerre possible. Nous exhortons également tous les Russes à sortir dans les rues de vos villes et de lutter contre le régime autoritaire de la dictature de Poutine, pour la souveraineté du peuple et pour la démocratie directe en Russie.

La télévision russe et tous les autres médias qui sont sous le contrôle du gouvernement inondent les gens avec des mensonges interminables. Il est affirmé qu’en Ukraine le pouvoir d’État est aux mains des nazis, que l’ensemble de Kiev est en feu, que des gangs de bandits commettent des pillages dans la ville, que les personnes parlant le russe sont attaqués dans les rues et que les courageux combattants de la police ukrainienne essaient désespérément de protéger les gens du chaos et de la soi-disant ‟anarchie” qui règnerait en maître dans les rues.

Bien sûr, dans ce flot de mensonges, un grain de vérité peut parfois exister. En effet, au cours des affrontements qui ont eu lieu à Kiev les 18-20 février, une centaine de personnes ont été tuées et des milliers ont été blessés. Mais les agresseurs étaient la police, pas les manifestants. Il avait des snippers de la police qui ont tiré à balles réelles sur des personnes en direct, et les manifestants ont dû se protéger d’une façon ou d’une autre.

En effet, de nombreux partisans et membres des forces d’extrême droite ont pris part aux manifestations. La plupart d’entre eux étaient des représentants de « Secteur Droit » (qui est une organisation qui chapeaute des mouvements de droite et d’extrême droite) et d’un parti de l’extrême droite ukrainienne ‟Svoboda”. Mais, selon certaines études, ils n’ont pas beaucoup de soutien dans la population ukrainienne. En outre, le parti ‟Svoboda” s’est lui-même fortement discrédité, même aux yeux de ses anciens électeurs, en se montrant pratiquement impuissant au moment de la plus grande menace pour le Maïdan. En vérité, il y avait beaucoup d’autres organisations sur le Maidan (libérales la plupart d’entre elles) qui rivalisaient avec l’extrême droite. En outre, un grand nombre d’organisations de base de gauche qui se battent pour la démocratie et les intérêts sociaux du peuple ont émergé.

En effet, certains représentants d’organisations d’extrême droite sont devenus membres de structures gouvernementales. Mais le Conseil des ministres de l’Ukraine se compose principalement de divers politiciens démocrates-nationaux et néolibéraux. Bien sûr, ce n’est pas bon, mais il est trop tôt pour parler d’une dictature nazie en Ukraine.

En effet, le chaos régnait sur le Maïdan, pendant et après les affrontements avec la police, les pneus brûlaient et la place détruite était noire de suie. En effet, la Maison des Syndicats a brûlé (le bâtiment a servi de quartier-général et d’hôpital pour les manifestants et la police y a mis le feu). Mais à l’heure actuelle, tout est calme à Kiev. Personne ne vole ou ne tue, les maisons ne brûlent pas. Le 1er mars, le nettoyage de Maïdan a été organisé. Beaucoup de bénévoles sont venus pour nettoyer les lieux après les affrontements. Les hôpitaux où les blessés sont soignés regorgent de médicaments et de nourriture donnés par des gens ordinaires qui ont souhaité aider. Un service 24 heures sur 24 a été instauré dans les bâtiments gouvernementaux qui restent encore occupés. Des volontaires de ce service s’assurent qu’aucun des documents ne puisse disparaitre des bureaux scellés de ces bâtiments. Même dans l’ancienne résidence de Ianoukovitch, la Mezhyhirya, un service 24h/24 a été créé pour protéger la propriété de tout pillage potentiel.

Les attaques contre les citoyens russes et les russophones sont également une fiction. Les lois prétendument adoptées ‟interdisant” la langue russe sont également impensables – les chaines de télévision ukrainiennes diffusent en direct des discussions de leurs studios où les gens parlent dans la langue qu’ils veulent. Même l’extrême droite, qui aimait dire qu’il est nécessaire d’‟interdire” le russe ou quelque chose comme ça, ne se risque plus à le dire maintenant, même s’ils le voulaient : une grande partie de Maïdan parlait russe.

Bien sûr, il ne fait aucun doute que l’opposition ukrainienne d’hier, qui est maintenant au pouvoir, est peu susceptible d’être beaucoup mieux que l’ancien pouvoir. Le Maïdan, où les revendications sociales ont commencé à apparaître après la fuite de Ianoukovitch, a déjà critiqué le nouveau pouvoir parce qu’il sert les oligarques. Le nouveau gouvernement est déjà en train de procéder ouvertement à la nomination d’oligarques aux postes de gouverneurs régionaux et fait de l’invasion russe une raison pour justifier cela en disant que les oligarques « protègent le peuple ukrainien ». Notons également que l’invasion militaire actuelle pourrait s’avérer très utile pour le nouveau pouvoir, comme une menace externe éclipsant de nombreux conflits internes. En présence d’une menace extérieure, les gens commencent à se solidariser autour d’idées patriotiques et nationalistes, et non sur des questions sociales, ce qui est également très profitable pour les représentants des idéologies de droite et d’extrême droite et pour ceux qui sont au pouvoir. En outre, dans l’hypothèse de la préservation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, le nouveau gouvernement en attribuera le mérite à lui-même, et même dans l’hypothèse d’une partition, ils apparaitront probablement comme étant les ‟leaders” autour desquels (le reste de) la nation se sera consolidée et qui les soutiendra.

Ainsi, nous voulons encore une fois insister sur le fait que les médias russes nourrissent les gens avec des mensonges incroyables. Il n’y a aucune dictature fasciste et aucune violation des droits des Russes ou des russophones en Ukraine aujourd’hui. Il n’y a pas de chaos dans les rues. L’invasion des troupes russes ne vise qu’à accroitre les profits des grandes entreprises et à renforcer le régime de Poutine, qui a vu l’arrivée d’une menace dans les événements qui ont eu lieu en Ukraine. Parmi les autres éléments, cette invasion favorise la propagation des idées de droite et d’extrême-droite en Ukraine ; en fait, elle aide les extrêmes droites ukrainiennes au lieu de les combattre comme le prétend être son objectif.

Nous lançons une fois de plus un appel à tous ceux qui le souhaitent de faire tout leur possible pour éviter un carnage de masse. Nous ne voulons aucun affrontement pour les intérêts de ceux qui sont au pouvoir, pour les intérêts financiers des grandes entreprises et des magnats des deux bords. Nous, comme vous, nous ne voulons pas mourir et nous ne voulons pas tuer.

Nous appelons également tous les citoyens russes à se joindre aux initiatives de la gauche démocratique et à lutter contre la réelle menace fasciste venant de Poutine et de la machine de l’Etat russe. Nous nous occuperons nous-mêmes de l’extrême droite ukrainienne. Ne laissez pas le gouvernement russe se transformer en un régime analogue à celui du Troisième Reich et à sa perspective de réduire ce monde en cendres. Cependant l’histoire est en cours, tous nos descendants doivent encore vivre ensemble sur cette planète.

Syndicat étudiant indépendant ‟Action directe” (Ukraine)

Le 9 mars 2014
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Source : ici

Traduction : XYZ /OClibertaire


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Précisons que ce texte, comme tant d’autres que nous publions sur ce site, ne représentent pas nécessairement les positions de l’OCL (et que de manière générale, seuls les textes signés explicitement par tel ou tel n’engagent que leurs auteurs). Mais, il nous semble nécessaire de faire circuler les informations, points de vue et analyses disponibles que nous jugeons utiles pour comprendre un peu mieux ce qui se passe, les acteurs, les contradictions, les multiples enjeux....

Le dernier numéro de Courant Alternatif (mars 2014, n° 238) qui vient de sortir contient sur quatre pages les principaux éléments de ce que nous pouvions dire au lendemain immédiat (23 février) du départ de Ianoukovitch. S’y reporter pour prendre en considération la nature contrastée du mouvement de Maïdan et des éléments de contexte à la fois objectifs et subjectifs.


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