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[Afrique du Sud] L’acharnement

samedi 1er septembre 2012

Information précédente ici : Afrique du Sud - Grévistes massacrés en défense du capital

L’AMCU, le petit syndicat des mineurs et des travailleurs du BTP, qui a soutenu la grève sauvage de la mine de platine d’Afrique du Sud de Marikana (société Lonmin), où ont été tuées 44 personnes, dont 40 mineurs, a déclaré qu’il ne signerait aucun accord de paix pour mettre fin aux protestations, a rapporté l’agence d’information Sapa en Afrique du Sud.

Des négociations bidons pour orchestrer la reprise du travail

La ministère du Travail de l’Afrique du Sud, Mildred Oliphant, avait convoqué mercredi 29 août une réunion avec la direction de l’entreprise Lonmin, qui possède la mine Marikana, le Council for the Conciliation, Mediation and Arbitration [Conseil pour la conciliation, la médiation et l’arbitrage], le Conseil sud-africain des églises (SACC), la Chambre patronale des mines et plusieurs syndicats (NUM, Solidarity, UASA et AMCU) afin de parvenir à « accord de paix » pour mettre fin au conflit dans la mine de platine située à une centaine de kilomètres au nord de Johannesburg.

Toutefois, les négociations ont été interrompues jeudi soir et reportées à lundi prochain 3 septembre.

« On nous a dit de sortir de la réunion. Après cinq heures, on nous a dit d’attendre davantage, et finalement, la réunion s’est terminée sans nous », a déclaré le président de l’AMCU, Joseph Mathunjwa, qui a dit qu’il ne signerait pas un document issu d’une discussion où ils ont été exclus et qui ne se concentre sur les revendications des grévistes.

« Nous n’allons pas nous battre contre tout le monde ». De toute façon, les grévistes ne vont pas signer un accord de paix car « ils ne sont en guerre contre personne.[...] Nous laissons l’accord de paix pour la police, la direction de Lonmin et les autres syndicats », a ajouté Mathunjwa à la fin de la deuxième journée de négociations, sachant qu’ils ne peuvent pas parvenir à un accord de fin de conflit sans l’AMCU qui joue un rôle actif dans ce conflit.

« La réunion n’a pas abordé les revendications des travailleurs », a déclaré le dirigeant syndical, en ajoutant que les grévistes ont été laissés en dehors du processus de négociation. Joseph Mathunjwa a ajouté : « Nous n’avons pas confiance dans les négociations, elles sont juste une distraction pour que Lonmin puisse apparaître comme faisant quelque chose ».

Dans une déclaration à la presse, il a dit ne pas croire que son syndicat sera de nouveau invité aux négociations

Le National Council of Trade Union (NCTU), auquel est affilié l’AMCU, avait précédemment déclaré que les revendications des mineurs étaient justes et légitimes.

Alors que le gouvernement avait claironné que des « représentants des grévistes » seraient présents à ces discussions, au deuxième jour, ils sont virés.

Le groupe britannique Lonmin, troisième producteur mondial de platine et 12% de cette production, n’a de toute façon pas l’intention de parler des salaires, qui est l’élément déclencheur de la grève. « On ne peut pas discuter des salaires si les gens font l’objet d’intimidations. Il faut un retour à la normale avant toute discussion », a déclaré à l’AFP une porte-parole, Sue Vey. « Aujourd’hui c’est le jour de l’accord de paix », a-t-elle ajouté.

« Nous ne pouvons pas dire que nous sommes satisfaits des progrès à ce jour. L’employeur n’a pas fait d’offre sur les salaires. Tout ce qu’ils veulent, c’est que les travailleurs retournent simplement au travail », a déclaré Zolani Bodlani, l’un des représentants des grévistes.

Par ailleurs, selon un communiqué de la direction de Lonmin, le retour au travail est tombé à 5,7% des 28 000 employés de la mine ce jeudi 30 août, alors que lundi dernier elle affirmait que 25% des mineurs avaient repris.

Les autopsies réalisées, il est prévu que la plupart des cercueils des grévistes morts partent aujourd’hui à leur région d’origine pour procéder aux funérailles pendant le week-end.

Grévistes inculpés du meurtre de leurs camarades

Comme si cela ne suffisait pas, un tribunal a inculpé ce même jour tous les mineurs de meurtre, « conformément à la loi », a indiqué le porte-parole du parquet, Frank Lesenyego.

D’après lui, la justice se base sur la doctrine juridique dite de « commom purpose » [objectif commun]. Cette loi impute aux personnes participant à un acte criminel la responsabilité pénale des conséquences de cet acte. Cette décision doit s’appliquer aux 269 mineurs arrêtés après la tuerie du 16 août ainsi qu’à 78 autres mineurs, placés aux arrêts dans les hôpitaux où ils sont soignés ou arrêtés à leur sortie. Les personnes qui ne portaient pas d’armes ou se trouvaient en queue de cortège sont aussi concernées.

« Quand des gens sont accusés d’avoir un objectif commun dans une situation où les suspects ont des armes à feu ou des armes, et quand ces gens confrontent ou attaquent la police, qu’une fusillade a lieu et qu’il y a des morts, la « common law » doit être appliquée », a justifié Frank Lesenyego.

Cette loi anti-émeute du « common purpose » est une doctrine juridique utilisée par l’État d’Afrique du sud contre les militants anti-apartheid dont l’adoption remonterait à 1956.
Un tribunal de première instance de Ga Rankuwa, une localité proche de la capitale Pretoria, avait refusé la demande de libération sous caution des mineurs. Tout cela semble bien cohérent et n’a rien de juridique, mais politique. En inculpant 350 grévistes pour meurtre, cela rend presque impossible d’accorder des remises en liberté provisoire : l’État et le gouvernement tripartite (ANC-COSATU-Parti Communiste) ne font là rien d’autres que de prendre des otages dans un conflit qui est loin d’être terminé.

Grévistes massacrés, grévistes arrêtés, incarcérés et inculpés pour le meurtre de leurs propres camarades, grévistes exclus de la négociation mais où reste présent le syndicat NUM qui a appelé la police pour en finir violemment et militairement avec le conflit… parfois on ne trouve plus les mots devant un tel acharnement, c’est Kafka et Ubu en plus d’une barbarie implacable…

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Grève sauvage dans une mine d’or

Quelque 12 000 employés d’une mine d’or sud-africaine se sont mis en grève en raison d’affrontements entre syndicats, a annoncé vendredi leur employeur, le groupe Gold Fields. « Les employés de la section est de la mine d’or KDC dans le West Rand (banlieue ouest de Johannesburg), en Afrique du Sud, ont entrepris une grève sauvage mercredi soir au moment de la prise de service de l’équipe de nuit », a indiqué la compagnie dans un communiqué.

« Sur la base de rapports informels des salariés, la grève semble principalement liée à des désaccords au sein des organisations syndicales, bien que nous ne puissions pas le confirmer », a précisé le directeur, cité dans le communiqué. La compagnie a obtenu une interdiction de la grève en justice, a précisé Gold Fields.
Gold Fields, produit 3,5 millions onces d’or par an, selon son site internet. Mais, le porte-parole de KDC, Sven Lunsche dit que cette mine produit 1660 oz par jour. À ce jour, le travail de deux équipes de nuit et deux de journée a été perdu.

La société exploite huit mines en Australie, au Ghana, au Pérou et en Afrique du Sud.

Le syndicat majoritaire NUM a déclaré que les travailleurs allaient reprendre le travail lundi. Apparemment, un accord a été signé entre le NUM et la direction concernant la prise en charge des frais d’obsèques qui a eu pour conséquence le prélèvement de 69 rands [6,60 euros] sur le salaire mensuel.
L’autre syndicat, UASA, a déclaré que ce prélèvement devait se faire « que vous le vouliez ou pas », ce qui l’a amené à contester cette disposition obligatoire. Selon l’agence SAPA, la direction de l’entreprise aurait décidé de préciser le caractère volontaire de ce prélèvement pour une « couverture obsèques », ce qui, selon le NUM, facilitera la reprise du travail après la coupure du week-end.

Le 31 août.

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  • Abandon de l’inculpation des mineurs pour meurtre

    La National Prosecuting Authority, [le Parquet général] a provisoirement retiré les inculpations de meurtre portées contre les 270 mineurs de Marikana dans l’attente d’investigations supplémentaires

    « Nous avons décidé de retirer les inculpations contre les mineurs incarcérés et de les libérer de prison jusqu’à ce que les investigations soient menées à leur terme », a déclaré Nomgcobo Jiba a déclaré la chef du parquet aux journalistes, à Pretoria ce dimanche.

    Jiba a expliqué la décision a été prise après « d’intenses délibérations » et n’était pas définitive.

    « Le NPA veut attendre une enquête judiciaire, mais ne le fera pas nécessairement s’il est face à une preuve ‟prima facie” [évidente] », a-t-elle déclaré.

    Jiba dit que certains mineurs seraient libérés lors de la prochaine réunion de la cour, attendue lundi, tandis que les autres seront libérés le 12 Septembre, une fois que leurs adresses auront été confirmées.

    Le meurtre a été ajouté à l’acte d’accusation contre les mineurs la semaine dernière après avoir initialement été inculpés de violence publique, rassemblement illégal et tentative de meurtre.

    Une fusillade mortelle avec la police survenue le 16 août à la mine de la société Lonmin de Marikana dans le Nord-Ouest lors d’une manifestation sur les salaires. Trente-quatre personnes ont été tuées et 78 ont été blessés.

    10 autres personnes ont été tuées dans ce qui est présenté comme de la violence anti-syndicale, une semaine avant l’incident. Deux agents de sécurité ont également été tués pendant les manifestations.

    « Intention commune »

    Les mineurs ont été inculpés en vertu de la doctrine de l’« intention commune » (common purpose), qui a souvent été utilisée par le régime d’apartheid afin d’impliquer tout un groupe de personnes dans les crimes commis par quelques individus – malgré le fait que ceux qui sont à la périphérie sont souvent innocents.

    Le directeur du parquet pour le Nord-Ouest, Johan Smit, a expliqué dimanche que l’affaire des 10 autres mineurs qui ont été tués une semaine avant la fusillade serait traitée séparément, car elle s’est produite à un moment différent et à un endroit différent. Il a ajouté le NPA disposait de sept suspects pour ces meurtres.

    Il a également déclaré qu’un suspect a été interrogé pour le meurtre de deux agents de sécurité.

    La décision intervient alors que les avocats des mineurs préparaient une requête judiciaire en urgence adressée au président Jacob Zuma, pour exiger leur libération immédiate devant la Haute Cour de Nord Gauteng lundi.

    Le porte-parole de la présidence, Mac Maharaj, avait déclaré via un communiqué que le président ne pouvait pas « accéder la demande » et qu’il fallait attendre les recommandations de l’enquête de la commission Farlam avant d’entreprendre toute action.

    VO : ici

    Cette commission Farlam, composée de trois magistrats, porte le nom d’ancien juge qui la préside. Elle a été nommée par Jacob Zuma le 23 août et doit présenter ses conclusions dans les cinq mois.

    Selon d’autres informations, 140 détenus pourraient être libérés dès lundi, « à moins qu’un tribunal décide que ces hommes doivent rester en prison, en dépit du l’avis de parquet de ne pas exiger le versement d’une caution ». Les « autres inculpations provisoires resteront ».

    Même si les procureurs disent à la fois qu’il n’y a eu « aucune erreur » de leur part, que la décision antérieure était basée sur un « principe rationnel », qu’elle avait un caractère « provisoire » et « qu’il n’y avait eu aucun contact avec la Présidence à ce sujet », tout le monde pense le contraire : la décision est évidemment et éminemment politique.

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