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Grèce : Communiqué de l’union syndicale libertaire (ESE)

lundi 18 juin 2012

C’est dans les rues, et non dans les couloirs du parlement que notre sort sera décidé

Communiqué de l’union syndicale libertaire (ESE)

Union locale d’Athènes 14.06.12

"Euro ou drachme ?", "Syriza ou un mémorandum ?", "Austérité ou banqueroute ?" ... Ce sont là quelques-uns des dilemmes qui prévalent ces derniers jours dans le débat public et des médias. Les partis en faveur du mémorandum font le choix pour "la voie difficile de sauver le pays en restant en Europe, avec des mesures difficiles mais nécessaires", tandis que Syriza "unira le peuple contre le mémorandum de la faillite." Les deux camps omettent quelque chose de fondamental : en ce moment, il n’y a pas d’attaque contre le pays en général, mais contre les salariés, les retraités et les chômeurs, c’est-à-dire, contre le monde du travail.

Toutes les mesures prises au moment de la crise économique réduisent la valeur de notre force de travail, directement (baisse du salaire minimum et des prestations de chômage) et indirectement (réduction des dépenses publiques, privatisation des biens et des services publics, liquidation des conventions collectives, etc.). Les mesures approuvées sont les propositions que l’organisation patronale grecque avait mises sur la table avant la crise, afin de dynamiser la compétitivité. Les patrons s’en tirent bien puisque ils auront à leur disposition une main d’œuvre meilleur marché, des travailleurs plus disciplinés et effrayés par la menace du chômage. Il n’est pas surprenant qu’une grande partie de la fameuse dette se trouve dans les banques grecques et les entreprises grecques. Sous le prétexte de la crise, nous les travailleurs nous sommes obligés de payer la faillite des banques et des bulles hypothécaires.

Pour les travailleurs, tout dilemme qui se pose dans le but de ‟sauver le pays” est un faux dilemme. La question n’est pas comment sortir le pays de la crise, mais comment les travailleurs peuvent faire face à la version de la gestion de crise choisie par les patrons. Que ce soit en euros ou en drachmes, l’exploitation est la même. Ce qui doit nous préoccuper, c’est comment construire de toutes pièces un nouveau mouvement syndical qui puisse arrêter l’attaque que nous subissons en tant que travailleurs. Il est impossible que tous les Grecs puissent sortir de la crise. Nous n’avons pas les mêmes intérêts que les hommes d’affaires grecs, qui augmentent leurs profits en tirant parti des mesures et des restrictions. Nous, au contraire, nous avons les mêmes intérêts que les travailleurs migrants sans papiers, qu’ensemble, les partis partisans du mémorandum et l’extrême droite (Aube dorée, etc.) désignent comme le grand problème de la société grecque.

L’Etat grec, quel que soit le parti au pouvoir, suit consciemment une politique concrète, par laquelle tous ceux qui sont contraints de migrer vers la Grèce sont classés comme illégaux. Le problème n’est pas que l’Etat veuille fermer les frontières à double tour. Il est incapable de la faire et il a besoin d’immigrants à l’intérieur du pays comme illégaux afin que les employeurs puissent disposer d’une main d’œuvre pas chère et obéissante. Le racisme contribue à la dévaluation des salaires de cette partie de la classe ouvrière, une dévaluation qui commence par les immigrants et s’étend bien entendu aux travailleurs grecs. Dans le même temps, la condition des illégaux permet aux mafias locales de les contrôler plus facilement. C’est un cercle vicieux dans lequel d’un côté une situation d’illégalité est créé artificiellement pour dégrader la valeur de la force du travail des immigrants et les pousser vers les mafias, tandis que de l’autre le racisme et la xénophobie augmentent, contribuant à leur tour à plus forte dégradation des conditions des immigrants et des Grecs.

L’organisation Aube dorée n’est pas une force politique antisystème. Tous les anciens membres de son état-major (Kousoumvris, Androutsopoulos, etc.) l’ont abandonné en accusant le leader Mixololiakos de collaborer avec la police et de recevoir de l’argent des partis PASOK et Nea Dimokratia. Dans le quartier périphérique d’Athènes d’Agios Panteleimonas, où ce parti occupe le terrain, il vend de la protection en connivence avec la police dans les bars et les magasins où évidemment les migrants travaillent dans des conditions dégradantes. Son objectif réel n’est pas "expulser les immigrants clandestins," mais qu’ils continuent d’être une force de travail pas chère et obéissant à un régime de terreur. Aube dorée demande dans son programme électoral que les immigrants payent la sécurité sociale deux fois plus que les Grecs, ce qui n’est pas mauvais pour les employeurs. Le mouvement ouvrier exige que les travailleurs ne paient pas de contribution à la sécurité sociale et que ce soient uniquement les patrons et l’État qui le fassent.

Aube dorée représente les bons petits gars du Système et en tant que tels ils ne s’occupent pas de rebrancher le courant pour les personnes qui n’en ont plus parce qu’ils ne pouvaient pas payer l’électricité, ou de lever la barre des péages pour faire passer les gens, ou promouvoir la désobéissance civile dans le transport, ou inviter les gens à refuser de payer le nouvel impôt sur les revenus, ou participer à des manifestations contre les entreprises qui licencient des travailleurs. Les gars d’Aube dorée sont à la disposition du Système et ils cherchent à désorienter, en occultant qui est le véritable ennemi. Ils nous disent que ce sont les immigrants et ils la ferment devant les patrons, les partis au pouvoir, le mémorandum et la police, qui ont tout fait pour le vote des mesures de coupes sombres, pendant que les gars d’Aube dorée protégeaient le parlement contre la colère populaire. Ce n’est pas pour rien que les flics votent en masse pour Aube dorée et que les forces anti émeutes et les nazis chargent ensemble contre les manifestants (nous l’avons vu plus d’une fois).

Le système politique dénonce maintenant Aube dorée comme « élément extrémiste » à cause des bagarres du nazi Kasidiaris à la télévision, tout en le couvrant quand il mène ses attaques quotidiennement avec ses nervis dans les transports et sur les places, en matraquant et en poignardant les immigrants et d’autres personnes ayant des mines ou des coupes de cheveux qui ne leur reviennent pas. Au cours des six derniers mois, les organisations antiracistes ont enregistré 500 cas de violence raciste et il y a 30 immigrants portés disparus. Le système politique a totalement adopté le discours raciste des néo-nazis. Maintenant on dénonce des journalistes et des politiciens à Aube dorée comme dans le passé avec LAOS, Boridis, Adonis Giorgiadis et Plevris, c’est de la racaille qu’on nous présente maintenant comme « forces démocratiques ». Le rôle historique de l’extrême droite a toujours été de faire le sale boulot de la classe patronale, en dépit de sa rhétorique ‟anticapitaliste.”

En tant que travailleurs, nous devons faire face aux fascistes en cravate et aux fascistes au crâne rasé. Formons de nouveaux syndicats non contrôlées par les partis politiques et admettant les travailleurs migrants, en réclamant pour eux des droits et des devoirs égaux. Si nous ne le faisons pas, les mafias (qui, ne l’oublions pas, ont de très bonnes relations avec la police et l’extrême droite) vont croître et le cannibalisme social aussi. Il faut que nous formions dans tous les quartiers des groupes de défense, des assemblées populaires, pour protéger les gens tout à la fois contre les attaques à coups de couteau des néo-nazis comme de la violence antisociale des mafias, une violence que ni Aube dorée ni la police ne veulent arrêter. Seul un mouvement social organisé par le bas et réunissant Grecs et immigrant peut briser la mafia, qu’elle soit grecque, étrangère ou mixte.

Les élections, que l’on décide d’y participer ou pas, ne peuvent résoudre aucun problème réel des travailleurs. Au contraire, elles créent l’illusion que, tous ensemble, travailleurs et employeurs, nous pouvons trouver une solution pour "sauver le pays" (c’est-à-dire la rentabilité capitaliste). Si le vrai rapport de forces ne change pas dans la société entre les patrons et le monde du travail, quel que soit le gouvernement qui se dégage, la politique continuera à fonctionner pour le bénéfice des entrepreneurs. Comme travailleurs nous avons mieux à faire que de nous soucier des élections : créer des syndicats combatifs autonomes, organiser des grèves sur les lieus de travail, renforcer les assemblées de quartier, former des comités antifascistes, lances des structures sociales de solidarité et d’autonomie ouvrière.

Recevons le nouveau gouvernement comme il le mérite : par des grèves et des manifestations !

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