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[Grèce] « Pourquoi nous occupons notre hôpital »

vendredi 9 mars 2012

Une lettre d’un médecin de l’hôpital de Kilkis, occupé par ses travailleurs

Lettre de Leta Zotaki, présidente du syndicat des médecins ENIK de l’hôpital de Kilkis

Bonjour à tous.

Merci beaucoup pour votre intérêt et votre soutien.

L’occupation de l’hôpital de Kilkis par ses travailleurs a commencé le mardi 20 février, à 8h30. Cette occupation ne nous concerne pas seulement nous, médecins et personnel de l’hôpital de Kilkis. Il ne s’agit pas non plus seulement du Système National de Santé Grec (ESY) qui s’effondre, en effet. Nous sommes en lutte parce que maintenant ce sont les droits humains qui se trouvent réellement menacés. Et cette menace ne plane pas seulement sur une nation, sur une poignée de pays, ou quelques groupes sociaux spécifiques, mais elle vise toutes les classes populaires et moyennes en Europe, aux États-Unis, en Asie, en Afrique, dans le monde entier. La Grèce d’aujourd’hui, c’est l’image de demain du Portugal, de l’Espagne, de l’Italie et du reste du monde.

Les travailleurs de l’Hôpital de Kilkis et de la plupart des centres de santé grecs ne sont plus payés dans les temps et certains d’entre eux voient leurs salaires réduits à pratiquement zéro. Un de mes collègues et camarade a été transféré à la clinique de cardiologie en état de choc, après s’être aperçu qu’au lieu de recevoir sa paye mensuelle de 800 euros (oui, c’est ça son salaire mensuel), il y avait une note précisant non seulement qu’il ne percevrait aucun salaire ce mois-ci, mais qu’il serait astreint à un remboursement de 170 euros. D’autres travailleurs ont été payés seulement 9€ (neuf euros) ce dernier mois. Ceux d’entre nous qui continuent à recevoir un revenu quelconque vont les soutenir dans la mesure de nos possibilités.

C’est une guerre contre le peuple, contre toute la communauté. Ceux qui disent que la dette publique de la Grèce est la dette du peuple grec, mentent. Ce n’est pas la dette du peuple. Elle a été créée de toutes pièces par les gouvernements, en collaboration avec les banquiers, afin d’asservir les peuples. Les prêts à la Grèce ne sont pas utilisés pour les salaires, les retraites ou la santé publique. C’est tout le contraire : les salaires, les retraites et la sécurité sociale sont utilisés pour payer les banquiers. Ils mentent. Contrairement à ce qu’ils déclarent, ils ne veulent pas d’une société libérée de la dette.

Ils créent eux-mêmes la dette (avec l’aide de gouvernements et de politiciens corrompus) pour leur propre bénéfice. Ils ont fourni à la Grèce un banquier comme premier ministre pour s’assurer que le “job” sera exécuté correctement. Notre Premier ministre, Lucas Papademos, n’a pas été élu. Il a été nommé par la BCE et par les banquiers, avec l’aide de politiciens européens et grecs corrompus. C’est cela leur interprétation du terme de “démocratie” !

Les dettes sont créées par les banques qui fabriquent de l’argent à partir de rien et en retirent des intérêts uniquement parce que nos gouvernements leur ont donné le droit de le faire. Ils continuent à dire que ces dettes, c’est toi et moi et nos enfants et nos petits-enfants, que nous devons les payer avec nos biens personnels et nationaux, avec nos vies. Nous ne leur devons rien. Au contraire, ils doivent au peuple la plus grande partie des fortunes qu’ils ont accumulées grâce à la corruption politique.

Si nous n’ouvrons pas grand les yeux sur cette vérité, nous allons tous devenir des esclaves, travaillant pour 200 euros par mois, ou moins. Et ça c’est pour ceux d’entre nous qui pourront trouver un travail ! Sans soins médicaux, sans retraite, sans maison et affamés, comme c’est le cas aujourd’hui pour mes concitoyens en Grèce. Des milliers d’entre eux vivent dehors avec la faim au ventre.

Nous n’avons aucune intention de peindre notre réalité avec des couleurs sombres, mais c’est la vérité. Cette situation n’est pas due à un incident financier ou monétaire, ou à une erreur. C’est le début de la phase hideuse d’un long processus qui suit un plan soigneusement élaboré, un processus qui a commencé il y a plusieurs décennies.

Nous devons combattre ensemble ce projet néo-libéral. C’est ce que, à Kilkis et dans de nombreuses villes dans le monde entier, nous faisons maintenant.

Pour le moment, nous n’envisageons pas l’ouverture d’un compte pour recevoir des dons. Nous pourrions cependant avoir besoin d’y recourir dans quelques mois ou même semaines, si la situation s’aggrave. Ce dont nous avons surtout besoin aujourd’hui, c’est d’un soutien moral et de la publicité. Les luttes locales du monde entier doivent se propager et obtenir un soutien massif si nous voulons gagner la guerre contre ce système corrompu. Si vous pouvez penser à d’autres moyens éventuels pour diffuser nos informations et idées, ce serait génial.

Vous pouvez nous contacter à : enosi.kilkis@yahoo.gr

Encore une fois, nous ne pouvons vous remercier suffisamment pour vos pensées et vos paroles bienveillantes.

Avec mes meilleures salutations.

Leta Zotaki, directrice du département de radiologie, hôpital de Kilkis, membre de l’assemblée générale des travailleurs, présidente du Syndicat des Médecins Hospitaliers de Kilkis (ENIK).

Source :
http://www.occupiedlondon.org/blog/2012/03/05/why-we-occupied-our-hospital-an-open-letter-by-a-hospital-doctor-at-the-workers-run-hospital-of-kilkis/

Précédente information :

http://oclibertaire.free.fr/spip.php?breve419

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