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LE MINISTRE DE L’INTERIEUR PORTE PLAINTE : NON AU REFOULEMENT DE L’HISTOIRE !

lundi 3 mai 2010

Le Ministre de l’intérieur vient de porter plainte contre X à propos
d’un communiqué publié le 12 février 2010 par le collectif SOIF
D’UTOPIES et RESF 37, intitulé « Les Baleiniers », qui dénonçait
l’utilisation du fichage des enfants dans les écoles pour repérer les
sans-papiers.
« Cette technique de chasse aux enfants a eu son heure de ’’gloire’’
pendant une des périodes les plus sombres de notre histoire
contemporaine. Les nervis de Vichy ont en effet utilisé les enfants pour
pouvoir aider à la déportation de ces derniers et de leurs parents.
« Il semblerait que certains fonctionnaires préfectoraux,
particulièrement zélés, s’inspirent de nouveau de la chasse à la
baleine. Actuellement, les fichiers, comprenant la liste des élèves et
leur adresse (par exemple Base élèves), sont constitués dans chaque
établissement. Certains fonctionnaires préfectoraux interviennent auprès
des directeurs d’établissement pour que ceux-ci leur transmettent la
nationalité des parents. C’est illégal ! Il y a de réels soupçons en
Guyane, en Ille-et-Vilaine et en Indre-et-Loire. » (extrait du CP « Les
Baleiniers »)
Le 16 février 2010, la préfecture d’Indre-et-Loire répondait par un
communiqué. Elle affirmait qu’elle « [...] n’a jamais interrogé les
directeurs d’établissements scolaires pour connaître la situation de
leurs parents ressortissants étrangers. Cette consultation serait en
tout état de cause inutile puisque le fichier national des étrangers
AGDREF (Application de Gestion des Dossiers des Ressortissants Etrangers
en France) auquel la préfecture a accès fournit tous les renseignements
utiles à la connaissance du dossier de l’étranger ».
Ainsi donc, l’Etat serait en mesure de connaître l’ensemble des
personnes sans papiers vivant en France. Tous les « clandestins »
seraient donc fichés ? C’est là un gros mensonge et une pure
forfanterie, puisque, par définition, toute personne entrée
clandestinement sur le territoire français et n’ayant pas encore entamé
de procédure de régularisation, ne peut être inscrite dans ledit
fichier. Personne aujourd’hui, et l’Etat moins que quiconque, ne peut
donner le nombre exact de « clandestins » - seulement des estimations
qui ne sont que des supputations.
En Indre-et-Loire, deux directeurs d’école ont été sanctionnés parce
qu’ils refusaient d’inscrire les données demandées dans le fichier
« Base-élèves ». Dans d’autres départements, plusieurs responsables
d’école ont aussi été sanctionnés. Si ce fichier était si anodin pour le
pouvoir, pourquoi sanctionner les enseignants ?
Le président de l’association CHRETIENS-MIGRANTS (elle n’a pas signé le
communiqué incriminé), a été convoqué le 20 avril 2010 au commissariat
de Tours, pour enquête. Selon lui, les policiers chercheraient à
connaître les noms des rédacteurs de ce communiqué au contenu
diffamatoire, selon le ministre de l’Intérieur. Il ne supporterait pas
la comparaison de certaines pratiques policières actuelles avec celles
du gouvernement de Vichy.
Sans doute le ministre, par ailleurs élu d’une région qui comprend Vichy
au nombre de ses villes illustres, veut-il soustraire de la mémoire
collective l’aspect symbolique de cette ville, devenue entre juillet
1940 et septembre 1944 la capitale de la collaboration avec le régime
nazi. Ce ne sont pas ses propos racistes sur ’’les Auvergnats’’ (mais il
faut entendre « les Arabes ») qui contribueront à effacer de l’histoire
ce régime antisémite et xénophobe ! Etablir une comparaison n’est pas
pratiquer l’amalgame. Par définition, la recherche historique est peu ou
prou comparatiste. Refuser la comparaison conduit inévitablement à
mutiler la recherche historique et donc à refouler toute interrogation
sur le présent et les avenirs possibles au regard de l’expérience
historique. C’est bien sous couvert du Ministre de l’intérieur que des
policiers arrêtent des parents sans papiers venus chercher leurs enfants
à la sortie de l’école, comme le faisaient des policiers aux ordres du
ministre de l’intérieur du gouvernement de Vichy !
On ne peut qu’être intrigué par le fait que ce soit le ministre en
personne qui porte plainte. Dans des affaires analogues, ce sont les
préfets qui font appel à la justice lorsqu’ils estiment que le
représentant de l’Etat est diffamé.
Au vu de la situation en Indre-et-Loire, il aurait été sans doute
difficile pour le préfet de porter plainte en personne. Celui-ci vient
d’être condamné 14 fois, depuis le mois de novembre 2009, par le
Tribunal Administratif d’Orléans pour manquement à ses obligations
légales d’hébergement de 14 familles et célibataires demandeurs d’asile.
Il a de plus été condamné, le 12 avril 2010, à une astreinte de 200 €
par jour parce qu’il ne remplissait pas les conditions que lui impose le
jugement du TA par rapport à l’une de ces familles. Le 21 avril, le juge
des référés l’a de nouveau condamné à 3 autres astreintes pour 3 familles.
Le 23 avril 2010 une plainte pour « non assistance à personnes en
danger » contre le même préfet et contre X a été déposée auprès du
procureur du Tribunal de Tours par une famille. Elle était demandeuse
d’asile et souhaite maintenant obtenir un titre de séjour pour raisons
médicales. Bien que certains des membres de cette familles connaissent
d’évidents et graves problèmes de santé, nécessitant des
hospitalisations, les services préfectoraux les laissent à la rue et les
associations en charge de l’hébergement à Tours font de même.
D’un côté, un ministre estime qu’un préfet (donc l’Etat) est diffamé
lorsque des comparaisons historiques sont faites ; de l’autre, ce même
préfet, représentant de l’Etat, bafoue les lois, la Convention de
Genève, et la Convention Internationale des Droits de l’Enfant.
Comment se fait-il que ce gouvernement, si pointilleux sur sa politique
sécuritaire, soit aussi peu enclin à enjoindre à ses représentants de
respecter les droits des personnes ? Comment se fait-il que nous soyons
obligés de faire appel à la Justice afin que L’Etat remplisse ses
obligations légales ?
On peut s’étonner également qu’il ait fallu deux mois pour que le
Ministre estime nécessaire de déposer plainte à propos d’un communiqué.
Est-ce le fait d’imposer à la préfecture d’Indre-et-Loire de respecter
le droit d’asile qui, en fin de compte, soit si gênant pour le pouvoir ?
Le gouvernement craint-il l’extension, voire la généralisation, dans
tous les départements, de cette lutte pour l’accueil digne et décent des
demandeurs d’asile ? Quoi qu’il fasse, cet élargissement s’opère : déjà
dans plusieurs départements des démarches similaires à celles initiées
collectivement à Tours sont entreprises. Il y a tout lieu de penser que
les préfets seront condamnés pour les mêmes raisons, l’application de 3
arrêts du Conseil d’Etat imposant aux préfectures d’assurer
l’hébergement des demandeurs d’asile et de leur fournir les moyens de se
nourrir et de se vêtir.

Une militante du Collectif SOIF D’UTOPIES est convoquée au commissariat
de Tours le 4 mai 2010.
Nous exigeons l’arrêt de toutes les poursuites dans le cadre de cette
plainte contre X.
Nous luttons et lutterons sans cesse pour le respect du droit d’asile,
pour l’obtention des papiers pour tous, la liberté de circulation et
d’installation, la fermeture et la disparition des camps de rétention et
un logement pour tous.

Tours, le 03/05/2010
COLLECTIF SOIF D’UTOPIES
06 31 56 17 56
soifdutopies@yahoo.fr

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