Accueil > Actualités, Tracts et Communiqués > Nanotechnologies : Débat bidon dans un bunker

Nanotechnologies : Débat bidon dans un bunker

lundi 30 novembre 2009

A propos de la réunion de la Commission nationale du débat public Nanotechnologies à Grenoble (Alpexpo) le 1er décembre

"Le grand public est au centre de notre mission", proclame la Commission particulière du débat public Nanotechnologies sur son site. Et Bergougnoux, son président, d’espérer dans le Monde, le jour du lancement de sa campagne d’acceptabilité, la participation de 10 000 à 12 000 personnes aux pseudo-débats – soit une moyenne de 590 à 700 participants par ville.

Les compte-rendus des sept premières réunions, établis par la CNDP elle-même, nous informent que seules 200 à 300 personnes se déplacent en moyenne, soit moins de la moitié que prévu. Un échec pour la CNDP ? Certes non. En réalité, l’organisation de ces réunions bidon écarte minutieusement le "grand public" pour réserver le prétendu débat aux experts et contre-experts du nanomonde.

A Strasbourg, Toulouse, Orléans, Bordeaux, Lille, Clermont-Ferrand, Besançon et Grenoble, nul n’a vu d’affiches sur les murs, ni reçu de tract dans sa boîte aux lettres. A chaque étape le même refrain chez les habitants interrogés : personne n’est au courant. Ce n’est certes pas faute de budget – deux millions d’euros pour cette campagne de promotion – si la CNDP néglige la plus élémentaire information de la population.

Au contraire son agence de manipulations publiques, I&E Consultants, envoie-t-elle en masse des invitations insistantes aux universités, laboratoires, instituts de recherche. A Grenoble les chercheurs de l’Université Joseph-Fourier (scientifique) et des instituts de sciences dures du CNRS ont ainsi reçu des mails les incitant à bourrer la salle pour soutenir la tribune et riposter à d’éventuelles manifestations d’opposition. I&E invite également les associations environnementalistes ou de consommateurs à étaler leur contre-expertise pour un échange démocratique sur les taux de nano-pollution admissibles. Ainsi s’assure-t-on le respect de la consigne délivrée par Jean-Louis Borloo dans le film d’introduction aux réunions : "Notre façon de vivre va être bouleversée par ces nanotechnologies, la question c’est pas d’être pour ou contre" (sic).

Résumons : 250 personnes dans la salle. Les premiers rangs réservés aux représentants des sept ministères maîtres d’ouvrage. Des intervenants officiels disséminés dans le public. Les invités issus des labos, de la Chambre de commerce, des boîtes locales ; et des citoyens spécialistes délégués par leurs associations. Combien d’anonymes du "grand public" dans ces débats bidon ? Leur présence est si peu souhaitée que d’honorables représentants de ceci-cela ont pu s’offusquer de la distribution par des contestataires sans appartenance, de tracts "sans signature d’association". La CNDP quant à elle le déclare tout de go : "Nous ne sommes pas intéressés par les slogans et les déclarations anonymes". D’autant moins que la commission, tout en invitant le public à "éclairer les décisions du gouvernement", a établi à l’avance la liste des 147 questions susceptibles d’être soulevées en réunion, ainsi que les thèmes à exclure du débat (la biologie synthétique, le transhumanisme, les sciences cognitives – bref, l’homme-machine dans le monde-machine). Cette liste a été rendue publique par Pièces et Main d’œuvre sur les sites www.piecesetmaindoeuvre.com et www.nanomonde.org.

A Besançon, le dispositif anti-public est monté d’un cran sécuritaire. Les participants, accueillis par un triple contrôle de vigiles, furent priés, une fois à l’intérieur, de signer un engagement à ne pas "perturber le débat". A Grenoble, c’est dans un bunker que le grand public est invité à s’exprimer en toute liberté. Police partout, vigiles privés en nombre renforcé ont été convoqués pour le show dans la capitale des nanos, à Alpexpo. La sécurité, nous dira l’honnête Bergougnoux, est l’affaire du responsable de la salle ; la CNDP ne touchant pas à ces basses ¦uvres. Ça tombe bien, le patron d’Alpexpo est un expert en la matière. Guy Chanal, également patron du Palais des Sports et de la course cycliste des "Six Jours de Grenoble", est réputé pour sa poigne qui lui vaut une réputation de "cow-boy" parmi ses employés. Son expertise en maintien de l’ordre fait de lui depuis 2007 le conseiller technique auprès du préfet de l’Isère en matière de grands rassemblements, "en liaison avec le chef du service interministériel de défense et de protection civile" (prefecture.isere.fr). Nous voilà rassurés.

Tel qu’il est, avec ses multiples trucages et manipulations, ce pseudo-débat de la CNDP ne peut se dérouler autrement, puisque précisément il est destiné à simuler un exercice de démocratie impossible. Les opposants au nanomonde ayant dénoncé cette mascarade organisée trois ans après l’inauguration de Minatec à Grenoble, il ne restait à la CNDP qu’à ramasser les gestionnaires des nuisances pour servir de marionnettes dans ses numéros de ventriloques.

Il est notoire que les seuls débats publics sur les nanotechnologies depuis 2003 ont eu lieu à l’initiative obstinée des opposants et que celui de la CNDP n’existerait pas s’il ne s’agissait d’enfouir ces manifestations critiques. Du reste, serions-nous seuls contre tous à clamer notre opposition au nanomonde, que nous persisterions.

Une chose est sûre : OGM, déchets nucléaires, ITER ou nanotechnologies, l’hostilité croît vis-à-vis de la "démocratie technique", des sociologues de l’acceptabilité et des organisateurs de la fausse concertation qui mettent en œuvre la devise de leurs collègues de France Telecom : "Faire participer, c’est faire accepter". Pas plus que les OGM ou le nucléaire, les nanotechnologies ne se gèrent. Face au nanomonde nous ne pouvons nous satisfaire de règlements à la marge. Voilà pourquoi nous ne participerons pas au débat bidon de la CNDP à Grenoble le 1er décembre.

Pièces et main d’œuvre
Grenoble, le 28 novembre 2009

Merci de faire circuler,

Voir en ligne : infos sur le nanomonde

Répondre à cette brève

5 Messages

  • Bergougnoux, président de la Commission nationale du débat public
    "Ce qui pue dans les nanotechnologies : les chaussettes"

    Après huit réunions de la campagne d’acceptabilité pour les nanotechnologies commanditée par le gouvernement, chacun a pu constater le dévouement des membres de la Commission nationale du débat public. "Je pourrais me consacrer à d’autres activités beaucoup plus lucratives, si je n’avais pas confiance en le fait que ce que nous faisons peut être utile", jurait le président, Jean Bergougnoux, à Clermont-Ferrand.

    Aussi lit-on avec gravité ses premières conclusions, livrées à l’Agence France Presse à mi-parcours de la campagne : "Les grands accusés sont les applications qualifiées de futiles, telles que les chaussettes au nano-argent qui fiche le camp dans les lavages et dont on ne sait pas ce qu’il devient dans l’environnement" (AFP, 2/12/09*).

    Deux millions d’euros, les services d’une agence de manipulations publiques, des conférences de presse, une vaste campagne de communication, auront eu cette vertu : alerter les pouvoirs publics et l’opinion sur les dangers des chaussettes. Qui oserait encore critiquer le rôle de la CNDP après un tel coup de semonce ? Pas les Verts, ni France Nature Environnement, ni la FRAPNA, ni tous les pseudo-écologistes et promoteurs de l’encadrement des nuisances qui militent pour des nanotechnologies responsables. Pas les associations de consommateurs, rassurées de pouvoir acheter leurs chaussettes les yeux fermés, grâce à ce formidable exercice de démocratie participative.

    Comment s’étonner de ce résultat, quand la campagne de la CNDP fait mine d’ignorer le nanomonde pour focaliser l’attention du public sur les seuls nanoproduits ? Quand le saucissonnage des thématiques abordées dans les réunions dissimule le projet global et révolutionnaire de monde-machine, pour décliner jusqu’à l’écoeurement les traditionnelles nuisances sanitaires et environnementales du monde industriel ?

    Le gouvernement soucieux des deniers publics aurait pu s’épargner ces deux millions gaspillés. Depuis des années, Pièces et Main d’oeuvre annonce les mesures à attendre du pouvoir pour nous faire avaler la pilule du nanomonde : encadrement, normes de pollution, étiquettage. "On disposera bientôt des taux de nano-contamination tolérés, fixés par quelque comité de normalisation, et dans quelques années on sera soulagés de savoir que la France respecte les normes. Comme pour les dioxines, les pesticides et les OGM, on oubliera que le seul taux acceptable de contamination est : zéro.

    Etiquettées et labellisées, les nanotechnologies pourront tranquillement "révolutionner nos vies" et poursuivre leur projet d’homme-machine dans un monde-machine. " (Aujourd’hui le nanomonde n°13, juin 2007)

    Pendant que les gogos s’indignent des chaussettes anti-odeur, Clinatec peut tranquillement développer ses implants neuronaux expérimentaux pour calmer les dépressifs ; STMicroelectronics et IBM peuvent disséminer leurs puces RFID partout sur la planète, dans les objets et les corps ; le Centre de communication scientifique, technique et industrielle de Grenoble peut acclimater les ados à la réalité augmentée et à leur future condition d’hommes-machines.

    On vous l’avait dit : participer, c’est accepter.

    Pièces et Main d’oeuvre

    3 décembre 2009

    www.piecesetmaindoeuvre.com

    www.nanomonde. org

    Dernier ouvrage paru :

    A la recherche du nouvel ennemi
    2001-2025 : rudiments d’histoire contemporaine

    (Editions L’Echappée, novembre 2009)

    repondre message

    • Débat public nanos : à Lyon, la CNDP expulsée de la tribune par des opposants majoritaires.

      vendredi 15 janvier 2010

      Le 12e débat sur les nanotechnologies organisée par la Commission Nationale du Débat Public devait avoir lieu ce jeudi 14 janvier à Lyon. Encore une fois, il a été annulé par des opposants qui entendaient dénoncer une opération d’acceptabilité et refuser les nanotechnologies.

      [ Voir aussi la vidéo sonore et sous-titrée réalisée par la Télévision Paysanne : http://www.latelevisionpaysanne.fr/video.php?lirevideo=169#169 ]

      Le débat était organisé dans un amphi de l’Ecole Normale Supérieure de Lyon. Une heure avant le début, la présence policière est déjà importante aux alentours. La CNDP s’attend à des débordements, et il s’agit d’impressionner les contestataires. Des flics en civil surveillent les bouches de Métro à proximité du débat, des camions de keufs tournent avec les girophares, les CRS ou gardes mobiles sont déjà en groupe, et casqués, et des groupes de BACeux sont prêts à intervenir.

      A l’entrée du hall, on nous demande d’ouvrir nos sacs et nos vestes. Interdiction de rentrer nourriture et boisson. Sur une longue table, les documents de propagande de la CNDP sont en libre distribution. Avant d’entrée dans la salle, des hôtesses nous distribuent un questionnaire. Des vigiles sont disposés un peu partout, depuis les entrées, jusqu’à l’intérieur.

      Dans la salle, ce qui choque d’abord, c’est le peu de personnes qui ont fait le déplacement pour une ville comme Lyon. Il y a là moins de 200 personnes ! Tout le monde est placé à l’avant de l’amphithéâtre, laissant plus de la moitié de la salle déserte. A croire que le boulot des opposants commence à payer, et que les gens ne veulent plus participer à cette mascarade. Cette semaine par exemple, l’association des Amis de la Terre, qui a participé à plusieurs pseudo-débats, a décidé de quitter cette opération, dénoncant un débat pipé, et qui n’a rien de public, et son instrumentalisation par la CNDP.

      Des tracts sont distribués dans toute la salle par des opposants. Peu après 19h30, les experts installés à la tribune, Jean Bergougnoux, président de la CNDP Nanos s’avance pour ouvrir la réunion. En vain…
      Comme à Grenoble et à Rennes, les applaudissements, huées, cris, coups de sifflet commencent immédiatement. Le bruit est impressionnant. Les slogans fusent, quelques chansons aussi, et beaucoup de projectiles : boules de papier, documents de la CNDP déchirés, avions…

      Trois banderoles sont déployées à plusieurs endroits de la salle :

      « Les nanos, c’est pas vert, c’est totalitaire. »

      « Débat bidon, démocratie en toc »

      « nanomonde = maxiservitude »

      Deux de celles-ci sont déplacées jusque devant la tribune.

      Ce soir, les opposants lyonnais sont majoritaires puisqu’ils sont plus d’une centaine. Et de tous les âges. On remarque quelques mamies particulièrement dynamiques parmi les opposants. Bergougnoux tente de faire taire la salle. Une pluie de boules de papiers s’abat sur la tribune. Les opposants, non contents de perturber le débat, décident d’expulser la CNDP. « Cassez vous ! » « Le débat on s’en fout, on veut pas de nanos du tout » « Fermez Minatec et le CEA, après on débattra »…

      Jean Bergougnoux annonce que le débat est annulé, et qu’il se poursuivra entre experts dans une petite salle, retransmis sur internet. Alors que les membres de la CNDP commence à se retirer, des opposants montent sur la tribune. La CNDP est expulsée. Les écriteaux avec le nom des intervenants jetés dans la salle, tandis que les techniciens débranchent les micros. Les contestataires s’installent sur les sièges des experts.

      Les banderoles sont déployées sur scène. Au pied de chaque siège, une bouteille d’eau pour les experts. Alors qu’on nous a refusé d’entrer avec le moindre liquide. Eh oui, parler ça donne soif, mais la CNDP sait que les citoyens ne sont pas censés parler dans ses débats, et n’ont donc pas besoin d’eau.

      Les bouteilles de la tribune tournent dans la salle, pour rafraichir les manifestants. Les vigiles sont sur la tribune sans intervenir. Après un flottement, quelques opposants demandent l’attention de la salle. Le silence se fait, et une personne propose : « Maintenant que les experts ont été mis à la porte, nous pouvons organiser un vrai débat contre les nanotechnologies. »

      Alors qu’elle s’apprête à donner la parole à la salle, Jean-Pierre Chaussade, vice-président de la CNDP nanos, assisté de deux ou trois autres pingouins, s’empare d’un micro et revient sur le devant de la scène pour prévenir un tel sacrilège. Chaussade a peur qu’un véritable débat s’instaure dans la salle. Lui et la CDNP seraient complètement désavoués. Avec le micro au volume maximum, il tente de couvrir les huées. Il devient la cible des projectiles de papier. Les banderoles, qui couvrent toute la largeur de la tribune se déploient devant sa tête pendant qu’il parle. Ses sbires essayent en vain de les arracher. Obligé de descendre de la tribune, Chaussade se rend à l’autre bout de la salle, vers le fond de l’amphi, pour reprendre le crachoir. Sur la tribune, la situation manque de dégénérer à deux reprises : des personnes isolées du public et transformées pour l’occasion en citoyens-flics, agressent et font tomber deux opposants. Leurs camarades les calment rapidement. Chaussade tente toujours de parler, mais personne ne l’entend. On le sent prêt à craquer à plusieurs reprises. C’est un fait, à la CNDP, on n’a pas l’habitude de se retrouver du côté des perdants.

      Il est un peu plus de 20 h 30. La réunion annulée, et la CNDP expulsée, les opposants sortent en chaînes, pour éviter toute interpellation, derrière les banderoles en chantant, et en scandant : « à chaque faux-débat on sera là ! » Les CRS et la BAC avec brassard sont présents. Pas mal de journalistes aussi. La dispersion se fait dans le calme.

      Après Lille, Grenoble, et Rennes, la réunion de Lyon est la 4e de la CNDP annulée par les opposants. Presque toutes les autres ont été perturbées d’une manière ou d’une autre. Et plus personne ne vient assister aux réunions.

      Cette campagne censée prévenir un « syndrome OGM » dans la population a pour l’instant l’effet complètement inverse, et ce, malgré l’explosion de son budget de plus de 2 millions d’euros par la CNDP. A croire que le travail des opposants n’a d’égal que l’incompétence des organisateurs… ou la réticence d’une population qui désavoue de plus en plus, à chaque réunion, les experts en acceptabilité.

      Prochain faux débat de la CNDP : Marseille, le 19 janvier

      Rappel des dernières aventures des pseudos-débats pour l’acceptation des nanotechnologies, ici

      http://rebellyon.info/Nano-debats-pour-maxi-arnaque.html

      No Nano !
      Nano No !

      repondre message

      • Un premier récit de l’annulation du pseudo-débat de Marseille, le 19 janvier. Nous en attendons d’autres.

        Ce mardi 19 janvier 2010, la Commission nationale du débat public sur les nanotechnologies avait prévu de tenir son 13e faux débat à Marseille. Comme à Lille, Grenoble, Rennes et Lyon, elle s’est enfuie devant les opposants au nanomonde et aux manipulations d’opinion, très nombreux dans la salle du Pharo. Ce, en dépit du tri effectué à l’entrée par les physionomistes assermentés, qui ont empêché l’accès à une dizaine de personnes. Tandis que Jean-Pïerre Chaussade (vice-président de la commission), s’adressait à la foule pour raisonner les contestataires éventuels.

        La séance est ouverte par un Jean-Pierre Chaussade inquiet, mais apparemment soulagé par le calme relatif de la salle durant les premières minutes. Il donne volontiers le micro à ceux qui demandent, puisque sa mission est de "laisser la parole à tous ceux qui souhaitent s’exprimer".

        Ce soir, le public est espiègle. Un faux naïf demande "Pourquoi il y a des manifestants ce soir ?", et tandis que Chaussade prend une mine complice, sans doute pour assurer qu’il partage l’étonnement du monsieur, celui-ci ajoute : "Vous ne vous êtes pas posé la question ?" Première douche froide.

        La deuxième vient d’un homme bien mis, en qui le président de séance aurait juré reconnaître un citoyen-respectueux-du-débat. Lequel s’offusque d’abord : "On n’est pas là pour crier, on écoute le monsieur qui a des trucs intelligents à dire, on ne fait pas les jeunes", puis, s’égosillant dans le micro : "S’il-vous-plait, c’est mon moment de poser ma question", exigeant qu’on lui laisse poser sa question durant trois bonnes minutes avant que Chaussade ne réalise l’entourloupe. Et la salle de réclamer : "La réponse, la réponse !" Une banderole est déployée devant la tribune : "Décisions déjà prises, démocratie en crise", slogan repris dans le public quand Mme Rousseau, représentant le Commissariat général au Plan, résume ce qu’on doit espérer de l’opération de la CNDP : demander qu’un certain pourcentage des aides publiques accordées aux entreprises en nanos soit consacré à l’évaluation des risques ; demander plus de contrôleurs ; intervenir auprès des institutions européennes.

        En somme, il faudrait se réjouir qu’on nous laisse participer à la gestion des nuisances. Le public marseillais ne semble pas satisfait de cette offre, et un jeune homme au micro fustige cette conception du débat qui consiste à "informer le public". Le débat, rappelle-t-il, c’est discuter pour décider collectivement. Il indique que les chercheurs de l’Ideas Lab de Minatec à Grenoble, ou du CEA (Etienne Klein notamment), s’emploient à réduire les résistances aux nanos, en manipulant les espoirs en matière de santé et d’écologie.

        Après 40 minutes de chahut, de sifflets, de slogans, de chants, Jean-Pierre Chaussade jette l’éponge, quitte la scène et donne rendez-vous sur Internet. Où l’on voit les merveilleuses possibilités des technologies de l’information et de la communication. Il charge sa collègue Galiène Cohu de tenir le crachoir durant la demie-heure nécessaire pour établir la liaison satellite avec le bunker où se retranchent les experts. Une demie-heure, c’est long quand on n’a rien à dire et que les manifestants envahissent la tribune. Mme Cohu, la bien-nommée, doit se faire aider d’un souffleur, pour enchaîner des phrases sans queue ni tête, d’où il ressort tout-de-même cette obsession : le public doit poser des questions, et obtenir des réponses. Il ne viendra jamais à l’esprit d’un technocrate que le "public" ait des réponses à apporter aux "experts".

        Quant au mystérieux souffleur ("donnez-moi des idées", l’implore Galiène Cohu), ce n’est autre que Bruno Védrine, le secrétaire général de la commission, le vrai chef de cette opération. Quand Chaussade, Bergougnoux et les membres de la CNDP-Nanos assurent être indépendants et bénévoles, ils oublient de dire qu’ils travaillent sous la coordination de ce fonctionnaire, payé – 4500 euros par mois – par le ministère de l’Ecologie, pour assurer la mission jusqu’au bout. L’œil – et la bouche - de l’Etat, c’est lui.

        Prochain faux-débat : à Orsay le 26 janvier.

        http://www.nanomonde.org/Debat-publ...

        * * * * *

        Et aussi :

        Nanotechnologies : les opposants perturbent à nouveau le débat « pipeau »

        MARSEILLE. Plusieurs dizaines de personnes ont empêché la tenue du débat en public prévu mardi soir à Marseille. « Le débat ne sert à rien ! Tout a déjà été décidé ! », criaient-ils. Les intervenants ont dû se rabattre sur une salle close pour engager un débat devenu virtuel. C’est le troisième échec du débat voulu par le Grenelle de l’environnement.

        La CPDP (commission particulière du débat public) avait bien tenté de filtrer les entrées pour écarter les perturbateurs, en vain.

        Pour le 13e débat public (sur 17), les opposants ont eu le dessus, comme à Rennes le 7 janvier et à Lyon le 15.

        Pour les opposants, l’Etat a, via ces débats, lancé « une campagne de communication [...] pour nous faire accepter les nanotechnologies, et éviter notre refus après celui des OGM » (voir leur site).
        Les nanotechnologies permettent de produire des micro-matériaux à l’utilisation multiple (chimie, optique, biologie, alimentation, sécurité, santé, environnement).

        Les opposants estiment que certaines applications sont dangereuses pour la santé, l’environnement et les libertés : « Quelle dignité nous sera-t-il laissé quand, pucés, tracés, profilés, nous serons à notre tour transformés en objets ? », demandent-ils.
        Mardi soir, l’animateur, Jean-Pierre Chaussade, a d’abord « souhaité un débat de qualité ».
        Raté. Les sifflets ont commencé.

        Une dame a protesté : « Il y a des personnes qui n’ont pas le droit d’entrer ! »
        « Il y a quelques personnes que j’ai déjà rencontrées à Lyon, a répondu l’animateur, je les ai reconnues ! Ellers m’ont empêché de parler. Je ne vois pas pourquoi j’accepterai qu’elles entrent. »
        La réunion, au Pharo, a vite tourné au happening ubuesque.
        Cris, jets de boulettes de papier, sifflets : à 20h10, au bout de trente minutes de brouhaha, l’animateur a constaté que « les conditions ne sont pas réunies » pour ce débat. Les opposants ont pris le contrôle de la salle et envahi l’estrade.

        Mais la CPDP avait prévu une solution de repli.

        Les intervenants ont discrètement rejoint une deuxième salle, à l’hôtel Sofitel tout proche, où le débat, autour
        du thème des nanotechnologies, de la sécurité intérieure et de la défense nationale, pouvait se tenir sans perturbateurs.

        Un débat public...sans public, à part huit personnes triées sur le volet, mais filmé et prenant des questions via internet (voir le site).

        Ainsi, la CPDP n’a pas eu à l’annuler, même s’il n’avait plus grand sens.

        Prochain débat : le 26 janvier à Orsay.

        M.H.

        Libération Marseille
        http://www.libemarseille.fr/henry/2...

        repondre message

  • Nanoscience et nanotechnologies

    10 mars 2010 01:00, par yann kervennic

    Bonjour,

    Je suis chercheurs au chomage (je travaille a l’etranger sur des contrats courts de facon irreguliere selon les besoins), en nanoelectronique
    et pourtant je ne pense pas trahir mon ideal anar en m’adonnant a cette activite episodiquement plutot
    que de faire d’autres boulots.
    Tout d’abord il ne faut pas confondre nanoscience et technologie :
    La science vise a la comprehension, la technologie a l’application. Je ne vois pas au nom de quel principe on
    peut s’attaquer a la volonte de comprendre la matiere a l’echelle des agregats atomique et moleculaire, ce qui
    est le coeur des nanoscience. Ensuite viennent des applications, et la evidemment c’est le debat qui n’a rien de specifique aux nanos, sur l’opportunite de la course irreflechi aux applications. C’est bien entendu toujours le meme schema, rien de neuf (nucleaire, genetique).

    Les critiques sont fondes concernant les nanotubes de carbones comme le demontre les premieres etudes medicales. Parcontre concernant les colloides d’or et de metaux precieux, qui sont en fait utilise depuis les egyptiens, on ne peut pas generaliser, jeter l’anatheme sur des applications potentielles qui peuvent aussi nous liberer reelement (construction de composant electroniques propres et recyclable ne conssommant qu’une fraction des composants actuels, detection de proteines pour la comprehension des maladies via l’utilisation des proprietes plasma optiques etc etc).
    Ce qui est dangereux c’est l’absence de "democratie" (avec les reserves que l’on doit apporter au terme democratie, debat qui depasse ce cadre), la pseudo expertise qui permet de couvrir des arnaques. Bref je crois plutot necessaire de remettre en cause le fonctionnement meme de la recherche, l’intervention du prive, les carrieres. je suis personnellement pour leur suppression, pour le travail sur des projets discutes et propoose par les aspirants chercheurs aupres de comite citoyens ayant fait preuve du bagage et de l’interet minimal pour pouvoir choisir un projet ou en proposer un et y participer si ils le desirent ; puis mettre tous ces braves gens au chomage decement remunere une fois le projet fini ou bien a d’autre tache tout aussi noble qu’ils se trouveront en attendant d’obtenir la reconnaissance d’un nouveau projet. Surtout pas de carriere et de responsables de labo decidant de plus en plus tyranniquement du travail de leur chair a paillasse. D’ailleurs la recherche mene actuellement use les intellects et il est bon de faire des breaks regulier pour l’hygiene mental et pour la creativite. Bref que toux ceux qui desire consacrer une partie de leur activite a la recherche en ait la possibilite et que les projets soient ouvertement discutes.

    Je pense que les critiques que vous evoque devraient se renseigner tres precisement aupres de ceux qui ont bosse sur de tels sujets afin de constituer des dossiers precis, consulter la presse specialise. Peut etre le font ils, j’esperent qu’ils auront trouve des scientifiques assez independants pour les aider. Je serais heureux de participer avec tous les autres a la construction de cette critique et de l’elargir a la science en general, a son financement et a la participation de ceux qui la finance (nous tous).
    Pour moi la science est l’affaire de tous, c’est la cle de l’aventure humaine (comprendre le monde etrange dans lequel nous vivons) et ne doit pas etre laisse entre les mains d’etre qui en fait ne sont anime d’aucune passion mais veulent devenir chef de labo, avoir beaucoup de publi et faire carriere, peu importe finalement le contenu. Et qui vous sorte un ensuite charabia imbitable sur france info, veritable insulte a l’auditeur.
    Une des premieres mesures est de rendre son enseignement interessant (c’est actuellement un vrai cauchemar fait pour degouter les moins bourrins). Je pense que la proposition de Levy leblond d’enseigner la science en se fondant sur son histoire et la contextualiser est a considerer serieusement. La science est une aventure et les formules ne font que resumer le resultat d’une experience. En elle meme elle n’ont aucun interet si ce n’est a la formation d’ingenieur idiots et serviles. Brefs tous ceux qui nous ont mis dans la merde.

    repondre message

    • Personnellement, je suis globalement d’accord avec toi.
      L’idéal scientifique n’est pas à rejeter globalement. Sinon, on le remplace par quoi ? Une pensée mystique, le relativisme généralisé… Mais je dirais que cet idéal doit se positionner contre le scientisme qui en fait un corpus idéologique positif, une sorte de religion (puisqu’on y célèbre la Vérité du monde) alors qu’il n’est qu’un positionnement critique analytique face au réel, qui avait mis le doute comme instrument fondamental de son rapport à elle-même.

      Le hic c’est que cet idéal de la recherche, de la découverte, est absolument absente dans la réalité, je veux dire dans le concret de la société, les labos, les entreprises.

      On parle bien de nanotechnologies, et pas de nanosciences comme on parle maintenant depuis plus de 20 ans de technosciences. Cette contraction des deux termes me semble bien synthétiser ce qui se passe depuis longtemps. C’est la recherche technologique qui guide les trouvailles scientifiques (et non l’inverse). C’est pas nouveau : depuis longtemps les impératifs technico-économiques ont permis de faire des découvertes… La mécanique quantique, qui est proprement une proposition scientifique, vient de recherches empiriques, financées par Siemens, sur les corps noirs… et combien d’autres découvertes ont été faites par des « accidents », eux-mêmes, en grande partie, déterminés par une certaine orientation donnée à la recherche. Ce processus de « recherches » tous azimuts, avec l’empirisme, le pifomètre comme moteur, semble bien dominer maintenant la recherche. Et les capacités de calcul atteintes par les ordinateurs aujourd’hui permettent de démultiplier les expériences, les hypothèses « théoriques ».
      Bref, la logique devient techniciste (plus que scientifique) et elle s’inscrit dans ce qui l’oriente : le productivisme articulé avec la recherche de profits et une société de contrôle.

      Sur les nanos, il y a plusieurs niveaux de lecture.

      Les nanoparticules.

      Personne ne connaît vraiment les risques, et pourtant elles prolifèrent dans toute une série de produits du quotidien… Normal qu’on ne sache pas puisque ces « nouvelles matières » n’existaient pas sous cette forme du moins à l’état naturel. Et aussi que les tests n’ont jamais été faits avant leur commercialisation. A partir du moment où elles ont une certaine volatilité et une taille réduite (20 nm), qu’elles peuvent franchir tous les obstacles (y compris certains tissus humains), il y a de quoi s’interroger ! Exemple : le dioxine de titane que l’on retrouve dans les crèmes solaires, les rouges à lèvres, les ciments, les peintures, les vernis, etc… Les particules minérales ne se dissolvent pas mais ont tendance à s’accumuler : jusqu’à quel point sans risque pour l’organisme ?
      Cela peut être pire que l’amiante qui ne passait « que » par les voies respiratoires… Les études épidémiologiques, en écotoxicologie, ne sont pas légion là dessus, il y a des raisons.

      Les modifications qu’elles vont entraîner. C’est toujours présenté comme des choses qui vont faciliter la vie. Comme le « tout électrique » des années 70, comme les téléphones portables qui rendent tellement de services, comme nos ordinateurs sans lesquels on ne sait plus vivre, comme les TGV « qui font gagner du temps », etc… C’est bien un modèle social qui s’est constitué, celui de « l’homme connecté », en une communication permanente, déléguée à des machines.
      Mais en même temps, on sait que cela accroît considérablement les facteurs de dépendance des individus vis-à-vis de ces techniques.

      Sur les capacités des nanos, il faudrait développer, mais quand on prend un seul exemple, on mesure tout le danger. Il y a des recherches pour fabriquer des vêtements « intelligents », avec des textiles chauffant, luminescents, des puces incorporées, etc... Fort bien, mais aussi des textiles aux vertus amincissantes, relaxantes, hydratante, autonettoyantes… et qui modifient le rapport que le corps entretient avec le milieu ambiant. Des combinaisons de travail avec des textiles incorporant de minuscules capsules chargées de produits actifs, cosmétiques ou médicaux, ou qui rendent furtifs et invisible ceux qui les portent. Ces nouvelles « armures » sont testées pour l’armée US mais il y aura des prolongement civils : des vêtement où celui qui les porte ne « sent » plus le poids de ce qu’il porte, qui le rendent plus « léger », qui décuplent leur force physique, etc… et donc qui permettent à ceux qui les revêtent d’être opérationnels plus longtemps, sans repos, ni sommeil, par n’importe quel temps, etc… On voit tout de suite où cela peut mener dans la sphère du travail, de l’“employabilité” des salariés par exemple : pourquoi ne travailler que 7 ou 8 heures pas jour quant on peut se fatiguer autant en bossant 15 ou 16 heurs d’affilé…

      Post – humains

      Et c’est là que le sujet devient vertigineux. Quand les techniques proposent d’“augmenter” l’humain, ces capacités, de déplacer toujours plus loin ses limites. En médecine, en neurologie moléculaire, avec des implants de toute sorte, en confectionnant des êtres-cyborgs, des mutants… on n’en a pas fini avec le « tyrannie de l’utopie » !

      A la base, je crois aussi qu’il faut tout repenser.

      C’est une question politique, sociale : qui décide de quoi, à partir du moment où tout est déjà décidé, où les financements publics et privés dans une bel ensemble sont déjà là, que la technocience est présentée comme notre futur inévitable, toujours la même rengaine du progrès technique sur quoi devrait se régler le « progrès humain »

      Les camarades qui sont intervenus sur – et contre – le « débat national » sur l’acceptabilité des nanos ont eu raison de démasquer cette farce où la pseudo démocratie vient légitimer l’existant et non permettre de le mettre en question. Et d’ailleurs, le thème des nanos commence à sortir un peu dans la presse, dans tout un ensemble de réseaux militants, associatifs, grâce justement à ces interventions…

      Pour répondre à ce que tu dis, je crois que le combat peut se mener à plein de niveaux.

      • Dans le milieu des chercheurs en général, en posant la question de l’utilité, de la pertinence des travaux et pas seulement l’absence de moyens…
        Il y a un collectif, composé de techniciens, d’ingénieurs critiques : Groupe Oblomov, 21ter, rue Voltaire 75011 Paris, oblomov@no-log.org. Je ne sais pas s’ils sont encore actifs, à vérifier
      • De manière générale, il y a le collectif « Pièces et Main d’œuvre », basé à Grenoble, qui fait un gros travail de vigilance, d’alerte, de combat sur ces questions…

      Et plus généralement, il y a des inquiétudes qui se font jour un peu partout même si cela ne se traduit pas (encore ?) par un mouvement structuré. Je crois que les camarades de l’OCL sont partie prenante potentiellement de ce combat. Il y a en a d’autres, avec une variété de positions et d’analyses.
      Je crois aussi que la question centrale, comme pour le nucléaire, les TGV, de nouveaux aéroports ou autoroutes, c’est :

      • on n’en a pas besoin,
      • on veut décider nous-même de ce qui nous concerne et nous importe : la définition des besoins et donc le type de société que cela suppose
      • on veut une société où les techniques, le travail, la production, le savoir, sont mis au centre des discussions et des décisions, prises par toutes et tous, sur la base d’une vraie démocratie, radicale s’il on veut, et d’une véritable maîtrise des « moyens de production » matérielle et intellectuelle.

      franck

      repondre message


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette