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[Cuba] Nous ne les laisserons pas seuls !

vendredi 6 mai 2011, par OCLibertaire

Solidarité envers les militants cubains qui luttent pour une Cuba plus libre, plus juste et plus solidaire


Voir en ligne : Texte original et signataires

Nous ne les laisserons pas seuls !

Le sixième congrès du Parti Communiste Cubain vient de se terminer avec l’annonce de la mise en place de réformes libérales (“à chacun selon son travail”) dans la sphère économique. Mais il faut également noter la réduction des services sociaux ainsi que la présence renforcée de militaires et de technocrates dans l’appareil d’Etat, alors que la place accordée aux intellectuels et aux ouvriers se restreint.

Dans la rhétorique comme dans les faits, l’efficacité, le contrôle et la discipline se substituent à l’égalité, à la solidarité et à la participation. Dans ce contexte, on note des signes d’une plus grande répression de la sphère culturelle, ce qui laisse présager un nouveau retour en arrière en matière de libertés fondamentales pour la population cubaine. Des artistes performeurs voient leurs noms salis par des fonctionnaires de la culture – reconvertis en censeurs – et par la mise en place de campagnes dans tout le pays qui diffusent des rumeurs et des accusations mensongères. Un prestigieux Centre Théorico-Culturel voit ses locaux et son équipement sabotés une fois de plus par des “voleurs” qui ne volent rien et que les autorités ne semblent pressées ni de trouver ni de sanctionner. Des poètes et des militants au niveau local reçoivent la visite d’agents des forces policières qui les menacent de les traîner en justice sous l’accusation de “contre-révolutionnaires” ou bien de les soumettre à la “colère populaire”, ce qui démontre bien que les soi-disant “foules en colère” qui répriment toute dissension ne sont ni populaires ni autonomes vis-à-vis du pouvoir qui les dirige.

Les dommages faits à la propriété sociale, la diffamation et la coercition (et la violence) physique et psychologique ne sont pas seulement des délits dans les codes pénaux du monde entier – Cuba y compris – mais ce sont les manifestations d’un terrorisme d’Etat. Pendant des décennies la population cubaine a transmis à ses enfants et au reste du monde son énergie pour construire un pays plus juste, où la culture, la santé et l’éducation seraient universelles et de qualité, malgré l’irrationnalité et la discrétionnalité d’une bureaucratie qui a toujours présenté les conquêtes populaires comme sa réussite propre. L’Histoire finira-t-elle par retenir de Cuba la répression et le mensonge, au lieu de l’héroïsme quotidien de la population ? Il n’est pas juste qu’il en soit ainsi.

Pour éviter cela, il nous faut, depuis en bas à gauche, faire pièce au silence et à l’autocensure qui consacrent l’impunité des censeurs, plutôt qu’ils ne font “le jeu de l’ennemi” comme le gouvernement se plaît à le rappeler. Ceux et celles qui voient aujourd’hui leur intégrité et leur travail militant menacés par les actions des autorités cubaines méritent tout notre respect. Ce ne sont pas des “mercenaires de la CIA” comme le dit la propagande officielle car ils survivent avec peine de leurs maigres salaires comme l’immense majorité du peuple cubain. Quand ils voyagent à l’étranger, ils investissent les fonds alors obtenus pour diffuser leur création humaniste et pour l’achat de matériel qui leur permette de continuer leur travail pour un pays plus cultivé et plus libre. Et quand ils reçoivent notre aide, sous forme d’un DVD, de gouaches ou d’une modeste collecte, c’est le fruit de la solidarité d’hommes et de femmes qui travaillent, étudient et créent dans des pays soumis aux politiques néolibérales et autoritaires du capitalisme et de ses gendarmes à Seattle et au Mexique, à Paris et Caracas, à San Francisco et Buenos Aires.

Comme ils sont loin, ces camarades, de ces bureaucrates qui voyagent facilement à travers le monde pour des “Campagnes de solidarité”, payées avec l’argent du peuple cubain, et qui, dès qu’ils en ont l’occasion, partent à Miami et y apparaissent comme des repentis à la télévision, des “combattants de la liberté”, ralliés aux forces anticastristes de l’exil. Comme ils sont différents de certains intellectuels “amis de Cuba” et qui, ingénus ou tarifés, confondent les idéaux de la Révolution avec les politiques de l’Etat cubain, et nient aux camarades cubains les droits qu’ils réclament (et parfois même dont ils jouissent) dans leurs régimes de démocratie bourgeoise. Comme ils sont supérieurs, dans leurs pratiques et leurs visions, à ces “réformistes autorisés” qui justifient avec un vernis théorique chaque revirement du régime cubain et développent des (pseudo) critiques abstraites, en mettant toujours en valeur la bonne volonté du pouvoir.

L’unique faute commise par nos camarades est d’oser penser (et transformer) leur réalité sans attendre les promesses de l’Etat Papa, ni les chants de sirène du capitalisme mondial. Ils croient à une vie meilleure, organisée localement, où l’épanouissement libre de chacun est une condition et un moyen pour le libre épanouissement de tous. Leurs échanges et leur formation au fil de nos luttes altermondialistes, piqueteras et zapatistes ont élargi leur horizon et nous a permis d’apprendre en retour de leur héritage historique, des erreurs et des résistances populaires. Ils représentent l’héritage le plus vif de la Révolution cubaine, qui survit malgré le cancer de la bureaucratie. Ils sont marxistes, anarchistes, libertaires, disciples de Marti, humanistes, féministes, écologistes, militant-e-s de base, mais par dessus tout ce sont des militant-e-s honnêtes, qui mettent leur vie en jeu et au service des autres. Nous ne laisserons pas seul-e-s.

Nous savons que les forces de la domination sont puissantes, qu’elles usent de la matraque et contrôlent le cyberespace, distribuent les coups et les bons points, dominent ceux qui ont peur et ceux qui se vendent. Mais nous avons la dignité et l’espoir contre lesquels – et les révolutions populaires et anti-impérialistes dans le monde viennent nous le rappeller – un pouvoir despotique ne peut rien. Nous espérons qu’il subsiste, chez les censeurs et les policiers, une trace de leur engagement originel avec le peuple cubain qui les porta au pouvoir. Mais si ce n’est pas le cas, et si nos camarades sont réprimés par des forces réactionnaires et policières, nous sommes prêts à lancer la campagne de solidarité la plus intense, avec toutes les ressources de la légalité et de l’opinion publique progressiste internationale. Nous ne baisserons pas la garde !

P.-S.

voir en ligne le site polemica cubana

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