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[Egypte] Irruption de mobilisations ouvrières 


jeudi 10 février 2011, par OCLibertaire

Des mobilisations ouvrières sont actuellement en train de surgir dans le pays, dans toutes les régions et selon des formes les plus diverses... La détermination de la Place Tahrir se propage à des entreprises et à des usines dans tout le pays. Si la révolte de Tahrir affecte un secteur clé de l’économie, le tourisme, elle s’étend maintenant à d’autres secteurs clés de l’économie Moubarak ... 
Au dix-septième jour du soulèvement, après le gigantesque rassemblement sur la place Tahrir du Caire et les manifestations de masse dans toutes les villes de la veille, l’irruption des mobilisations sociales dans pratiquement tous les secteurs pourrait marquer un tournant dans le processus révolutionnaire en cours.

mercredi 9 février 2011


Les informations que nous publions sont pour l’essentiel rapportées par un bloggeur présent au Caire.

J’essaie de les énumérer ici, au fur et à mesure : 
J’ai assisté à une manifestation devant le siège de l’assurance maladie, appartenant au ministère, dénonçant la faiblesse des salaires et l’évasion continue des fonds destinés à la santé. En fait, il s’agit d’un scandale impliquant l’État où il a joué en bourse et a perdu... 
J’ai également assisté à une petite manifestation des 3 seuls syndicats libres du pays revendiquant la liberté d’association. 

Des témoignages rapportent :

- Rassemblement de protestation contre la compagnie d’électricité dans le Sud du Caire.

- Manifestation des travailleurs des télécommunications dans le quartier d’Ataba, au coeur du Caire. Cela s’ajoute à ceux d’hier et aux travailleurs de la communication qui sont aussi en grève à Banha, dans le Delta.

- Des entrepreneurs [du bâtiment ?] protestant contre l’entreprise de ciment de Helwan. 


  • Des mécaniciens du secteur ferroviaire aussi en grève.
    
- Les travailleurs de l’usine Maspero dénoncent la corruption de la direction
    
- Les travailleurs de l’entreprise pharmaceutique de Masheya el Bakr ont coupé le pont sur le canal de Suez
    
- Plus de 2000 travailleurs de l’entreprise de filature et de textile Misr ont appelé à une grève à Helwan.
    
- Les travailleurs temporaires de l’Université du Caire sont aussi en grève.
    
- Des travailleurs du secteur du fer et de l’acier ont également fait un appel à la grève (National Steel Company, Misr National Steel Company).
    
- Des entreprises de sous-traitance de l’Etat sont en grève à Kafr el Dawar, Helwan et Kafr el Diat.
    
- Plus de 4.000 travailleurs en grève à l’usine de charbon de Helwan (Helwan Coke Company).
    
- Protestation à Gharbeya, à l’entreprise Sianco. 
- Les travailleurs toujours actifs de El Mahalla ont annoncé que, demain, va commencer une grève.
    
- Un grand nombre de travailleurs du secteur pétrolier est en grève et se rassemblera demain à Nasr City, district se trouvant en dehors du Caire, où se trouve le ministère du Pétrole.
    
- D’autres techniciens du secteur ferroviaire sont en grève à Beni Suef.
    
- Plusieurs entreprises sont fermées à Suez, où il y a un important secteur pétrolier et où les batailles de rue ont été les plus dures que partout ailleurs.
    
- Le Service des transports publics en grève dans trois dépôts. 
Les journalistes des quotidiens contrôlés par le régime sont en trains de se soulever contre leurs employeurs. 


MISE À JOUR ! 
Le pays tout entier semble avoir explosé dans la lutte ouvrière ... 

    Les employés des transports publics du Caire ont appelé à une grève générale demain. Au moins les dépôts de Nasr, Fateh, Ter’a, Amiriya, Mezzalat et Sawwah Station, paralysant la ville. Il semble que demain ils vont se réunir au siège, à Nasr City, pour former un syndicat libre. Ils ont fait un communiqué demandant la chute du régime (en précisant le Parti national) et la levée de l’état d’urgence. 

  • Des travailleurs des télécommunications d’Alexandrie ont également manifesté devant le central de Mansheya.
    
- Des informations disent également que quatre entreprises d’armement à Helwan. 

  • L’entreprise Portland, qui produit du ciment à Alexandrie, a également connu des manifestations. Il s’agit de la plus grande usine de ciment dans le monde arabe et l’une des premières dans le monde.
    
- 1500 personnes sont en grève dans l’usine de coton et de lin de Mahala. 
- 2000 sont sorti de l’usine de médicaments de Sigma.
    
- 250 journalistes se sont réunis afin d’obtenir le quorum pour l’assemblée générale extraordinaire qui permettra de démettre l’actuel président du syndicat, l’officialiste Mohammed Makram, élu l’an dernier lors d’une élection dénoncée comme frauduleuse.
    
- 3000 travailleurs du secteur ferroviaire demandent une augmentation des salaires, entre autres demandes.
    
- 6000 travailleurs de l’Autorité du canal de Suez ont manifesté dans les villes de Port-Saïd, Suez et Ismaïlia exigeant de meilleurs salaires et rappelant que c’est l’une des plus importantes sources de revenu du pays. Revenus destinés exclusivement aux dépenses présidentielles
    
- Omar Effendi, une sorte Galeries Lafayette locale, a aussi connu des grèves et des mobilisations. Il existe des informations sur celles qui ont eu lieu à Alexandrie.
    
- Plusieurs centaines de travailleurs de la soie et des filatures à Kafr el Dawar ont fait des débrayages au changement d’équipe pour réclamer le paiement des salaires impayés et des indemnités accrues.
    
- Les postiers à Sharqeya sont également de grève. 

  • 3000 habitants du quartier de Zarzara ont brûlé bâtiment du gouverneur de Port-Saïd en découvrant qu’en raison de la corruption, il avait été prévu de transformer leur quartier en décharge.
  • 4000 travailleurs du nettoyage ont manifesté aujourd’hui à Alexandrie.
    
- 800 travailleurs des compagnies pétrolières ont manifesté à Behera, près d’Alexandrie. 

  • En relation à ceci, un millier de personnes du quartier du Max, à Alexandrie, ont manifesté pour demander que les compagnies pétrolières qui travaillent là, les prennent en considération pour l’indemnisation accordée dans les situations de risque écologique et de santé dans lesquelles ils vivent. 

  • 500 personnes se sont rassemblées dans un hôpital d’Alexandrie exigeant des augmentations de salaire.
    
- Les travailleurs des centres d’information, sorte de collecteurs d’informations pour les enquêtes et les statistiques, ont repris la lutte pour des améliorations concernant leur travail. Leur lutte a été l’une des plus importantes et les plus longues l’an dernier de l’année passée.
    
- 500 centres de santé de soins primaires du Croissant-Rouge étaient en grève contre les dirigeants corrompus de cet organisme. 

  • Selon Al-Jazira qui l’a annoncé, les postiers au Caire ont rejoint les mobilisations. 


Vous voyez cela est irrépressible et difficile à quantifier. Je pense qu’il y a beaucoup plus de luttes, mais ce sont celles que j’ai pu trouver pour le moment. Je mettrai à jour au fur et à mesure. Préciser que Helwan est l’un des trois gouvernorats qui divisent le Caire (ou le Grand Caire, comme ils l’appellent).
    Bien comprendre aussi qu’une partie de ce soulèvement est le résultat de l’insurrection de Mahala en 2008. Une insurrection entièrement ouvrière qui, avec le mouvement contre la guerre en Irak, a reconfiguré l’activisme égyptien. Aujourd’hui, ils sont en train de recueillir ces fruits. 

Ajouter, avant de clore, que l’Egypte a commencé à voir clairement que le départ du raïs est inévitable. Du moins, c’est ainsi que la rue le sent. Un exemple : la tentative de la pop star Tamer Hosny d’entrer sur la place Tahrir. Au début de l’insurrection, il a exprimé son soutien pour le régime. Comme il a vu que celui-ci vacillait, il a tenté de se rapprocher des rebelles dans un acte d’opportunisme absurde. Les gens, évidemment, l’ont sifflé et il a dû quitter la place en pleurant, comme on a pu le voir à la télévision.



FLASH NEWS : Al Jazeera a annoncé qu’il y a cinq morts et des centaines blessés dans des affrontements entre policiers et manifestants à el Kharga (dans le gouvernorat de El Wadi el-Gedid), l’une des oasis du désert égyptien. Un véritable massacre dans un endroit toujours tranquille. La foule en colère a réagi en mettant le feu à sept bâtiments officiels, dont deux commissariats, un tribunal et le siège local du parti du président Hosni Moubarak, le Parti national démocrate (PND) ...

sources egipbarricada
traduit du catalan, avec sources : 3arabawy, Al Jazeera, Global Voices on Line]

Autres informations

  • A l’aéroport du Caire, des grèves ont éclaté dans des sociétés de services ou de sécurité. Des fonctionnaires du département des statistiques gouvernementales ont également manifesté dans la capitale.
    
- Des grèves ont également été signalées dans une société gazière dans la région du Fayoum (150 km au Sud-Ouest du Caire).

  • Mouvement aussi dans l’usine pharmaceutique Sidna de Quesna
- Grève dans les arsenaux de Port Saïd
- Dans le sud du Pays (Haut-Nil) des manifestations de paysans ont été rapportées. 8000 personnes, dont une majorité de fermiers et d’ouvriers agricoles, ont bloqué la route principale et le chemin de fer avec des barricades de palmiers enflammés (d’après AP). 

    En fin de journée, les affrontements dans la région de El Wadi el-Gedid se poursuivraient…

P.-S.

A signaler un texte intéressant de nos camarades suises de l’OLS

Révolutions arables : du soulèvement au pouvoir populaire

Le soulèvement populaire égyptien livre une dure lutte au régime Moubarak et aux puissances du capitalisme mondialisé. Tous les pouvoirs interviennent sur la scène égyptienne pour sauvegarder leurs intérêts politico-militaires et économiques. Pour y arriver il leur faut brider la contestation populaire, maintenir un pouvoir étatique aussi fort que possible et briser l’élan de la lutte sociale et démocratique. Il leur faut en particulier séparer les revendications sociales des exigences de démocratie et enfermer tout le mouvement dans le cadre d’une politique de délégation qui renouvelle partiellement les institutions sans toucher aux mécanismes centraux de la société d’exploitation.

Révolutions sociales et démocratiques

Les soulèvements populaires arabes sont certes des révolutions démocratiques. Sérieusement démocratiques, car elles sont porteuses d’une exigence et d’une pratique de pouvoir populaire. Ce sont aussi des révolutions sociales car les nombreux acteur/trice.s de cette contestation populaire entendent changer en profondeur la société, partager autrement les richesses, imposer plus de justice et plus d’égalité sociale.

Les soulèvements populaires arabes sont également porteurs de l’exigence évidente de l’émancipation des femmes et de l’égalité radicale entre femmes et hommes. Rien de tout ceci ne pourra être conquis sans une organisation autonome du mouvement populaire qui devra attaquer l’ensemble de l’ordonnement économique, social et politique.

La suite sur leur site http://www.rebellion.ch

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