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en marge des manifestations de rentrée

Retraites, crise, dette publique, Etat sécuritaire : quelques éléments de fond…

c’est le fond qui manque le plus !

mercredi 1er septembre 2010, par OCLibertaire

Je crois que si l’on veut en revenir au contenu et aux enjeux de la situation présente, et donc sur ce qu’il serait souhaitable de dire, le minimum serait de mettre un peu en relation quelques éléments les uns avec les autres. Sinon, un jour on parle des retraites, un autre de la politique sécuritaire de l’Etat ou du racisme, un troisième des mesures budgétaires, un quatrième les privatisations de tel ou tel service public, selon les principes, les découpages et les agendas de la politique institutionnelle qui est toujours un principe organisateur de la séparation des parties avec le tout.

Quelques points et réflexions donc rapidement mis en forme…


Retraites, crise, dette publique, Etat sécuritaire : quelques éléments de fond…

La contre-réforme des retraites dans la crise et les dettes publiques

Ce n’est pas la première. Mais celle-ci s’inscrit dans un moment précis, celui d’une crise capitaliste majeure dans le Vieux continent qui se traduit par une explosion de la dette publique des Etats. Il y a quelques mois encore, on ne parlait que de la crise grecque… maintenant elle est globale. Cette crise est d’abord une crise de la réalisation des profits, de la valorisation pour le dire dans des termes marxiens. La raison principale est que globalement le coût de la “force de travail” ne permet plus la réalisation de niveaux de profits attendus. L’explosion du capital financier, par le crédit et les opérations boursières, création monétaire, de “capital fictif”, a été et demeure une “réponse” capitaliste à cette baisse du taux de profit.

Les retraites sont des éléments du salaire. Mais il y en a d’autres comme le coût de la rémunération des fonctionnaires, des salariés du secteur parapublic et au sens large ce qu’on appelle le secteur “non-marchand” (associations de toutes sortes, plus ou moins sous-traitantes des mairies, départements, régions…, plus ou moins indépendantes mais subventionnées) : c’est pourquoi, au nom de la réduction des déficits, l’Etat prévoit de réduire encore le nombre des salariés de ces secteurs (autour d’environ 5% des effectifs en 3 ans, voir la RGPP, Révision Générale des Politiques Publiques qui sera adoptée en septembre 2010, pendant le vote au parlement de la réforme des retraites). Et sans doute de privatiser tout ou partie (externalisation) de ces services publics, de réduire les subventions, etc.

Avec l’argument de la dette publique, les Etats européens tiennent l’argument pour redéfinir les rapports entre salaires et profit, une remise en ordre générale dans les rapports de classe, une baisse des salaires ou “coût” du travail. C’est une politique qui s’occupe maintenant d’abaisser le coût des retraites, mais qui en même temps prépare en septembre un budget de crise pour 2011-20013 (par des coupes sombres dans l’emploi public, les équipements, hôpitaux, les subventions aux associations, etc.), et qui demain sans doute prendra d’autres mesures visant à accroître la profitabilité des entreprises, à commencer par la flexibilité du travail au sens large, à placer les chômeurs dans la contrainte du travail forcé (cet été, le placement des chômeurs est devenu un “marché” et des officines vont se rémunérer sur l’obligation faite à des chômeurs d’accepter des boulots de merde payés des miettes), à briser les rigidités coûteuses du contrat de travail, la médecine du travail, à faciliter encore plus les licenciements collectifs, à promouvoir des formes nouvelles du principe ancien du travail à la tâche (entre “l’entreprise de soi” et la survie dans le travail informel), etc. Pendant ce temps, les chantages à l’emploi trouvent matière à s’exprimer (le vote majoritaire des ouvriers de GM Strasbourg cet été comme celui de la FIAT à Naples en faveur d’une remise en cause de conquêtes salariales et sociales en échange de la conservation des postes de travail).

Plutôt que de se battre uniquement sur les retraites, il serait pertinent de bien situer l’enjeu global qui est celui du capitalisme lui-même, de sa contradiction majeure qui est située en son coeur : le rapport salarial lui-même. Sinon, on tombe dans la dénonciation républicaine de la “bataille citoyenne pour les retraites”, le retour au plein emploi et à l’Etat Providence d’un capitalisme plus redistributif. Ça c’est le fond de commerce des syndicats, de la “gauche de gauche”, ATTAC, NPA et j’en passe. Je pense qu’on s’inscrit dans une autre démarche et que l’on a autre chose à dire.

Politique sécuritaire = Etat autoritaire

Bien sûr, tout Etat est autoritaire par définition parce qu’il puise une bonne part de sa légitimité dans l’exercice de son autorité. Mais selon les moments et les contextes, cette autorité ne prend pas les mêmes formes.
Contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là (y compris dans certains tracts anarchistes), on ne peut pas dire que c’est seulement l’opportunisme électoraliste qui dicte cette politique. Quand une même logique politique est à l’œuvre depuis au moins une bonne vingtaine d’années, on n’est plus dans la tactique à court terme (les voix du FN), mais dans une redéfinition, une modification sur une longue durée, stratégique si l’on veut, de l’Etat lui-même, même si le temps s’accélère et que le court terme détermine l’économie comme la politique.

La mise en place progressive d’un Etat sécuritaire, autoritaire, qui alimente sa politique sur la réaffirmation continuelle de son autorité, en mettant en scène des peurs, en les manipulant dans un sens voulu, en construisant des consensus contre des menaces imaginaires et des minorités déclarées nuisibles et sans cesse recrées et réinventées (asociaux violents, sans-papiers, jeunes des cités, psychiatrisés, Roms, “gens du voyage”, Français de deuxième catégorie, élèves turbulents et leurs familles, nomades, mendiants, pauvres…) à un corps social déclaré “sain” car adossé à une appartenance/identité nationale qui s’hérite et « se mérite » selon Sarkozy.

Les raisons de la modification de cet Etat sont multiples. Mais de toute évidence, il y a un lien entre la fin de l’Etat-providence qui correspondait à des formes de cohésion sociale autour du plein emploi, que certains appellent le fordisme (y compris avec une conflictualité sociale interne et des grèves ouvrières nombreuses) et l’avènement de l’Etat “néo-libéral” d’une société “post-fordiste”, du travail flexible, des flux de toutes sortes (force de travail, marchandises, monnaie…) aux rapports sociaux moins structurés et plus marqués par une montée en puissance incessante des indocilités de toutes sortes, depuis des formes d’économie grise, voire mafieuse, alimentant une “insécurité” mise en scène aux diverses rébellions, actives ou passives (les “désobéisseurs” de tous poils qui menacent l’autorité de l’Etat (sa légitimité), les jeunes et les chômeurs paresseux et parasites “qui ne veulent plus travailler” alors qu’il y a, parait-il, du travail, etc.).
Etat policier et punitif, qui sans cesse met en avant et en scène l’action policière du maintien de l’ordre, de la sanction, de la coercition, de la menace afin d’obtenir une nouvelle forme, sinon d’adhésion, du moins de loyauté : l’obéissance par la peur… dans un moment où il peut craindre aussi des rébellions sociales multiples liées aux effets de la crise et aux offensives en cours menées tous azimuts.

Cette double modification – du capitalisme et de l’Etat – n’a jamais été mieux exprimée et résumée symboliquement que ces dernières semaines de l’été 2010 où se condensent simultanément et de manière articulée, une double offensive politique de l’Etat, sur le plan économique de la réduction des coûts salariaux (retraites et coupes budgétaires) et sur le plan sécuritaire du renforcement de son action policière et de la fabrication de nouveaux boucs émissaires.

Bien évidement, il faut tout mélanger, il faut mêler la lutte contre la réforme des retraites à l’ensemble des attaques visant à nous faire payer les frais de la crise, mais aussi les résistances aux campagnes sécuritaires de l’Etat.

Autodétermination sociale contre la politique par la dette et l’État policier

La dette publique est devenu le prétexte de cette offensive.

Ce qu’il faut mettre en avant c’est le refus de cette dette, refus d’être pris en otage dans cette mécanique de l’assujétissement. Comme disaient certains manifestants en Grèce au printemps dernier, comme disent les copains de l’OCL/OLS dans leur tract pour les manifs du 7 septembre, c’est bien une insoumission à ce principe, à cette mise sous tutelle qu’il faut défendre : « nous ne devons rien à personne, au contraire, la bourgeoisie nous doit tout ! » et que, comme le disait un groupe révolutionnaire grec, c’est dans ce seul sens là que l’on veut bien régler nos comptes avec le capital !

Pour faire lien avec la politique sécuritaire, qui utilise le racisme et la xénophobie, mais qui va bien au-delà, il me semble qu’il faut là aussi être offensif et pas pleurer sur l’abandon des valeurs de la République ! Pas plus qu’il ne faut défendre des retraites “citoyennes” (le salaire et son niveau n’est pas un droit républicain mais un élément du rapport de force entre des classes), il n’y a lieu de célébrer le 140ème anniversaire de la « République laïque, démocratique et sociale » (sic) des fossoyeurs de la Commune de Paris et des conquêtes coloniales (l’appel citoyen pour les manifs du 4 septembre s’inquiète aussi de la mise « en péril de la paix civile »).

Il faut revendiquer la liberté de circulation, le fait que, contrairement à ce qui nous sépare des puissants et des Etats, nous sommes du même monde, que si nous revendiquons la solidarité et l’hospitalité, ce n’est pas par gentillesse ou générosité mais parce qu’il n’y a pas d’étrangers ou que nous le sommes tous, parce que nous venons tous d’ailleurs et que nous sommes tous ici ou là si cela nous chante (et que c’est la misère et les ségrégations qui nous poussent souvent à “chanter”, à bouger, à traverser les pays et les continents, à refaire notre vie dans un ailleurs plutôt que dans un ici ou vice et versa), sans demander la permission à aucune autorité, à aucune police des frontières puisque nous sommes partout, en même temps et indifféremment chez nous et chez les autres…

Combattre l’Etat quand il nous parle de sécurité alors que c’est le capitalisme qui développe de l’insécurité, provoque des guerres, des famines et des catastrophes sociales comme hier à la Nouvelle-Orléans, à Haïti ou aujourd’hui au Pakistan, détruit des solidarités et les autonomies locales, promeut la guerre et la haine de tous contre tous par la “liberté du marché” (qui est la liberté du loup dans la bergerie libre selon Marx mais aussi le lieu où l’“homo homini lupus”, les agneaux se transforment en loups les uns pour les autres), et veut augmenter ses profits et sa domination par de nouvelles barbaries et la destruction de nos vies.

Que ce soit avec la dette publique ou la sécurité, l’Etat cherche à nous prendre en otage par des mécanismes d’assujétissement, de chantage, de dépendance, par une gestion disciplinaire et policière de nos vies et la transformation de nos droits en devoirs, en dettes.

Face aux questions du travail (des salaires, des retraites, de la dette…) comme face à la politique sécuritaire de l’Etat, ce qu’il faut mettre en avant, c’est la capacité d’autodétermination sociale et d’émancipation collective, c’est l’affirmation de la certitude que nous pouvons faire autrement : nous pouvons réorganiser complètement la société sur d‘autres bases, nous possédons l’intelligence et les savoirs pour créer un monde nouveau (en partant du principe qu’il y a une égalité des intelligence et que les savoirs appartiennent à tous), nous pouvons parfaitement faire des choses utiles qui correspondent à ce que l’on souhaite, “nous” (sans appartenance ou avec des appartenances multiples et précaires, d’ici, d’ailleurs et de partout), nous sommes la majorité sociale c’est-à-dire que nous sommes majeurs et capables de nous gouverner nous-mêmes directement, dans une société débarrassée du capitalisme et des formes du pouvoir politique qui le prolongent et le servent.

Le capitalisme a besoin de nos capacités productrices et créatrices pour les transformer en travail salarié, une forme de domination et de contrainte, grâce auquel nous réalisons un surtravail non rémunéré et lui des profits et des marchandises sur un marché anonyme par lesquelles le travail salarié devient aussi une abstraction de l’activité humaine.

Le capitalisme a besoin de nous pour exister et prospérer.
Nous n’avons pas besoin de lui !

Alors, on s’arrête, on arrête tout. On arrête de marcher dans sa combine.

Avant et après les manifs, on se retrouve entre nous. On se parle. On s’organise à la base, par nous-mêmes et pour nous-mêmes et on décide.

On entre en résistance. On refuse d’obéir aux injonctions, aux chantages et aux menaces de l’Etat.

Nous avons de moins en moins à perdre.
Et, chaque jour un peu plus, un monde à gagner !

Ce sont les mouvements sociaux forts et vivants qui nous renforcent et nous rassurent parce qu’ils font reculer les replis sur soi, les peurs, les haines de l’autre, les sentiments d’impuissance et les besoins de protection. Mais nous nous sentirons pleinement rassurés, en sûreté, en sécurité, quand nous serons sauvés et débarrassés du capitalisme, de ses dangers, de l’exploitation, du travail salarié, quand les rapports de domination entre les êtres, générateurs d’insécurité, de peurs, de chantages et de haines, seront déconstruites et parce qu’il ne sera plus permis qu’ils se reconstituent.

Une manifestation de plus ou de moins, même massive, ne changera rien. Le pouvoir politique le sait parfaitement et les syndicats aussi. Les modifications éventuelles avec le projet initial se feront à la marge, dans pur jeu politicien des apparences et des faux-semblants. Ce n’est pas d’un courant d’opinion pour dire que l’on est en désaccord avec le gouvernement que nous avons besoin, mais d’autre chose.

Nous avons besoin de mouvements de lutte qui fassent reculer l’offensive de l’Etat et inversent les rapports de force. Nous avons besoin de luttes qui ouvrent des brèches, modifient les conditions du possible, permettent à nos refus de s’exprimer et de les transformer en une rébellion sociale qui soit en même temps un processus de création et d’émancipation.

“Léo”

(texte initialement paru sur des forums anarchistes, il a été légèrement revu pour cette publication)

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2 Messages

  • Pour aller dans le même sens, il y a des "bases" ouvrières qui en ont assez des manifs-promenades saute-mouton organisées à l’appel des bureaucraties syndicales...

    Ce qui est à l’ordre du jour, ce n’est pas l’unité des directions syndicales (tout le monde s’en fout !) mais c’est bien : comment passer d’un courant d’opinion de rejet de la contre-réforme des retraites à un vrai mouvement social, de lutte, qui impose un rapport de force avec le gouvernement et qui l’oblige à reculer ?

    Les manifs, même massives, ne suffisent pas. Alors ???
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    « Depuis des mois nous ne cessons d’appeler à une lutte plus dure et concrète et non des rassemblements avec promenade de santé, nous sommes persuadés que la seule façon de faire réellement reculer le gouvernement c’est de durcir le ton, faire comme nous l’avons fait pour le CPE avec des blocages de zones industrielles et des poumons financiers du pays »

    2 septembre 2010

    JOURNEE DU 07 SEPTEMBRE, POSITION DE LA CGT GOODYEAR

    Le 01 Septembre 2010 la CGT Goodyear c’est réuni afin de décider la position à prendre sur la journée d’action nationale sur les retraites programmée le 07 septembre 2010.

    Depuis des mois nous ne cessons d’appeler à une lutte plus dure et concrète et non des rassemblements avec promenade de santé, nous sommes persuadés que la seule façon de faire réellement reculer le gouvernement c’est de durcir le ton, faire comme nous l’avons fait pour le CPE avec des blocages de zones industrielles et des poumons financiers du pays. Le fait de vouloir absolument faire des intersyndicales avec des syndicats qui ont signé un recul sur les droits aux retraites à plusieurs reprises, freine notre centrale et oblige des compromis de formes de lutte bien en deçà des besoins et des attentes de nombreux salariés.

    La CGT Goodyear a demandé un blocage de la zone et à ce jour nous n’avons aucun retour, tant que nous ne nous engagerons pas dans un mouvement plus radical le gouvernement ne reculera pas, au mieux il fera semblant d’écouter mais il validera son projet très néfaste. La timidité des centrales syndicales est incompréhensible alors que dans le pays tout entier de nombreuses voies s’élèvent pour dénoncer le manque de conviction et d’envie de faire bouger concrètement la société !!!

    Sur la zone industrielle Amiens Nord, il faudrait que ce soit encore la CGT Goodyear qui bloque celle-ci, bien sur ce n’est pas l’envie qui nous manque, mais pourquoi la CGT Goodyear devrait elle seule prendre une initiative sur un mouvement national, nous avons des instances c’est à elles de prendre une telle décision.

    La CGT Goodyear Amiens nord n’appellera donc pas à la grève parce que pour nous il faut passer à la vitesse supérieure mais pour ceux qui le souhaitent un rassemblement est prévu à la MACU à 14.30 heures , ras le bol de perdre des journées pour ne rien bloquer et laisser les entreprises et les banques fonctionner normalement, pendant que l’ont marche dans les rues les actionnaires continuent à faire du fric sur notre misère, le gouvernement doit avoir une réponse concrète face au mépris qu’il nous impose.

    Lors de la dernière manifestation nous avions interpellé l’UD CGT sur le manque d’ambition à créer un vrai rapport de force et non pas des ballades au centre ville d’Amiens, nous n’avons eu aucun retour à notre demande, si la CGT n’appelle pas à durcir l’action il est certain le gouvernement ne reculera jamais, face aux attaques dont nous sommes tous victimes il faut absolument une réponse forte et massive.

    Le 07 septembre 2010 la CGT Goodyear n’appellera pas à la grève et nous le regrettons, mais c’est le seul moyen de nous démarquer d’une ligne qui devient de plus en plus complaisante, la base doit être écoutée nous réclamons le retrait du projet de gouvernement et un mouvement illimité avec blocage des poumons économiques de notre pays !!!!!

    VOTRE SYNDICAT, VOS ELUS CGT

    http://www.cgt-goodyear-nord.fr/index.php?news/2010/09/02/655-position-cgt-goodyear-pour-la-journee-du-07-09-2010

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  • Retraites, Rroms, précaires... refuser le gouvernement de nos vies par la peur

    Pour un retour des piquets de grève des chômeurs

    Petit texte de la coordination des chômeurs et précaires de Rennes en vue des mobilisations à venir... Texte proposé aux collectifs qui souhaitent se l’approprier, avec ses revendications et rendez-vous propres...

    On entend que la rentrée sera chaude. Nous pouvons raisonnablement espérer que malgré le rituel syndical des manifestations mensuelles parfaitement inoffensives, les mobilisations dans les semaines à venir sortent de ce carcan. C’est dans ce contexte que la grève des chômeurs prend encore plus de sens.

    La rhétorique et les pratiques fascisantes du gouvernement semblent inquiéter de plus en plus de gens. Les expulsions des camps des Rroms en sont la preuve. Elles sont l’exemple grossier d’une forme de gouvernement qui, pour réguler la crise du capitalisme, contrôle, divise les populations et gouverne par la peur. Peur de perdre son maigre salaire, son boulot de survie et son « pouvoir d’achat ». Peur de perdre ses misérables allocations, d’être soupçonné de profiter d’allocs mirobolantes. Peur de se trouver en garde à vue, ou pire, lorsqu’on manifeste sa colère. Peur de payer très, très cher le moindre affrontement avec une police de plus en plus violente. On est de plus en plus nombreux à ne plus supporter l’obscénité d’un pouvoir alliant l’affirmation des privilèges d’une caste de riches, de patrons et de politiciens, et le mépris des classes populaires.

    Les questions posées par la grève des chômeurs demeurent plus que jamais pertinentes. La gestion de la précarité reste la colonne vertébrale d’une subordination qui prend les formes diverses de la soumissions aux logiques de la concurrence de tous contre tous, à l’intériorisation de la motivation pour un entrepreneuriat de soi, aux logiques managériales. Bref, l’imposition d’idées de l’existence toute entière soumise aux lois de l’économie et de la valorisation capitaliste.

    Nous avons été nombreux durant cet été à participer aux collectifs de soutien des Rroms : nous avons pu constater leurs formes d’auto-organisation collective dans des situations d’extrême précarité et dans un contexte de traque policière permanente. Leur précarité est aussi la notre.

    Durant l’été de nombreuses rencontres ont eu lieu aux quatre coins de l’hexagone pour organiser le refus collectif de cette politique et pour imaginer le mise en place de formes coopératives de travail et de vie : depuis des expériences d’autonomie matérielle sur la base du travail coopératif faisant défection à la logique marchande, jusqu’à l’appropriation de l’habitat et plus généralement des modes de vie qui ne dévastent pas nos rapports avec notre environnement. C’était nos universités d’été contre les leurs. Parions que notre été fût plus beau que le leur.

    Il s’agit, désormais et dans les temps à venir, pour les collectifs de chômeurs et précaires en lutte de diversifier ces formes d’intervention : de partager des expériences coopératives, des liens avec des secteurs dissidents du syndicalisme et des luttes ouvrières, de s’enraciner dans les territoires métropolitains et dans les campagnes qui en font désormais partie. Il y a un temps pour la constitution de bases matérielles d’autonomie, pour la liaison avec des secteurs en crise du travail salarié et il y a un temps pour des interventions de blocage des modes de gestion du travail, de la précarité, du chômage. Il nous faut articuler les deux. Il semble nécessaire d’allier des formes d’intervention spectaculaires avec des interventions d’autodéfense et de blocage dans les Pôle Emploi.

    Le 24 août à Rennes il y a eu des actions auprès de plusieurs agences de Pôle Emploi et une intrusion à France 3 avec des chômeurs et précaires de Rennes, de Lorient, de Brest… C’était le début de notre rentrée. La suite de celle-ci s’accordera aux mouvements de contestations du 4 et du 7 septembre contre la xénophobie d’État et la reforme des retraites.

    Dans ce contexte, il s’agit d’approfondir les liens avec un mouvement populaire de résistance comme avec un syndicalisme de combat. Certains syndicats appellent à la grève reconductible dans des Pôle Emploi comme dans l’éducation nationale. En intervenant de façon coordonnée, nous ferons notre possible pour les aider à se mettre en grève et pour, dès le 8 septembre, les aider à la reconduire.

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