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Projet d’aéroport de Notre Dame Des Landes, quoi de neuf depuis l’été ?

mercredi 17 février 2010, par Courant Alternatif

Les tentatives d’implantation d’un aéroport international à Notre Dame des landes près de Nantes, remonte aux années 70. Dernièrement la menace s’est concrétisée et les différentes procédures administratives épuisées, les premiers carottages sur le site ont démarré au printemps dernier et les appels d’offres sont en cours. La mobilisation sur le terrain reste forte et multiforme. Cet été, un Camps climat international regroupant une mouvance radicale et une Semaine de la résistance organisée par des forces politiques plus institutionnelles se sont côtoyées sur place au même moment dans une ignorance réciproque plutôt que dans un esprit de convergence des initiatives. Aujourd’hui l’échéance des régionales vient perturber les lignes politiques traditionnelles au sein même des forces politiques coalisée à la tête de la région (PS-PC-Verts). Petit aperçu de la situation


Durcissement des positions
des tenants du projet
d’aéroport ....

…qui continuent de poser les jalons de sa réalisation : la déclaration d’utilité publique ayant logiquement débouché sur l’appel d’offres, 3 concessionnaires potentiels ont été retenus : Taranis, Vinci et Aemera (Bouygues). Les trois s’engageant à faire tenir dans une enveloppe de 581 millions d’euros un projet estimé à plus de 2 milliards… et consistant à implanter un barreau routier et un aéroport sur 2000 ha de bocage et de terres habitées.
Pour échapper aux contradictions que pourraient susciter les discours du Grenelle de l’environnement ou du sommet de Copenhague, le front commun PS-PC-UMP assène à la population qu’ il ne s’agit pas d’un nouvel aéroport , mais du simple transfert de celui existant –Nantes-Atlantique, au Sud Loire.
Et s’engage dans une campagne de communication basée sur la peur (les avions qui vont s’écraser sur Nantes), la promotion de l’écologie –sans rire-, puisque sur les zones naturelles qui sont à proximité du site « libéré » accueilleraient une forêt urbaine (-et soit dit en passant un beau projet urbain entre Nantes et Pornic !), sans oublier l’incontournable promesse du développement économique. Le tout délayé dans les mots clefs sans lesquels on n’est rien : « avenir, emploi générations futures, ambition, développement et progrès durables, créations d’emplois, acte fort, intérêt stratégique, développement durable… ».
Soutenue par les majorités de gauche du conseil Régional et de Nantes Métropole, cette propagande ne suffit plus au Conseil Général, dont le président est aussi celui du Syndicat mixte rassemblant les collectivités qui portent le projet. Il vient donc de souscrire pour 200.000 euros auprès d’une agence de communication, la possibilité de réagir « aux propos fallacieux et tendancieux des opposants, qui ne doivent pas être les seuls à occuper le terrain ». Le syndicat mixte disposait d’un site internet et d’une lettre d’information, arsenal jugé insuffisant pour mobiliser population et élus en faveur de cette belle idée. Et ça marche : 18 maires PS du secteur de l’actuel aéroport viennent de se regrouper et signer un appel pour le transfert, tandis qu’injonctions et menaces diverses arrivent par courriels chez les élus du département qui pourraient être tentés de rejoindre les opposants organisés.


Bataille d’élus ?

Pour ou contre l’aéroport, les collectifs fleurissent, les documents de synthèse, les communiqués et les déclarations se multiplient… Les protagonistes ou signataires sont souvent les mêmes : les élus.
Les 17 maires de Nantes métropole (voir plus haut), les 450 élus regroupés en association contre le projet, et recrutés dans les 9 départements des 2 régions Bretagne et Pays de la Loire, les élus Verts et les Alternatifs de Loire-Atlantique qui multiplient les déclarations et sont aujourd’hui rejoints par ceux de Parti de Gauche et du Modem. Les Verts menacent (liste Europe Ecologie autonome au premier tour des régionales, pas d’engagement pour la suite).
L’approche du scrutin de mars favorisant la confiscation de l’action et de la mobilisation sur le terrain au profit des discours et autres déclarations d’intention… Force est de constater que depuis la semaine de Résistance sur le site en août, il est difficile de se faire entendre depuis le bocage de Notre Dame des Landes. Le tourbillon médiatique (alimentant le côté binaire pour/contre) et la « prise en charge » par quelques ténors de l’Ecologie de la question de la lutte anti-aéroport ne doivent pas faire oublier les réalités du terrain, avec des paysans qui se battent, des familles qui refusent les expulsions, et une solidarité active.

Ceux qui résistent

Progressivement, il semble également que certaines formes d’action privilégiant l’humour et le côté clowns, y compris dans des face à face avec les flics, et visant surtout à attirer les médias, déstabilisent des militants anti-aéroport. De même que la dilution de la question de l’aéroport dans un discours de néo-décroissance, même si tout le monde s’accorde sur l’impératif de sauver les terres cultivables.
Certaines forme de la mobilisation s’inscrivent dans la tradition et la durée : les réunions régulières et la fabrication de matériel d’information au lieu-dit « La Vache rit », bâtiment mis à disposition par un paysan de NDDL ; la « Vigie » qui consiste à interpeller silencieusement les Conseillers généraux et les habitants de Nantes continue. Tous les jours, de 8 h à 18 h, des opposantEs lambda se relaient avec pétitions, pancartes et tracts devant le Conseil Général depuis un an et demi.
Ce qui continue à fonctionner, c’est ce qui cimentait traditionnellement des habitants locaux et du département, depuis les actions contre les projets de centrales nucléaires du Pellerin ou du Carnet : le refus du matraquage, de la force, de l’agression sur les terres et les maisons.
On réussit à mobiliser rapidement et quotidiennement s’il le faut contre les forages (1) (sondages de terrains par des laboratoires, encadrés par une centaine de gendarmes et CRS). Ainsi en avril 2009, 2 paysans sont passés en procès à Saint-Nazaire pour « vol de terre », « bris de matériel » et « refus de prélèvement ADN » après avoir dispersés les échantillons des forages sur le site : 2 mois de prison avec sursis pour les faits et 2 mois avec sursis pour refus ADN pour chacun d’entre eux…. Actuellement des enquêtes sont en cours contre des opposantEs qui ont bloqué des engins des ponts et chaussés en septembre sur leur lieu de garage…
En marge de l’ACIPA, le collectif qui regroupe les populations et organisations opposées au Projet, il y a le collectif « Les habitants qui résistent », un groupement principalement constitué autour de la défense des maisons. Il faut effet savoir que le Département est désormais propriétaire de 27 maisons dans le périmètre concerné, qu’il les louait sans vergogne et en l’état à des personnes qui les ont entretenues et sont devenues expulsables depuis le 31 décembre. Il s’agit pour l’essentiel d’anciennes fermes délabrées avec du terrain autour, pour lesquelles des loyers de 170 à 350 euros ont depuis longtemps remboursé l’investissement ! L’Etat lui-même était propriétaire d’une maison occupée depuis 1996. La famille vient d’être informée, via la Direction générale de l’aviation civile, que la maison a été vendue (avec eux dedans ?). Une autre demeure est squattée par des jeunes qui ont vainement tenté d’obtenir une convention de location par les voies légales ; développant potagers et petits élevages, ces habitants devenus « sans-droits » se battent contre les expulsions et la destruction des maisons.
Au-delà de la perte de logement, chacun sait que désertifier la zone revient à laisser le champ libre au démarrage des travaux.
Enfin, une grosse action est prévue en mars, intitulée « La régionale tracto-vélo contre le projet d’aéroport » avec une grosse manifestation à Nantes le 6 mars.

M.C.
St-Nazaire, 23 janvier 2010

Encadré

Le PCF s'éclate au Palais de région !

Traditionnellement favorable aux développements des infrastructures industrielles et de transport au nom du développement de l’emploi, du productivisme, de la croissance, et parfois même de la grandeur de l’industrie nationale, le PCF de Loire Atlantique était jusqu’alors un allié de premier ordre pour la région socialiste et la mairie de Nantes dans leur projet pharaonique. D’autant que, dans une région tournée vers l’aéronautique (Airbus Nantes et Saint-Nazaire), construire des aéroports a quelque chose de cohérent dans une logique capitaliste de débouché des investissements à court terme.
Cependant faisant liste commune dans le Front de gauche avec les alternatif et le NPA pour les régionales le PCF 44 est devenu beaucoup plus discret sur l’aéroport. Les quelques élus qui craignaient pour leur siège et refusaient de quitter l’alliance avec le PS pour les régionales viennent de se faire retirer l’autorisation d’utiliser l’étiquette du parti pour la prochaine élection. Enfonçant le clou, le PC de Vendée vient de pondre le 21 janvier un communiqué où il se déclare :

« Dès les années 1970, le PCF avait porté un avis plutôt critique sur ce projet. Ensuite sa position n’a jamais été clairement affirmée. Seuls les communistes de Loire-Atlantique ont pris position « Pour », sans que le Comité Régional ait pu en débattre.(…)
La première réunion de la liste « Tous ensemble, la gauche vraiment », à Bouguenais, le samedi 19 décembre, nous a permis de nous positionner rapidement par rapport à ce sujet. Le Parti Communiste Français a d’ailleurs ce jour-là créé la surprise en précisant que nous ne soutenions pas ce projet, faisant référence entre autres, au fait que trois de nos élus avaient voté contre le projet, au moment d’un vote important à ce sujet. D’autant, qu’un camarade PCF de Loire-Atlantique a développé l’idée que l’on pouvait, si besoin en était, faire une piste transversale, pour parer à toute question de sécurité ou de développement du trafic, ce qui n’est pas le cas actuellement bien au contraire. Notre position s’appuie essentiellement sur notre idée de rendre l’argent utile et d’envisager la croissance à condition qu’elle soit centrée sur la réponse aux besoins et aux droits des Humains. La question du développement industriel, de la création d’emplois et de la recherche est cruciale pour nous, mais nous ne pouvons pas l’envisager sans la réflexion indispensable sur l’avenir de la planète (quoi produire, comment, pour répondre à quels besoins ?). Oui la position du Parti Communiste Français évolue sur ces questions. »

Pas à dire le vent tourne autour de l’aéroport, et les vestes aussi ! Au vent qui sème la tempête…

OCL St-Nazaire

(1) cf http://www.codelib.info/2009/04/mob...
Plusieurs structures animent la lutte dont l’ACIPA (Association Citoyenne Intercommunale des Populations concernées par le projet d’Aéroport de Notre Dame des Landes) http://acipa.free.fr/
Le site Indymédia nantes propose un suivi régulier de la lutte
https://nantes.indymedia.org/articl...

P.-S.

MANIFESTATION REGIONALE EN MARS

La régionale tracto-vélo en mars

La coordination des associations et mouvements politiques opposés au projet de nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes organise du 1er au 6 mars 2010 un tour de la Région des Pays de la Loire en tracteurs et vélos pour :

  • Informer la population de la région (tractages, réunions…) sur l’aberration de ce projet du siècle passé qui ne correspond pas aux réalités et enjeux de notre monde d’aujourd’hui
  • Protéger la terre et lutter contre le réchauffement climatique en associant les opposants à d’autres projets dévastateurs de terres agricoles, énergivores ou gaspilleurs d’argent public dans la région
  • Interpeller les responsables politiques et les électeurs en vue des élections régionales à venir. Appeler les électeurs à ne pas donner leurs voix à ceux qui soutiennent le projet d’aéroport.
  • Amplifier notre lutte au niveau régional et national. L’aspect original et sympathique de cette marche dans la région doit permettre d’y associer de nombreux partenaires localement mais aussi dans les communes et villes traversées. Elle aura un retentissement au niveau national dans le prolongement de la Semaine de Résistance de l’été 2009.
    Le Tour partira de Notre-Dame-des-Landes le 1er mars 2010 e se terminera le 6 mars 2010 à Nantes (où un rassemblement accueillera les participants) en passant par Blain – Redon – Guer – Rennes – Vitré – Laval – Château-Gontier (ou Sablé) – Angers – Cholet – La Roche sur Yon et St Philbert de Grandlieu.
    A la fin de chaque étape journalière de 75 km environ, une animation rassemblera élus, associations, paysans et citoyens qui accueilleront cette « Régionale Tracto-Vélo contre le projet d’aéroport ».

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