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Edito 195 Décembre 2009

samedi 5 décembre 2009, par Courant Alternatif


La menace est supposée d’une telle gravité que même l’Organisation
Mondiale de la Santé a émis un bulletin d’alerte mondiale à la
pandémie. « Mieux vaut trop de précaution que pas assez » ne manque
pas de nous rassurer R. Bachelot : ministre rose bonbon de la santé à
propos de la grippe A et de son virus H1N1.

Le risque est sérieux et le danger grave. L’ennemi est là, sournois,
il avance masqué derrière la grippe dite saisonnière. Pour nous
sortir de nos questionnements et incertitudes, de nos refus et nos
résistances, la ministre de la santé publique décompte les morts au
journal télévisé de 20 heures. Le gouvernement a dû emprunter aux
armées ses modes opératoires et de communication : « Vaccinez-vous »
remplace « engagez-vous ». La gestion de masse des populations par « 
bassin » est sous la responsabilité des préfets. Les groupes sont
ciblés, répertoriés avec des priorités, d’abords les volontaires. Le
bon de vaccination remplace l’ordre d’enrôlement. Au-delà de l’acte
médical, on voit là aussi le rôle bienfaiteur et protecteur de
l’état, qui a su anticiper et planifier pour nous les dégâts de cette
guerre bactériologique venue d’ailleurs. Comme dans toute guerre, des
priorités économiques ont été retenues et des mesures d’exceptions
envisagées, pour maintenir la continuité de l’économie nationale.
Pour ce faire le gouvernement agira par décrets ou amendements,
contre les lois du travail en vigueur. Cet Etat protecteur permettra
même, non de fusiller, mais de licencier « pour l’exemple » tout
contrevenant ou réfractaire à sa politique de santé.

Hier, la bourgeoisie liée aux marchands de canon, poussait à la
guerre, aujourd’hui elle est avec les trusts pharmaceutiques et leurs
généraux en blouses blanches infiltrés dans les centres de décisions
humanitaires, ministériels et technocratiques.

En octobre, partis de gauche, d’extrême gauche et syndicats ont
organisé un référendum citoyen, pour sauver et défendre notre service
public de la Poste, mis à mal par les libéraux au pouvoir. Et tous de
dénoncer la désertification territoriale, mais aussi les horribles et
insoutenables méthodes de management : augmentation des cadences,
harcèlement, licenciements, mobilité, flexibilité conduisant au
suicide. Bref une dénonciation des nouvelles normes d’intensification
du travail appliquées partout dans le monde d’Australie en Pologne,
du Portugal… en France tant dans le secteur privé que public.
Hypocrites gesticulations car nombre de ceux qui ont préparé cette
votation, hier au gouvernement avec la gauche plurielle ont ouvert la
voie vers la privatisation de France Télécom ou d’Air France, préparé
la casse de tous ces services publics que ce soit la Poste, EDF/GDF
ou encore la Santé. Ils ont acquiescé à l’ouverture du marché de la
poste et autres entreprises publiques ou semi publiques. Ils ont
accentué l’intensification du travail pour le profit du capital en
instaurant les 35 heures sans embauches conséquentes avec la
complicité des bureaucraties syndicales appointées par les caisses
noires de l’Etat et du patronat.

Si les élections pouvaient changer les choses, elles seraient
interdites disait le camarade vitamine ; il en est de même de la
votation citoyenne. Le récent exemple « légal » celui-là fut celui du
référendum sur le traité constitutionnel européen que ces chiens de
garde politico-syndicaux du capital défendaient. La victoire du NON
fut cinglante et qu’en est-il advenu !

Il n’est pas étonnant de voir les politiciens d’hier, les yeux sur
les prochaines élections dévoyer et isoler les travailleurs pour les
enrôler dans des illusions électoralistes d’acteurs citoyens.

Comment s’en remettre à l’état protecteur sans voir qu’il est un
instrument d’exploitation et de soumission des salariés. Qui pousse
les salariés à se suicider à France Télécom, à Renault… après leur
avoir imposé des conditions de travail de plus en plus dégradées ?
Qui met en place la flexibilité et une précarité de plus en plus
exacerbée si ce n’est l’Etat : l’employeur de ces fonctions
publiques ! Comment s’en remettre à un Etat tortionnaire, totalitaire
et liberticide, qui chaque jour s’illustre à défendre les intérêts de
privilégiés du capital. L’Etat est une machine à broyer non seulement
les salariés sur leurs lieux d’exploitation mais aussi un système de
destruction social. Dans les usines ou ailleurs, la peur doit
prédominer. Peur du chômage, peur du jeune, peur de l’étranger, peur
du virus… dans ou hors de l’usine le stress et la peur se doivent de
nous isoler. Un Etat qui génère un totalitarisme soft pour rassurer
l’électeur, mais brutal contre tout se dresse devant lui pour
réclamer justice et égalité sociale. Etat qui n’hésite pas dans sa
traque à passer du champ professionnel au champ individuel, voire à
fracturer l’intime.
La souffrance au travail, payée par l’esclave salarié, ou non, n’est
pas une nouveauté, elle a toujours accompagné l’accumulation du
capital. Si les gestionnaires publics et patron privés sont
responsables du lourd tribut payé par les prolétaires, les
bureaucraties syndicales par leurs stratégies de désespérance, sont
toutes aussi coupables. Après tout, les privatisations d’aujourd’hui
ne sont elles pas comme les nationalisations d’après guerre le même
instrument de régulation étatique du capital ? N’est-ce pas la même
logique inversée dans les nouvelles conditions du capital mondialisé
qui amène ses gestionnaires à agir de la sorte ? En 1945, la
bourgeoisie financière avait choisit la guerre, la capitulation et la
collaboration pour défendre ses intérêts. Discréditée au sortir de la
guerre, De Gaulle et la bourgeoisie accédant au pouvoir d’état
utilisèrent habilement l’Union Nationale pour reconstruire
l’économie. L’Etat prend alors toute sa place dans les secteurs
clefs : chemins de fer, charbonnages, électricité…et nationalise. Que
nous dit Sarkozy notre président chantre du libéralisme : travaillez
plus pour gagner plus, quand il y a une grève on ne la voit pas etc
etc. « Retroussez vos manches …La grève est l’arme des trusts »
haranguait Thorez en 1945, alors secrétaire du Parti Communiste
Français et ministre de la fonction publique. Hier on appelait à se
sacrifier pour l’Etat et le capital national aujourd’hui,
mondialisation oblige, la bourgeoisie libérale voit dans l’Etat et
ses services : obstacles et freins au développement et à la
valorisation de son capital.

L’état n’est pas un simple et neutre médiateur, il est un outil
d’asservissement contre les salariés, avec ou sans emploi avec ou
sans papiers.
Nous sommes solidaires des travailleurs qui crient leur colère,
contre les privatisations et pour la défense du service public, mais
nous nous devons d’aller au delà : l’Etat, quels qu’en soient ses
gestionnaires, y compris révolutionnaires, ne sera jamais dans le
camps des exploités.
Oui nous devons défendre la Poste, l’hôpital etc, mais le rapport de
force doit se construire dans tous les services publics et en même
temps.
Ce n’est pas contre les privatisations que nous devons nous battre
mais contre les dégradations de travail et de vie que nous subissons
et dans l’unité Public /Privé.
Nous n’avons pas d’autres choix, nous devons construire tous ensemble
un rapport de force par les luttes sociales, pour rendre coup pour
coup et arrêter cette machine capitaliste infernale.

Caen le 28 11 2009

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