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Equateur : mobilisations amérindiennes contre développement capitaliste

samedi 3 octobre 2009, par Administrateur OCL Web


La CONAIE (Confédération des Nationalités Indiennes de l’Equateur), principale force organisée des populations amérindiennes du pays, a appelé à la révolte pour une durée indéterminée contre un projet de loi gouvernemental visant à modifier les conditions de gestion de l’eau et ouvrant la voie à sa privatisation (que la Constitution est sensé empêcher) et surtout permettant qu’elle soit fournie librement aux entreprises extractives (minières et pétrolières) activités que le gouvernement Correa a décrété de haute priorité contre l’avis des populations amérindiennes et de mouvements critiques du “développementisme”.
Cette mobilisation intervient dans un contexte extrêmement tendu, marqué par un conflit général sur la question de la défense des ressources naturelles. Depuis plus d’un an, les organisations des peuples autochtones du pays et un ensemble de forces sociales et écologistes citadines s’opposent aux projets gouvernementaux sur l’exploitation minière et pétrolière de leurs territoires : une mobilisation contre les mégas projets miniers est d’ailleurs prévue de longue date à Quito le 30 septembre à l’appel de la Coordination nationale pour la défense de la vie et de la souveraineté, point culminant d’une année de mobilisations, de répressions.
Tension avivée les derniers jours par la grève des enseignants (depuis le 15 septembre). Tension accrue enfin par les déclarations hostiles et provocatrices du président de gauche Rafael Correa vis-à-vis des organisations indiennes et de cette mobilisation annoncée.

L’État contre le “paro nacional indefinido”

Dès le premier jour du “paro”, plusieurs milliers de manifestants se sont regroupés dans divers endroits du territoire. A partir de minuit, divers tronçons de la route Panaméricaine Nord (en direction de la frontière avec la Colombie) ont été bloqués par des barricades formées de pierres, des troncs d’arbres et des pneus incendiés.
Les autorités, ministre de la défense et président de la République en tête, ont menacés de ne pas permettre les coupures de routes et ont, depuis des semaines, militarisé les principales voies de communication ainsi que les installations minières et pétrolières.
Le vendredi 25 septembre, Correa, qui se revendique d’une révolution citoyenne et bolivarienne, a averti qu’il ne tolèrerait pas les blocages de route et a accusé les dirigeants amérindiens d’« arrogance » : « qu’est-ce qu’ils se croient ces dirigeants ? Ils ont été longtemps les victimes de la grande propriété et de l’exploitation et maintenant les citoyens devraient être victimes de l’arrogance de quelques leaders, la fermeture des routes. C’est illégal. »
Le leader de la Confédération des nationalités indigènes (CONAIE), Humberto Cholango, lui a répondu sur Radio City que « le mouvement autochtone ne va pas accepter les insultes ... nous n’accepterons pas non plus les choix imposés. »
Ce leader de la CONAIE, qui est aussi celui de Ecuarunari (organisation des Kichwas ou Quichuas de la montagne) a ajouté que les Indiens croient au dialogue, mais que, « quand ensuite les peuples autochtones sont humiliés, offensés (et) méprisés, alors nous ne comprenons pas, nous ne voyons pas quelles sont les politiques qu’ils veulent poursuivre », a-t-il dit, sans désigner personne en particulier.
Dans le nord du pays, il y a eu quelques affrontements avec la police dès le lundi 28. Les communautés de Cangahua, Juan Montalvo et Guachalá, au nord de Pichincha, se sont postées sur une des voies principales pour fermer la circulation des véhicules et des camions. Plusieurs leaders amérindiens de la zone (de la communauté San Pablo del Lago et de la communa El Topo) ont été arrêtés par la police.
Au troisième jour de la mobilisation, le 30 septembre à 16 h (locale), dans la province amazonienne de Morona Santiago (sud-est du pays) 500 membres des forces de police ont attaqués des manifestants de la nation Shuar qui bloquaient un pont sur le rio Upano, action réalisée dans le cadre de la mobilisation lancée par les organisations amérindiennes. Selon les sources, l’intervention policière aurait provoqué entre un et trois morts par balles, 9 blessés parmi les manifestants (et 40 policiers blessés selon le gouvernement).
Le lendemain, seule la mort d’un professeur indien, Bosco Wisum, a été confirmée. Il a été aussitôt déclaré premier martyr shuar de la bataille pour l’eau. Professeur bilingue, membre également de l’Union Nationale des Educateurs (syndicat des enseignants), il apparaît comme le symbole de la jonction entre les luttes indigènes et luttes sociales.

Les premières réactions ont été un peu confuses. Du côté du pouvoir, Correa après avoir déclaré lundi, en plein début du soulèvement que la mouvement était un « échec complet » et avoir accusé les Indiens des violences survenues, s’est déclaré prêt au dialogue si les barrages sont levés et s’il est mis fin à la mobilisation. Du côté des organisations amérindiennes, la CONAIE a déclaré “suspendre” les mobilisations et entamer un dialogue avec l’exécutif dès le deuxième jour du “paro” et avant les affrontements du 30 septembre, tandis que l’organisation dont dépend la zone concernée par la répression violente de la police, la Confédération des Nationalités Indigènes de l’Amazonie Equatorienne (CONFENIAE) a appelé à la poursuite du mouvement. Malgré cette fissure dans le mouvement indien, rapidement l’ensemble des organisations, relayées par le mouvement politique Patchakutik (bras politique de la CONAIE), ont réitéré leur exigence de dialogue direct avec l’exécutif « sans conditions », tandis que le gouvernement conditionne toujours le « dialogue » à la fin du mouvement.
Plus tard, le dialogue de sourd sur le dialogue s’est déplacé. Correa propose d’inviter les dirigeants indiens au palais présidentiel, y compris en leur envoyant un avion les chercher, tandis que l’organisation amazonienne demande à ce que le dialogue ait lieu sur son territoire, à Unión Base, siège de le Confeniae, province amazonienne de Pastaza [1], que la président se déplace « comme il est venu à l’époque de la compagne électorale et qu’il promettait alors de nous appuyer, de nous aider et de nous protéger ». Demande aussitôt rejetée par Correa qui, selon l’agence Efe, rappelle qu’il est le chef de l’Etat, qu’il mérite le respect et que la proposition de l’organisation des indiens amazoniens est « infantile ». Pour le chef de l’Etat, la Conaie essaie de mettre en scène qu’elle est la victime alors que ce sont les policiers qui ont été attaqués à coup de billes de plomb.
Jeudi 1er octobre, les trois principales organisations amérindiennes (ECUARUNARI, CONFENIAE et CONAICE) qui constituent la CONAIE ont décidé d’organiser une assemblée commune, en territoire amazonien, pour s’accorder sur un agenda de dialogue avec le gouvernement.
De son côté, le parti présidentiel a prévu d’organiser une manifestation à Quito le 3 octobre en soutien au président Correa. Le 1er octobre, une seconde victime de la répression policière a été identifiée, Francisco Saant. Quant à la troisième victime, on sait uniquement qu’il appartenait à la communauté Shiramentza.

Le scénario reste complètement ouvert, d’autant que les revendications de la Confenaie vont bien au-delà du thème de la loi sur l’eau et que dans une déclaration en 8 points [2], elle demande un régime spécial d’autonomie pour la zone amazonienne, l’arrêt des exploitations minières et pétrolières, l’abrogation de décrets concernant l’éducation bilingue et en particulier le décret 1780 qui délègue aux églises catholiques des pouvoir en matière d’éducation et de communication dans les zones amazoniennes.
La bataille sur l’eau est directement reliée à celle sur le modèle économique et aux activités d’extraction minières et pétrolières que l’Etat équatorien entend développer à tout prix. L’enjeu est donc de taille.

Indiens vs Gouvernement : un conflit déjà ancien

Le fossé entre la CONAIE et le gouvernement de Correa n’a cessé de s’approfondir depuis plus d’un an. « Cette gauche infantile, cet indigénisme infantile, cet écologisme infantile sont en train de se réactiver, organisant des réunions pour promouvoir un soulèvement contre l’exploitation minière. » « Avec la loi dans la main nous ne laisserons pas faire de tels abus, nous ne permettrons pas des soulèvements, qui bloquent les routes, qui menacent la propriété privée, qui entravent le développement d’une activité légale : l’exploitation minière » [3]. Ainsi parle le président Correa, et ennemi du néolibéralisme et partisan “bolivarien” d’un socialisme du XXIème siècle, qui a également insinué que les mouvements sociaux qui rejetaient la loi sur l’exploitation minière étaient des « alliés de la droite » tandis que le ministre du gouvernement, Fernando Bustamante, parlait d’un possible lien putchiste entre les militaires et les indiens…
Dès le début du mois de janvier 2009, le climat s’était brusquement réchauffé quand la police avait réprimé violemment des villageois dans le sud du pays qui protestaient contre la loi. « Nous ne négocierons pas avec des criminels et canailles », fut la réponse du ministre Bustamante aux dirigeants autochtones qui se sont défendu de la répression en retenant un capitaine de police.
Le 20 janvier, journée de mobilisation pour la vie, des milliers d’indiens sont sortis sur les routes comme ils ont l’habitude de le faire. Quatre mille d’entre eux ont coupé la route Latacunga-Ambato, tandis que des dizaines de milliers d’autres se mobilisaient dans tout le pays, depuis la zone sud de la cordillère jusqu’aux régions amazoniennes en passant par les différentes piémonts andins. Même Quito et Cuenca et la zone côtière ont été le théâtre de manifestations massives.
Depuis, le dialogue de sourd s’est imposé et les organisations indiennes rendent coup pour coup aux accusations dont elles sont victimes. Les dirigeants des organisations amérindiennes ont retourné toutes les accusations contre ceux qui les proféraient. Ainsi Humberto Cholango, de Ecuarunari disant que la droite est certes très présente mais que « le président n’a qu’à regarder autour de lui s’il veut voir la droite ».

Quelques jours plus tard, le 27 janvier 2009, la CONAIE envoie une « Lettre ouverte au Forum Social Mondial » qui a lieu à Belém (Brésil) dans laquelle elle explique son « opposition et rejet » de la présence de Correa dans cette rencontre, un « espace où historiquement se construisent des alternatives et des garanties aux droits des peuples et pour la vie et ne peut être une tribune pour un président aux positions imprégnées de racisme, de machisme, de paternalisme, de discrimination, de sexisme et de violence ». Dans cette lettre ouverte, la CONAIE alerte le Forum que « le discours du régime équatorien utilise l’argument de la révolution citoyenne, du socialisme du XXIème siècle comme argument idéologique au nom duquel il réprime et porte atteinte à la dignité et aux droits de nos peuples ». Contrairement à ce que dit le gouvernement, « la longue nuit néolibérale est présente en Equateur ».

Les différentes lois décidées par le gouvernement (loi sur les ressources hydriques, loi de la souveraineté alimentaire, de la communication, de l’éducation, de la bio-diversité…) forment un “paquet” législatif qui remet en question les droits acquis des peuples amérindiens sur leurs territoires. Dans une interview récente, Marlon Santi, président de la CONAIE précise qu’avec ces nouvelles lois, est remis en question « l’Etat plurinational et interculturel et qu’à l’intérieur de celui-ci, les droits des peuples autochtones sont en passe d’être marginalisés » par ces nouvelles lois qui « relient le monopole économique au pouvoir ». D’un côté, « la nouvelle constitution établit et garantit que toute prise de décision (approbation de lois, programmes, politiques publiques) qui affectent les peuples originaires doivent avoir été soumise et approuvée préalablement par les peuples concerné » de l’autre, une loi comme celle de l’exploitation minière « relève du gouvernement national et sera appliquée dans les territoires indiens » alors même qu’elles ont été décidées « sans consulter les peuples et nations indiennes. » [4]

Cet affrontement entre le pouvoir et les mouvements indiens s’est doublé d’une stratégie gouvernementale visant à briser, fragmenter et coopter une partie de ces mouvements en créant de toute pièce de nouvelles organisations amérindiennes mais aussi paysannes ou syndicales sans aucune autre orientation que l’officialisme, c’est-à-dire l’obéissance au gouvernement, où certains leaders sont utilisés comme bouclier afin de justifier la répression au nom du maintien de la démocratie et la libre circulation sur les routes. Stratégie qui s’appuie sur son parti politique, Alianza País, qui organise des contre-manifestations en défense de son « lider » et demande la fin des mobilisations, l’usage de la “mano dura” contre les ennemis de la révolution, etc.
Stratégie classique du « diviser pour régner » mais qui n’hésite pas à se faire au nom du thème “cannibale” de la gauche de l’unité des dirigeants et des dirigés (sur le slogan « ce qui nous unit important est plus que ce qui nous sépare »). Stratégie qui permet de faire croire à la réalité du “dialogue” quand celui-ci se réduit à la mise en scène médiatique de rencontres entre les représentants de l’exécutif ou Correa lui-même et les organisations qui “acceptent” le dialogue.

Les enjeux : autonomie, territorialité, développement

Les mobilisations en cours en Equateur contiennent 3 enjeux fondamentaux entremêlés mais qu’il convient de repérer séparément.

  • La défense de l’autonomie des mouvements, sociaux, nationalitaires/indiens, écologistes, politiques par rapport à un Etat qui vise avant tout leur neutralisation par la cooptation de leurs leaders et l’institutionnalisation de leurs structures par la mise en scène de leur reconnaissance comme interlocuteurs soumis mais représentatifs. Cet objectif a été jusque là un échec. Le gouvernement qui se faisait fort d’organiser un “débat national” sur la Loi sur l’eau n’a récolté que mobilisations, violences dans les rues et répression avec comme conséquence une crise majeure dans les relations entre un gouvernement et des mouvements sociaux sensés être sa base sociale.
  • La lutte politique pour le pouvoir et le contrôle des territoires et donc des “richesses” potentielles qu’ils contiennent. Les Etats de l’Amérique latine, en particulier dans sa partie andine, se voient tous, à des degrés divers, confrontés à la montée en puissance d’une revendication de la territorialité et du contrôle politique sur des pans entiers des superficies de ces pays de la part des populations originaires. Il s’agit d’un conflit de légitimité grandissant entre les Etats centraux et les communautés, peuples et nations originaires, à l’intérieur de ces Etats quitte à les déborder (des peuples ou nations indiennes peuvent se trouver à cheval sur deux voire trois pays). Sans développer ce point ici, notons que la revendication plus ou moins affirmée de l’autonomie place ces populations dans une position de force : à la fois comme “citoyens” de l’Etat et comme membres de la communauté originaire, ils “doublent” en quelque sorte leur légitimité sur les territoires qu’ils habitent et/ou dont ils sont originaires. Face à cette menace, les gouvernements de l’oligarchie, qu’ils soient de gauche ou de droite, les accusent d’être des sauvages, des incapables, des rétrogrades, mettant ainsi en évidence que, deux siècle après les indépendances, le colonialisme, ici dans une version “interne”, et le racisme qui lui est consubstantiel, sont toujours en vigueur et structurent fortement le champ politique national qui le clive entre les tenants de la civilisation ou du progrès contre ceux de la sauvagerie, du primitivisme,…
  • La lutte contre un modèle productiviste, soumis au paradigme du développement. Les Etats de la région, qu’ils s’affichent ouvertement néolibéraux (Pérou) ou se déclarent antilibéraux (Equateur), mènent les mêmes politiques : ils paient la dette externe (FMI, Banque interaméricaine de développement…) sans rechigner, n’exproprient surtout pas les entreprises capitalistes nationales ou étrangères mais au contraire les appellent à investir plus, à exploiter les ressources du sol et du sous-sol par le jeu de concessions, en leur garantissant des marges de profits important (financement des infrastructures, paix sociale…). Les surfaces destinées à l’exploitation minières sont de 5.6 millions d’hectares, soit 20% de la superficie totale du pays, incluant des parcs nationaux et des réserves naturelles dont certaines ont été “concessionnées” depuis les années 80. L’Équateur n’a jamais été un pays minier mais le développement de cette activité le conduira aux mêmes problèmes que ses voisins : dans tous les pays andins, l’exploitation minière a provoqué la pollution des sources et la déforestation qui menacent la survie de milliers de communautés, donnée qui est à l’origine d’une nouvelle génération de mouvements sociaux, marqués par la question écologique et la mise en cause du développement, du modèle productiviste et “extractiviste”, d’autant plus que la vision de la terre chez les peuples indiens n’est pas celle d’une ressource économique à exploiter et épuiser mais appartient à un imaginaire politico-culturel, la conception et la représentation d’un monde, celui dont ils sont issus (la Pachamama), dont ils font partie, qu’ils habitent et qui doit leur survivre.

Ces données se retrouvent à des degrés divers dans la plupart des pays andins. Comme lors du soulèvement au Pérou au mois de juin dernier, il apparaît que ce sont aujourd’hui les composantes les plus amazoniennes (piémont et plaine forestière) de ces peuples et nations amérindiens qui sont les plus mobilisés. Cela traduit un rééquilibrage dans le protagonisme entre les différentes communautés et un élargissement du réveil indien dans sa globalité. Les conséquence immédiates et à court et moyen terme en sont et seront sans aucun doute sa plus grande capacité à reconfigurer en profondeur le champ politique, à modifier les contenus des luttes sociales, notamment la question des ressources et de ses usages, à peser de plus en plus lourdement sur le cours des évènements, à ouvrir de nouvelles perspectives pour l’ensemble du sous-continent et espérons-le, un peu au-delà.

Le 1er octobre

J.F.



[1] Voir le communiqué de presse de la Confeniae ci-après (“La résistance se poursuit et nous ne reculerons pas d’un pas”)
[2] Voir le document daté du 29 septembre ci-après (“L’Amazonie ratifie le soulèvement indien avec plus de force !”)
[3] Propos rapportés par Raúl Zibechi, dans “Ecuador : La lógica del desarrollo choca con los movimientos”.
[4] Interview publié sur le site : http://www.kaosenlared.net/noticia/...


Documents :

29 Septembre 2009
L’Amazonie ratifie le soulèvement indien avec plus de force !

Confédération des nationalités indigènes de l’Amazonie équatorienne (Confeniae)
Puyo-Pastaza, 29 Septembre 2009

Mandat de le Régionale Amazonienne sur le soulèvement indien.
ATTENDU :

Que la plus grande source de richesse nationale de l’Equateur provient de la région de l’Amazone et que les Nations Ancestrales Amazoniennes existent depuis des temps immémoriaux.

Que la Confédération des nationalités indigènes de l’Amazonie équatorienne, CONFENIAE, les nationalités et ses organisations affiliées, en défense et en pleine conformité avec les mandats de plusieurs assemblées et congrès de l’Amazonie équatorienne :

DECLARENT

Poursuivre fermement le soulèvement indien en Equateur avec des positions fortes dans la région de l’Amazone jusqu’à ce que les demandes et droits des nationalités soient incorporés, garantis en totalité dans les politiques de l’Etat équatorien. La Régionale amazonienne acceptera le dialogue uniquement la CONFENIAE, avec son siège dans la communauté de Unión Base, Puyo - Pastaza

1. NON à la régionalisation de l’Amazonie, nous luttons pour une région de l’Amazone Libre et Autonome avec un régime spécial.

2. Nous prions instamment le Gouvernement national de l’Équateur, que dans les Territoires Ancestraux des Nationalités et Peuples Autochtones soit respecté la Loi des Gouvernements Territoriaux Autonomes des Nationalités Amazoniennes avec les compétences administratives dans toutes leurs dimensions.

3. Le maintien en vigueur et la NON abrogation de la loi 010. Nous demandons que les ressources de 12% par baril de pétrole extrait doit pour les Nationalités de l’Amazonie équatorienne.

4. Récupération totale par des institutions autochtones : Direction nationale de la santé interculturelle bilingue, la Direction nationale de l’éducation interculturelle bilingue, le Fonds de développement pour les peuples autochtones, du Conseil de Développement des Nationalités et des Peuples, avec pleine autorité et fonctionnement en conformité avec les politiques des organisations autochtones de l’Équateur, CONAIE, et de soutenir le soulèvement national.

5. Nous exigeons l’abrogation immédiate du décret 1585 qui élimine la DINEIB et du décret 1780 qui offre tout le pouvoir aux églises catholiques sur les territoires autochtones de l’Amazonie.

6. Arrêt total de l’exploitation pétrolière et minière dans les territoires de l’Amazone, en particulier dans les territoires autochtones qui se situent dans des projets d’exploitation.

7. Pour la dignité et l’honneur des nationalités, pour le peuple originaire Kichwa de Sarayaku, pour les nationalités amazoniennes, nous demandons la démission du frère Carlos Viteri, de ECORAE.

8. Nous demandons aux nationalités et peuples de la Côte, de la Sierra Andine qu’ils se maintiennent sur le pied de guerre pour la construction d’un véritable État plurinational dans ses bases et son autorité.

Nationalités amazoniennes, pas un seul pas en arrière !
Nous exigeons le respect comme Nationalités et comme Peuples
L’Amazonie ni ne s’achète, ni ne se vend, carajo ! *

* carajo, peut être traduit par “bordel !” dans sa forme exclamative

= = = = = =

1er Octobre 2009

La résistance se poursuit et nous ne reculerons pas d’un pas

Confédération des nationalités indigènes de l’Amazonie équatorienne (CONFENIAE)

Communiqué de presse
Unión Base, Puyo, 1er Octobre 2009

Les nationalités amazoniennes FICSH, OPIP, NAE, NAWE, ONISE, OISE, FEINCE, NAZAE, NASHIE, NAPE, NASHE, FCUNAE, ONWAN, FENASH-P, FONAKISE, FEPCESH-S, CONAKINO, FECANSH-O y FEPNASH-Z.CH. regroupées dans la CONFENIAE, face au crime commis par le gouvernement du dictateur Rafael Correa Delgado, poursuivent le soulèvement indien et ne se rendront jamais devant des dirigeants de droite déguisés en socialistes.

La mort de nos frères Shuar n’apporte que plus de défis et nous ne craignons pas ce défi de lutter pour nos droits déjà reconnus par la Constitution de l’Équateur et dans des conventions et déclarations internationales. Rien ni personne ne nous fera taire. Nous sommes des nations constituées culturellement depuis bien avant la vie républicaine, par conséquent nous n’accepterons pas ni les conditions des politiques extractivistes ni la régionalisation amazonienne.

Pour en finir avec ce soulèvement, le gouvernement national devra venir personnellement à notre siège social de Unión Base, province de Pastaza, de la même manière qu’il venait à l’époque de la campagne électorale et promettait de nous appuyer, de nous aider et de nous protéger. Ces paroles doivent s’accomplir et non réprimer les nations comme des criminels. De même, nous n’acceptons de dialoguer avec aucun émissaire (ministre) incompétents ou compétents.

Nous avons tant de fois demandé et recherché des rendez-vous pour le dialogue, que cette fois nous n’irons pas à Carondelet [palais présidentiel]. Nous sommes en rassemblement permanent CONFENIAE, Unión Base – Pastaza - Ecuador. C’est ici que nos demandes devront être entendues, dans le cas contraire, il n’y aura pas de dialogue, la résistance se poursuivra et nous ne reculerons pas d’un pas. Tout pour nos droits amazoniens et pour l’Équateur. Maintenant tout dépend de M. Rafael Correa.

Conseil d’administration CONFENIAE

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1 Message

  • Les shuar n’ont jamais été colonisés jusqu’aux années 60 du siècle dernier. Ils ont passé cinq cents ans parcourant la forêt et la montagne, leur lieu d’origine depuis environ 2500 années. Attachés à leur culture, savants en herbes, chasseurs, nomades d’essence et d’esprit. Les contacts avec eux l’ont été dans les environs de leurs vastes territoires, mais jusqu’au siècle passé personne n’a interféré avec leurs vies. Quand les compagnies minières sont arrivées dans l’Amazonie, cet univers a été mis en pièces. Elles leurs ont enlevé leurs terres, les plus biodiverses de la planète. Ils ont été confinés dans des réserves. Les prêtres salésiens ont arraché une génération entière d’enfants shuar de leurs communautés.

    (...)
    Il y a un mois, les shuar se sont soulevés si fort contre le gouvernement de Rafael Correa qu’il y a eu un maître shuar de tué. Les shuar et Correa sont entrés dans une polémique publique sur la responsabilité de cette mort. Il y a eu un réflexe rapide des deux parties pour éviter la rupture. La Conaie, qui regroupe les communautés de l’état plurinational qu’est l’Équateur, a besoin de ce gouvernement d’un État unitaire qui conformément à la Constitution régit tous les équatoriens. Et Correa ne serait pas arrivé au pouvoir sans cette force qui représente la plus grande organisation sociale du pays. Les shuar sont les plus indociles. Les plus radicaux.

    Un des livres les plus merveilleux qui j’ai eu entre mes mains s’appelle Tarimiat Nunkanam Inkiunaiyamu. 500 pages illustrées, des photos, des histoires de vie, des témoignages, des analyses, des opinions et des documents sur trois peuples de la Cordillère du Condor, entre le Pérou et l’Équateur. Les wampís, les awayun et les shuar sont les peuples qui vivent dans cette zone. Les trois peuples appartiennent à la famille linguistique du jibaro.

    Ce livre conte une histoire incroyable.

    Parce que cette semaine, juste le Jour dit de la Race (12 octobre, anniversaire du début de la colonisation, appelé Dernier Jour de la Liberté par les peuples originaires, NdT), l’histoire des shuar est une histoire dans le chemin de la conscience de ce continent, tant inconnue même pour ceux qui y sommes nés. Si inconnu, si ignoré, si absent de nos perceptions de la réalité.

    Les shuar n’ont jamais été colonisés jusqu’aux années 60 du siècle dernier. Ils ont passé cinq cents ans parcourant la forêt et la montagne, leur lieu d’origine depuis environ 2500 années. Attachés à leur culture, savants en herbes, chasseurs, nomades d’essence et d’esprit. Les contacts avec eux l’ont été dans les environs de leurs vastes territoires, mais jusqu’au siècle passé personne n’a interféré avec leurs vies.
    Quand les compagnies minières sont arrivées dans l’Amazonie, cet univers a été mis en pièces. Elles leurs ont enlevé leurs terres, les plus biodiversifiées de la planète. Ils ont été confinés dans des réserves. Les prêtres salésiens ont arraché une génération entière d’enfants shuar de leurs communautés. Ils ont arrêté d’apprendre leur langue et ont appris l’espagnol. Ils ont perdu leurs habitus nomades. Les prêtres les ont nommés autrement. Cette génération de shuar, déjà adulte, est celle qui est aujourd’hui à la tête de la partie la plus radicale et dure des organisations aborigènes équatoriennes. Domingo Ankuah, dirigeant shuar au plan national, raconte dans sa biographie :

    "J’ai été recruté par les salésiens peut-être quand j’avais 4 ou 5 ans, selon eux. La première chose que je sais est qu’ils m’ont donné un nom, enfin deux noms, deux prénoms, parce que mon père quand je suis né m’a donné un prénom puisque que les shuar n’avons qu’un prénom. Mais quand ils m’ont recruté, ils m’ont donné le nom que je maintiens encore. Très jeune, je ne connaissais pas tout ce qui se passait dans la vie, ce que les missionnaires ont fait. J’ai fait l’école primaire et ensuite au collège de pratique agricole de la mission salésienne jusqu’à l’âge de 17 ans ".

    Un autre shuar dit dans l’une des vidéos qui accompagnent le livre qu’ils sont "aussi forts parce que pendant deux mille cinq cents ans nous n’avons pas eu besoin de dollars, et que nous pouvons continuer encore deux mille cinq cents années sans un seul dollar". Leurs femmes âgées se plaignent du fait que les compagnies minières ont tout altéré, et que ne poussent plus quelques unes des plantes nécessaires pour leur médecine. Elles se plaignent aussi de que les jeunes femmes, élevées comme Domingo Ankuah, ne savent pas faire ni s’occuper de leurs jardins. Ils ne savent pas qui ils sont. Il y a des conflits familiaux qu’ils ne connaissaient pas lorsqu’ils étaient nomades. Le sédentarisation forcée les irrite dans sa face la plus profonde. Ils ne vivent pas conformément à leur nature.

    (...)

    Sandra Russo, Pagina/12, 17 octobre 2009.

    http://www.pagina12.com.ar/diario/contratapa/13-133629-2009-10-17.html

    Traduit parhttp://amerikenlutte.free.fr

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