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Pérou : Victoire indienne et populaire !

samedi 20 juin 2009, par OCL St Nazaire

Le 18 juin 2009 restera sans doute gravé comme une des dates importantes de l’histoire moderne des luttes indiennes en Amérique latine et plus particulièrement au Pérou, pays aux multiples communautés autochtones, andines comme amazoniennes.


Voir en ligne : Se impuso la voluntad popular (USL pérou)

Après 71 jours de mobilisations, de grèves, de blocages des voies de communications, et au prix des violents affrontements des 5 et 6 juin dernier, les communautés indiennes de la région amazonienne du Nord Pérou ont fait plier le gouvernement.
Deux des principaux décrets-lois contestés ont finalement été abrogé par le Parlement le 18 juin.

Le prix politique extrêmement élevé que commençait à payer le gouvernement d’Alan Garcia lui a fait faire machine arrière, au cours des derniers jours.
D’abord en « suspendant » les décrets pour une période de 90 jours, puis en promettant d’ouvrir un nouveau débat avec les chefs des communautés. Puis, lundi 15, le premier ministre Yehude Simon, en rencontrant les apus (chefs traditionnels indiens) et en leur annonçant que le gouvernement allait révoquer les décrets. Puis ce même premier ministre annonçant sa prochaine démission dès le conflit terminé ont été les étapes de ce recul.

C'est maintenant chose faite.

L’ampleur des mobilisations internes au Pérou au delà même de la zone de conflit, les risques d’escalades dans la confrontation violente (dont les 24 policiers tués ont démontré l’extraordinaire détermination des indiens), l’onde de choc provoquée dans les communautés amérindiennes des pays limitrophes (en particulier l’Equateur mais pas seulement) et la multiplication des prises de position contraires de la part des organisations internationales (ONU) ont amené à ce qu’il faut bien appeler un recul total du gouvernement.

 Ce recul est une défaite.

Il n’a pas réussi à mobiliser les “péruviens“ contre les “autochtones“ coupables de primitivisme et de sauvagerie.
Il n’a pas réussi à internationaliser la crise malgré les multiples accusations de sédition organisée par des agents de l’“étranger” et plus particulièrement l’axe du mal régional qui va de La Paz à Caracas (et sans doute jusqu’à La Havane).
Il n’a pas réussi à faire croire que derrière cette mobilisation ample et déterminée de toute une population se cachaient des « terroristes » et autres subversifs cherchant à déstabiliser le pays avec l’aide d’ONG européennes…
Il n’a pas réussi à opposer les “vrais” amazoniens et leur apus (chefs communautaires) aux organisations de défense qu’ils se sont donné : peine perdue, le gouvernement a dû céder devant les “vrais“ représentants des communautés !

Aujourd’hui vendredi 19 juin, les principales organisations à l’origine de la mobilisation ont appelé au démantèlement des barrages (axe routiers, voies fluviales, station pétrolières de pompage) et la fin provisoire du mouvement. Provisoire car les différents porte-parole des organisations amazoniennes ont bien précisé que le mouvement reprendrait si le gouvernement ne tenait pas ses promesses.

Les décrets, pris par le gouvernement et finalement abrogé par le parlement, n’étaient que la traduction à l’intérieur du Pérou de divers accords de libre-échange (TLC) avec les Etats-Unis.

Mais rien n’est réglé. Ces accords existent. D’autres accords sont en préparation avec l’Union Européenne. Depuis deux ans en effet, dans la plus grande discrétion, des pourparlers ont été engagés par les 27 pays européens en vue de parvenir à un accord d’association (ADA) avec quatre pays andins (Bolivie, Pérou, Équateur et Colombie).

Si la Bolivie, qui vient de considérer l’eau, la santé et les produits du sous-sol comme non aliénables a semble-t-il été exclue de la phase finale des discussions, il n’en est pas de même pour la Colombie et le Pérou, deux pays dirigés par des gouvernement ouvertement “néolibéraux”.

Mais cette lutte n'est pas terminée.

Seuls 2 décrets-lois ont été abrogés. Il en reste 7 autres, ce qui laisse encore au gouvernement une petite marge de manœuvre.
Ensuite, les mesures répressives et judiciaires se poursuivent. Les indiens arrêtés n’ont pas été libérés et 18 d’entre eux, poursuivis pour meurtre de policier ont été internés dans la prison de haute sécurité de Chachapoyas.

Enfin, la vérité sur les disparus va devenir un autre enjeu.
Pour l’instant, les chiffres officiels donnent toujours 34 victimes : 24 policiers et 10 manifestants.
Selon les témoignages, les disparus seraient entre 40 et 60.
S’il semble évident que certains disparus sont tout simplement en fuite, de peur d’être arrêtés, les nombreux témoignages parlant de policiers embarquant des cadavres dans leur véhicules sont de toute évidence à prendre en compte. De multiples organisations demandent la mise en place d’une commission indépendante d’investigation sur les faits de disparitions et pour que toute la lumière soit faite sur les évènements.

Enfin, les luttes contre la privatisation et le pillage des ressources naturelles ne se limitent pas à la zone amazonienne. Beaucoup plus au sud, dans la province andine de Andahuaylas (région de Apurímac), les habitants bloquent une route importante et demandent une “obole volontaire” aux voyageurs pour qu’ils puissent continuer leur voyage.
Ici, la protestation a démarré il y a une semaine et les demandes sociales sont multiples : contre la privatisation de l’eau, pour plus d’instituteurs et de professeurs dans les écoles, et l’application des promesses présidentielles : baisse des prix des engrais, fourniture de matériel agricole (tracteurs), travaux d’assainissement, …. Et aussi la démission du président pour la répression qu’il a ordonné à Bagua. Ils exigent que le premier ministre vienne sur place les rencontrer pour qu’il démontre bien qu’il veut le dialogue et en demandant qu’il vienne avec de propositions concrètes et pas encore des promesses.

Décidément, l’oligarchie de Lima n’en a pas fini avec les communautés amérindiennes qui années après années ont pris conscience, non seulement de leurs droits (sociaux, historiques, politiques…) mais aussi et surtout de leur capacité à les faire respecter.

Cette bataille perdue par l'oligarchie et gagnée par les populations en lutte n'est pas la fin de la guerre.

Les décrets-lois abrogés, partiellement ou pas, la logique capitaliste d’appropriation, de pillage, de privatisation des biens communs se poursuivra tant que le cadre politique général ne sera pas notablement modifié. D’un autre côté cette victoire populaire, la victoire des communautés indiennes, est évidente. Elle est surtout importante car elle donne de la confiance, de la force pour continuer et sans doute pour amplifier les mouvements de résistance dans cette région du Pérou, dans l’ensemble du pays, et au-delà, dans ce continent où les voix des populations originaires se font entendre avec toujours plus de puissance, devenant déjà dans certaines zones, dans certains pays (Equateur, Bolivie…) un ensemble de forces structurantes du nouveau panorama social-politique.

Et même ici, dans nos vieux pays de la vieille Europe, cette lutte victorieuse ne peut que donner plus de force et d’énergie à tous ceux et celles qui savent que c’est par la lutte, et uniquement par elle, par des rapports de forces construits et opiniâtres qu’il est possible de faire reculer la barbarie capitaliste et productiviste.

Le 19 juin 2009

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6 Messages

  • Pérou : Victoire indienne et populaire !

    20 juin 2009 14:32, par Tourtaux

    Je suis très heureux pour les peuples indiens du Pérou. Cette victoire acquise au prix de nombreuses victimes est celle des pauvres sur les riches du Pérou.
    Elle est aussi un encouragement pour tous les peuples indigènes des Amériques et d’ailleurs non encore libérés du joug colonial.
    Jacques Tourtaux

    Voir en ligne : PEROU : VICTOIRE INDIENNE ET POPULAIRE !

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  • COMMUNIQUE DE PRESSE DE SURVIVAL INTERNATIONAL - 19/06/09

    MASSACRE DE BAGUA : PUBLICATION DU RAPPORT DE TÉMOINS OCULAIRES

    Le compte-rendu du massacre de Bagua par des témoins oculaires a été publié aujourd’hui par Survival International.

    Ce document contient les photos choquantes prises par deux Belges, Marijke Deleu et Thomas Quirynen, qui se sont trouvés au cœur du conflit et ont eux-mêmes essuyé des tirs.

    Le rapport intitulé ‘Mort à la courbe du diable’ : récit de témoins oculaires’ relate les événements du 5 juin à Bagua qui ont fait de nombreux morts, aussi bien dans le camp des forces policières que dans celui des manifestants indiens (le nombre exact des victimes n’est pas encore établi). Ce violent conflit a été décrit comme le ‘Tiananmen amazonien’.

    Ils ont déclaré aujourd’hui : ‘Nous avons vu des gens se faire tuer sous nos yeux et nous avons même essuyé des tirs. Bien que des policiers aient parfois été visés, nous avons constaté que la grande majorité des victimes étaient des Indiens et d’autres manifestants venus les soutenir.’

    Stephen Corry, directeur de Survival a déclaré aujourd’hui : ‘Ce témoignage montre avec des images choquantes ce qui arrive lorsque des Indiens d’Amazonie tentent de défendre leurs territoires. Les forces de police péruviennes ont réagi avec la plus grande violence. Le président lui-même attise le racisme en traitant les Indiens de ‘sauvages’. Cet événement restera dans la mémoire des Indiens durant des décennies. Seules une enquête approfondie et les poursuites judiciaires qui s’imposent parviendront à atténuer l’immense préjudice causé. La question de fond doit également être posée : les intérêts des compagnies pétrolières comptent-ils plus que les droits de l’homme ?’

    Voir en ligne : communiqué de Surival

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    • Sur Alan García le sanguinaire... 25 juin 2009 11:05, par JF

      Alan « Cheval fou » García Pérez : « Tirez, ne pensez pas »

      Par Cristina Castello

      Il fallait, après le massacre des Indiens de Bagua (au Pérou), la semaine passée, montrer, crier même, ce que sont Alan García et son complice d’avant, Alberto Fujimori : des êtres assoiffés de sang.
      J’ai écrit ce texte il y a tout juste un an, le 2 juin 2008. Je crois qu’il annonçait ce qu’est le Président García.
      Ces deux articles « Fujimori, le Dracula du Pérou » et « Alan « Cheval fou » García Pérez » sont des pages d’histoire, des pages écrites avec la mort des innocents ; ce sont deux témoignages puissants sur les tragédies du Pérou.

      • - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

      « Tirez, ne pensez pas »

      J’ai rêvé d’une fuite, d’un ‘à jamais’,
      soupirant à l’échelle d’une proue ;
      j’ai rêvé d’une mère, de fraîches touffes de légumes
      et du trousseau constellé de l’aurore.

      César Vallejo

      Tandis que le monde célèbre la poésie de César Vallejo —poète maximum du Pérou et l’un des plus grands du monde, au 80º anniversaire de sa mort à Paris— l’actuel président emprisonne les poètes et chante « Vive la mort »

      On le surnomme « Cheval fou », « Patadita » (petit coup de pied) et « Alan Baba ». Il chantait pour se faire plaisir dans les métros de Paris, il adore jouer de sa guitare en vareuse, et avec Lula da Silva au Sommet des Peuples du mois de mai passé, il a interprété le Tico Tico Non Fubá. Multiforme dans ses arts, en janvier il a chanté en public le Vive la Mort des phalangistes espagnols, de tout son cœur.

      Sous sa première présidence, et dans la nuit, il revêtait des vêtements noirs, prenait son scooter et sortait à la recherche de la fille d’un puissant entrepreneur arabe : c’était « cet » amour. Avec son mètre 93, ce grassouillet, a inventé le Matrimonius interruptus et il a l’obsession de séduire. Il a été différent depuis presque bébé : à cinq ans, il a connu son papa qu’il a toujours appelé « monsieur » ; et, déjà à la Faculté, mallette bien en main, style James Bond, il portait une massue et un pistolet, avec dévotion.

      C’est Alan García, président du Pérou. Diverti avec ses intimes et, dehors, bagarreur et féroce. Commando civil à l’université, affrontant les bâtons et les balles à toute action, idée ou rêve des gauches. Durant son premier mandat —de 85 à 90— l’inflation a grimpé à 7.500 %, et il a été accusé de corruption, crimes et trahison ; il fut l’enfant terrible pour le FMI, dans l’étape initiale, mais ensuite il a été son plus fidèle élève. Durant ce gouvernement, s’est organisé le Commando Rodrigo Franco qui a balayé des populations andines entières, les meurtres de paysans étaient habituels et de même les disparus. Homme de droite, en ‘88, il est cependant ébloui par le groupe de guérilleros « Sendero Luminoso » (« Sentier Lumineux ») : « Je ressens de l’admiration pour la mystique et l’ardeur de ces militants », dit-il alors.

      Contradictoire, ce Monsieur « Cheval fou », appellation gagnée quand, étant député, il a agressé intempestivement, à coups de pied, le ministre de l’Économie de l’époque. Il admirait le « Sentier », oui. Mais en ‘85, il avait ordonné le Massacre d’Accomarca, où l’armée péruvienne a assassiné 45 personnes. Et deux ans auparavant, on a extrajudiciairement exécuté plus de 200 prisonniers du Fronton, de Lurigancho et Santa Bárbara. Parmi eux, il y avait des personnes arrêtées, qui appartenaient à « Sentier » ; mutinées, réclamant des conditions minimales de vie, contre la lenteur des processus judiciaires et contre les tortures. Dans le Massacre des Prisons, toutes les évidences remarquent que lui —« Le grand stratège du démon », comme il est aussi appelé— fut celui qui a donné l’ordre de tuer. Il y a quelques mois les investigations ont été rouvertes.

      Cette tuerie fut ordonnée lorsque les rebelles s’étaient rendus et en dépit du fait que la majorité était inculpée, non accusée. Dans les jugements post mortem, plusieurs ont été déclarés innocents, faits prouvés par la Justice péruvienne et la Cour Internationale de Droits de l’homme. Certes, la vengeance des senderistas ne s’est pas faite attendre. Et pas plus la réponse du Pouvoir qui a suivi avec le Massacre de Cayara en mai ‘88, quand trente personnes ont été exterminées, et qu’il y a eu des dizaines de disparus.

      Notre Père, sans Jésus

      Mon Dieu, si tu avais été homme,
      aujourd’hui, tu saurais être Dieu.

      César Vallejo

      Il s’est cru « touché par la destinée » quand il a assumé son premier mandat à seulement 36 ans. Depuis 1930, l’APRA, son parti, n’accédait pas au Pouvoir : ce furent de grandes festivités et allégresses ; l’espérance déployait ses ailes sur ce jeune homme, avocat et sociologue, né le 23 mai 49, une date qu’aujourd’hui 78 % des Péruviens qui ont parié sur l’illusion voudraient biffer du calendrier. C’est le pourcentage des personnes qui refusent que García —pour ces choses éthiquement incompréhensibles—, occupe depuis le 28 juillet 2006, et pour la deuxième fois, le fauteuil présidentiel. Sa gestion doit expirer en 2011... Y arrivera-t-il ?

      Il avait quitté le gouvernement en juillet, par une porte dérobée, sans pouvoir prononcer son dernier message, parce que les cris des législateurs et du public ne le lui ont pas permis. Le Parlement l’a inculpé d’un nombre incalculable de délits. Meurtres et tortures, enrichissement illicite, pots de vins dans l’achat d’avions Mirage, vente irrégulière d’actions sur la dette externe, appel d’offres d’un train électrique qui a seulement avancé de cinq kilomètres … et la liste continue. « Alan Baba » —alias celui qui s’explique lui-même— a trompé la Justice. Il a éludé les accusations de crimes de lèse humanité, avec l’aide du président d’alors, Alberto Fujimori, maintenant inculpé pour vingt homicides et deux massacres ; et l’exil de Garcia —d’abord en Colombie puis à Paris— l’a sauvé de la prison pour corruption financière. Après, il est retourné au Pérou pour dire... Vive la liberté ! Les accusations étaient prescrites.

      À Paris, « Patadita » vivait dans un appartement qu’il a acheté en 1997, au 118 rue de la Faisanderie, dans le super chic 16ème arrondissement. Dans les 196 mètres carrés pour lesquels il a payé 2,6 millions de francs —près de 390 000 euros—, sa taille y a fait son nid comme un corbeau glouton. « Patadita », c’est le surnom qu’il a reçu quand, au Pérou, il a donné un coup de pied furieux à un handicapé, devant la télé.

      Ah, pauvre poète Doña Nytha Pérez Rojas ! C’est l’une des fondatrices de l’APRA, cultivée, lutteuse infatigable, et ... sa maman. D’elle, il a hérité son verbe, mais, du bon ... rien de plus. Mère amoureuse, elle l’a élevé seule jusqu’à ses cinq ans, puisque « Blanqui » était emprisonné, torturé et même déporté, durant cette étape. « Blanqui », de son vrai nom Don Charles Garcia Ronceros, était son père » ; homme politique et bonne personne, après les grilles, il gâtait son bébé. Mais dès que le papa eut quitté la prison, le bébé « a eu peur en le voyant », il n’a jamais cessé de l’appeler « Monsieur García », et a fait voler comme des Mirages les poèmes que Don Charles lui avait écrits dans Le Fronton.

      Le quinquennat 1985-90 a signifié, pour le Pérou, l’une des crises les plus sévères subies jusqu’alors. Et son actuelle gestion se révèle encore pire. Pendant ce temps, et sur la télé officielle, il a dit un Notre Père dont le copyright n’est pas à Jésus. « Notre Père Pérou / Pérou que tu es dans le monde/ une patrie, que ta volonté soit faite/sur la terre comme au ciel », a-t-il prié avec dévotion.

      Cinq fils et un autre bébé

      Ah, cette lassitude m’étouffe, et le sang somnole
      Comme un alcool paresseux dans mes veines..

      César Vallejo

      Son addiction aux relations amoureuses est proverbiale. Il s’est marié à 22 ans, en Suisse, avec Carla Buscaglia, dont Carla García est née ; peu après, il a connu, en Espagne, l’argentine Pilar Nores Bodereau, et après l’impact amoureux, ils ont scellé un pacte à jamais qui dure encore. En 1977, il est retourné au Pérou et, tout de suite, Pilar est arrivée avec Josefina —la première fille des García Nores— née à Madrid ; avec le temps, il a divorcé de sa première épouse.

      Toujours impétueux, séducteur et Don Juan, il a eu des amours partout. Et la Première Dame, qui est intelligente, qui connaît bien son honorable époux et influence beaucoup ses décisions, supporte les infidélités. Les supporte-t-elle, ou est-elle son complice ? Ils avaient quatre fils, et Garcia en avait cinq. Mais la télévision est arrivée.

      Le journaliste César Hildebrandt avait révélé que le président avait un fils d’un an et 8 mois, dont la mère était Roxanne « Cuqui » Cheesman Rajkovic. Un grand tapage. Deux jours après, une conférence de presse au Palais du Gouvernement. Là, García était debout, haut , un livret à la main et qu’il a lu. Pilar Nores regardait vers la pointe de ses chaussures, deux pas derrière, ses mains en croix. Il a menti, disant qu’ils avaient été séparés durant six mois, que dans ce laps de temps il a eu une relation avec l’autre « dame distinguée », de qui est né son sixième fils, Federico García Cheesman, celui qu’il avait reconnu comme tel ; mais que, quoiqu’il en soit, sa vie maritale avait été reconstruite. De là, l’expression Matrimonius interromptus que Hildebrandt a consacrée : aujourd’hui nous nous séparons, j’y vais, j’ai un fils ,je reviens, et, déjà, ça y est.

      Violent. Une violence attribuée à sa maladie maniaco-dépressive pour laquelle il prend du lithium régulièrement, il s’obstine à imposer la peine de mort, dans le meilleur style du chef George W. Bush, qu’il sert au-delà de ses attentes. La doctrine Bush s’étend au Pérou.

      Genoux serviles

      Jamais, hommes humains,
      Il y a eu tant de douleur dans la poitrine, dans le revers...

      César Vallejo

      « Voleur, génocide, amateur de cocaïne » et d’autres qualificatifs, c’est le minimum que le journal la « Nation », du Chili, dit de lui. Et servile. En mai passé, García s’est mis aussi à genoux face à la présidente chilienne Michelle Bachelet, dont le gouvernement a réalisé d’énormes investissements au Pérou. Des investissements ou « une sorte d’occupation économique sans limites », selon le journaliste Carlos Angulo Rivas. Malgré cela, Bachelet a été agacé en face des genoux serviles : bien peu des personnes supportent certaines indignités ... bien qu’elles en fomentent d’autres.

      « Tirez, ne pensez pas », ordonne Alan García à la Police. Incapable de donner une réponse à la protestation sociale, « Patadita » la criminalise. Il suit l’exemple de la guerre préventive que proclame son chef de la Maison Blanche : il réprime et emprisonne. Obsédé, il voit des terroristes même dans les verres qu’il prend en abondance. De là, l’arrestation de Melissa Patiño, poète de 20 ans, et de six autres jeunes hommes, sans autre péché que d’être poètes. Melissa a été 70 jours dans la prison de sécurité maximale, de « Santa Mónica », à Chorrillos, Lima, prise comme otage. Le président a voulu l’associer au MRTA (le Mouvement Révolutionnaire Túpac Amaru), groupe avec lequel la petite fille n’a pas de liens ; mais il continue, déterminé, à dire que ce groupe est guérillero, malgré le fait que le Parlement Européen et le Département d’État des États-Unis —rien moins— l’ont exclu de leurs listes d’organisations terroristes, puisqu’il n’enregistre pas d’activités illégales depuis 8 ans.

      De plus, ses leaders sont condamnés et ont exprimé leur désir de travailler pour la démocratie, à l’intérieur d’un parti politique. Ainsi, Víctor Polay —qui fut le leader du MRTA et a supporté 17 ans de prison, avec huit de tortures quotidiennes— a demandé pardon. Un comité de personnes irréprochables travaille pour sa liberté et sa réinsertion civique. Mais non : García a fait augmenter sa condamnation, de plus en plus. En réalité, il ne pardonne pas à Polay l’idylle qu’il a eue avec Pilar Nores, sa femme, des années auparavant. « Ce dont a besoin le Pérou, c’est d’ordre. Ils sont informés », c’est la consigne de l’homme qui, de nuit, s’habille de noir et d’un scooter ... revêtu pour tuer ?

      Melissa —et puis les six autres jeunes détenus— est sortie de la prison grâce à l’action du PEN Club et son « Comité d’Écrivains en Prison » ; et surtout par la puissance des 1.700 signataires qui ont exigé... Liberté ! Entre autres, Noam Chomsky, Thiago de Mello et d’autres écrivains, éditeurs et artistes renommés de toute la planète. Contrarié, le gouvernement a accusé Chomsky et tous les signataires de « co-terroristes ». Si l’on n’a pas de réponse, la déraison peut être un recours.

      Autoproclamé un homme de gauche— avec la moquerie mondiale résultante— l’homme de gauche poursuit des poètes et les idées. Il ravage les centres culturels et envoie des hommes armés comme pour opposer des assassins sériels. « Garcichet » —mix entre García et Pinochet — selon la plume du journaliste Javier Diez Canseco— poursuit sa persécution contre tous.

      Pendant sa visite au Pérou, ce mois de mai, le sociologue français Alain Touraine a dit que le mandataire péruvien a dix ans de retard, puisque l’idée de libéralisation et de privatisation totale est déjà abandonnée. Mais « Cheval Fou » continue sa course effrénée : entre autres barbaries, il a imposé six projets de loi pour amputer des territoires aux paysans et vendre les bois amazoniens aux multinationales ... à perpétuité. Et en avril, il a dit à Madrid : « Je viens demander que les caravelles de Christophe Colon reviennent, maintenant en forme d’investissements ».

      N’a-t-il pas de limites ? En février 2006, quarante jours avant les élections, son conseiller l’a incité à gagner les voix des jeunes : 30 % de l’électorat.

      — Nous avons à les gagner— s’est enflammé le candidat—. Qu’est-ce qu’il faut faire ?

      — Tu dois danser— lui a répondu son conseiller. Et les photographies ont exhibé dans le monde tout entier le reggaetón dansé par la figure d’Alan Ludwig García Pérez, patapouf.

      Le 9 de ce mois, il y a une grève nationale et la citoyenneté commence à réagir. « Tirez, ne pensez pas », insiste le danseur, tandis qu’il reste persécuté en pensant qu’il mourra comme John Kennedy. Et il s’acharne à adjuger /liquider l’État, sans modération : « Ah ! Malheureusement, hommes humains, Il y a, frères, énormément à faire » (César Vallejo)

      2 juin 2008

      * Cristina Castello est une poète et journaliste argentine bilingue (espagnol-français) qui vit entre Paris et Buenos Aires.

      http://www.cristinacastello.com

      http://les-risques-du-journalisme.o...

      * Cet article est libre de reproduction, à condition d’en respecter l’intégrité et d’en mentionner l’auteur

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      • Le gouvernement péruvien vient de donner son feu vert à Perenco, une compagnie franco-britannique, pour exploiter le pétrole en Amazonie, moins de deux semaines après le massacre qui a fait plus d’une trentaine de victimes au cours des manifestations contre l’exploitation de l’Amazonie.

        Ce projet, qui doit être mené dans une région habitée par au moins deux groupes d’Indiens isolés, est considéré comme la plus grande découverte pétrolière de ces trente dernières années au Pérou. La compagnie Perenco dirigée par François Perrodo, l’une des plus grosses fortunes de France, avait contesté dans le passé la présence d’Indiens isolés dans cette région.

        Jusqu’à récemment, les manifestants indiens qui bloquaient les routes et les rivières avaient réussi à empêcher Perenco d’accéder à la zone d’exploitation. Mais la compagnie a réussi à franchir au moins un barrage avec l’aide des forces armées péruviennes.

        Des hauts membres du gouvernement péruvien espèrent que le projet de Perenco transformera l’économie du pays. Alors que des centaines d’Indiens manifestaient contre sa compagnie, François Perrodo rencontrait le président péruvien Alan Garcia à Lima et s’engageait à investir 2 milliards de dollars dans ce projet.

        Le feu vert du gouvernement a été donné quelques jours après la mobilisation massive du nord du Pérou qui a été violemment interrompue par la police, faisant de nombreux morts parmi les forces de l’ordre et les manifestants indigènes. Le nombre exact des victimes n’est pas encore connu. Survival a récemment publié sur internet le rapport de deux témoins oculaires ayant été pris dans les affrontements.

        Perenco projette de construire de nouvelles plates-formes et de forer des puits qui nécessiteront notamment un pont aérien et plusieurs milliers de tonnes de ciment. La « pollution du sol », la « pollution de l’eau » et la disparition du gibier et de l’avifaune sont des conséquences probables du projet d’exploitation pétrolière, a admis la compagnie. Tous ces éléments sont essentiels à la survie des Indiens isolés qui vivent dans ce territoire. Plus grave encore, ces Indiens seront menacés par des maladies contre lesquelles ils n’ont aucune immunité.

        Stephen Corry, directeur de Survival International, a déclaré aujourd’hui : ‘Ceux qui espéraient que les violences de ces dernières semaines auraient engagé le gouvernement péruvien à agir avec plus de sensibilité envers les Indiens d’Amazonie doivent être consternés par cette nouvelle. Le moment ne pouvait être plus mal choisi – le gouvernement essaie de se forger une image plus conciliante, mais lorsqu’il s’agit des compagnies pétrolières c’est le profit qui compte avant tout’.

        Le 30 juin 2009

        http://www.survivalfrance.org/actu/4711
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        La compagnie pétrolière franco-britanique Perenco, dirigée par François Perrodo est très en pointe dans les forages pétroliers de cette zone amazonienne du nord du Pérou comme elle est déjà très installée en Equateur.

        http://fr.wikipedia.org/wiki/Perenco

        http://www.survivalfrance.org/actu/4532

        http://www.perenco.com/home.html

        Adresse : 25 Rue Dumont D’urville, Paris, 75116, France

        Tel : 33 01 53 57 66 00

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