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Edito 165 Janvier 2007

lundi 1er janvier 2007, par Courant Alternatif


La lucha sigue sigue sigue ! *

Une fois n’étant pas coutume, le C.A. pourrait commencer l’année 2007 par un anniversaire : Le premier janvier 1994 l’armée zapatiste de libération nationale (EZLN) bottait le cul du gouvernement, corrompu comme il se doit, d’un pays que d’aucun(e)s décrivaient comme " le bon élève du FMI ". Le Mexique, tout juste remis des commémorations de 500 ans de massacres, spoliations et autres réjouissances, préparait alors son adhésion à l’accord de libre échange nord américain (ALENA). 502 années de sabres et de goupillons, couronnées par quelques décennies d’impérialisme étazunien n’avaient donc pas eu raison des velléités de justice, de dignité et de paix des racailles locales, latino-américaines et amérindiennes ? Lendemain de réveillon douloureux donc pour le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel, ça ne s’invente pas) qui découvrait, après 70 ans de pouvoir autoritaire, que les opprimé(e)s finissent toujours par relever la tête…mais l’avaient-ils(elles) seulement baissée ?
Hélas en ce début 2007 la gueule de bois est pour nous, celles et ceux qui s’enthousiasmaient pour la commune de Oaxaca. Ecrasée comme celle de Paris, elle avait eu le tort de s’attaquer aux pouvoirs des caciques, de proposer d’autres modèles de sociétés… crimes de lèse-majesté dans ce pays féodal comme ailleurs. Se sentant en mauvaise posture les frères ennemis PRI et PAN (parti détenant le pouvoir fédéral) ont réalisé l’union sacrée contre les insurgé(e)s. Fidèle à ses méthodes maintes fois éprouvées contre toutes formes de contestations, le gouvernement mexicain a lâché ses hordes guerrières (armées par les EU, la France et la Suisse, formées à l’école des Amériques de sinistre mémoire) sur la population désarmée. Si certain(e)s ont eu les moyens et l’envie de s’empiffrer comme il semble d’usage en fin d’année, nous, nous sommes gavés de l’immuabilité de la répression s’abattant sur celles et ceux qui se battent pour faire valoir leurs droits. Il faut dire que ces dernier(e)s ont la mauvaise habitude de se manifester au moment le plus *inopportun : S’inviter à la grand’messe du vingt heures relève de la faute de goût, surtout si l’on doit y aborder les thèmes fondamentaux traditionnels que sont les achats de dernière minute, le prix de la truffe au kilo ou le nouveau sondage ségo/sarko… On ne peut certes pas dire que Les chien(ne)s de garde du pouvoir n’abordent jamais les sujets de classes, mais la façon de le faire est généralement, et suivant l’humeur, complaisante, lénifiante, larmoyante ou proche de l’ethnologie (de notre envoyé spécial chez les prolos…). Les annonces d’entreprises qui ferment pour cause de délocalisation font recettes mais des ouvrier(e)s qui se battent pour la régularisation de leurs collègues, c’est pas vendeur. Faire pleurer dans les chaumières sur les logements des familles africaines, surtout quand ils brûlent, banco mais quid des véritables causes et des expulsions consécutives à ces coups de projecteurs. Comble du bon sentiment, ces gros plans sur les familles " bien françaises " se mobilisant contre l’expulsion des camarades d’école de leurs chères têtes blondes mais " nos " femmes et compagnes de ministres ainsi que leurs homologues masculins ont occulté la répression qui s’abat sur les militant(e)s et proches du réseau éducation sans frontières (RESF). Dans les oubliettes du vingt heures on compte encore bien des victimes : Les trimardeurs du nucléaire ? Tabou, Hulot la nouvelle coqueluche de tout le monde (y compris de Voynet), le chantre mou de l’écologie, est parrainé par EDF. La situation des taular(de)s en général et celle des prisonnier(e)s révolutionnaires en particulier ? on parle déjà beaucoup des repris de justice : Pasqua, Tibéri, Balkany, Juppé, Doc.gynéco, Tapie, Crozmarie,… Les Roms logeant dans des bidonvilles aux confins de la ville lumière ? Pas très glamour la méthode Delanöe consistant à mettre la poussière sous le tapis du voisin. Allez hop ! Africain(e)s, Roms, SDF, junkies et autres pauvres : En banlieue ! Qui a parlé cet été de la noyade dans le canal d’un jeune Rom sous les yeux des flics qui le pourchassaient à Aubervilliers. A deux pas de là, la plaque en mémoire des victimes de la répression d’octobre 1961 a peut-être donné des idées aux représentants de la loi... Quand on nous annonce, des trémolos dans la voix et le regard embrumé, " la mort tragique d’un SDF", c’est peut-être pour nous rappeler ce qui nous attend si l’on n’est pas des citoyen(ne)s modèles avec tout ce que cela comporte…Alors quand la plèbe déferle sournoisement au cœur du quartier neo-bourgeois (bobo) de Paris ou dans le centre-ville de Pau qui lui est toujours interdit par un maire sosdèm’, impossible de ne pas en parler. La presse, comme ses maître(sse)s aime les prolos quand ils(elles) s’écrasent ou calanchent mais pas quand ils(elles) luttent. Ainsi les sans-abri se sont installé(e)s dans le débat public et si la situation n’était pas si tragique, nous pourrions nous réjouir de la confusion dans laquelle cette mobilisation aussi subite qu’impressionnante met les classes dirigeantes et leurs valets. La période pré-électorale aidant, la société du spectacle s’est mise en branle et tous ces ronds de cuir se trémoussant, minaudant, cherchant la phrase magique, la solution miracle nous offre un spectacle aussi grotesque que consternant… Voir Sarkozy faire des promesses à la Jospin laisse augurer un premier semestre 2007 assez trépidant. Quand on connaît ses méthodes encore utilisées contre les " campeurs " du quai d’Austerlitz le matin même de sa déclaration, on ne peut que s’inquiéter pour celles et ceux qui dorment sur les trottoirs et qu’il veut voir disparaître dans deux ans…
Alors on oubliera de se joindre à la liesse générale imposée comme chaque début d’année. On se passera de prendre de bonnes résolutions citoyennes. N’en déplaise à S. Royale, " la France qui se bat et qui se lève ", elle n’est pas au PS, elle ne descend pas dans la rue en troupeau bien ordonné avec ses petits drapeaux roses et ses ballons a l’appel du parti, elle y vit, même si ce n’est pas par choix. Cela fait longtemps que nous avons " hiérarchisé nos priorités " et lorsque l’on voit ce que des gens pour lesquels vous n’accordez un regard qu’en période électorale développent sur leurs lieux de vie, sur leurs lieux de luttes et pourquoi, nous savons que nos combats sont justes.

OCL Paris

*" Zapata vive vive vive, la lucha sigue sigue sigue "
(Zapata vit, la lutte continue) célèbre et inévitable slogan des insurgé(e)s Mexicain(e)s.

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