Accueil > Actualités, Tracts et Communiqués > Grèce : préambule d’une révolution ?

Grèce : préambule d’une révolution ?

Un texte d’Uri Gordon

vendredi 2 janvier 2009, par Administrateur OCL Web

Malgré l’arrêt des occupations des universités, il est prévu une grande
manifestation d’étudiants le 9 Janvier.


Cela fait trois semaines que le meurtre, par un policier, du jeune de
15ans Alexandros Grigoropoulos, à Athènes, a eut lieu et rien n’indique
que les émeutes qui ont enflammé Grèce vont se calmer.

Au moment où se terminaient les occupations des trois universités de la
capitale (économie, droit et Polytechnique), une grande manifestation
d’étudiants a été appelé pour le prochain 9 Janvier, tandis que les
protestations, les affrontements dans les rues et les occupations de
stations de radio et de TV se poursuivaient à un grand rythme.

[…]

Les effets internationaux sont palpables. Il ya eu des manifestations de
solidarité et les attaques contre les ambassades grecques partout dans
le monde, de Moscou à New York à Copenhague et à Mexico. Les
déclarations et les manifestes des assemblées d’étudiants en Grèce sont
presque instantanément traduites et envoyées sur le Web en anglais,
français, italien, turc et serbe.

Durant les premiers jours de la révolte, les blogueurs ont tenté de
recueillir une liste de toutes les expressions de solidarité qui ont eu
lieu, mais la tâche s’avère impossible : il y en avait des centaines,
des milliers de personnes sont descendues dans les rues. Samedi dernier,
journée mondiale contre la violence policière, des manifestations ont se
sont déroulées dans plus de 30 villes dans le monde entier.

La presse a produit plusieurs théories pour expliquer les causes des
troubles : la frustration face à un gouvernement corrompu, crise
financière mondiale, le mécontentement d’une jeunesse grecque face à de
maigres perspectives d’emploi et de couvertures sociales, les émeutes
étant une réaction épidermique à ces conditions objectives.

Toutes ces explications sont en fait des leurres destinés à faire
silence et à ignorer les motivations de ceux qui ont été désignés comme
des « rebelles ».

Une déclaration des étudiants occupant la Athènes School of Economics,
est suffisamment claire à ce sujet : "un système démocratique de la
façade n’assassine pas tous les jours un Alex Alex, mais des milliers de
Ahmets, Fatima, Jorges, Jin Tiaos et Benajirs : meurtres systématiques,
tous les jours, et sans remords, contre des personnes dans le tiers
monde ... "

"Les repères de ceux qui se se situaient normalement dans la société ont
sauté en l’air lorsque la balle tirée par le porc Epaminondas Korkoneas
[le policier qui a tiré sur Grigoropoulos] a enfreint la loi. Mais qui
ignore à ce stade que la force de la loi est tout simplement celle de
ceux qui sont au pouvoir ? Quelle est la loi qui permet l’exercice de la
violence ? Le code produit est un vide juridique, il ne veut rien dire,
du début à la fin, il ne cherche pas autre chose que de camoufler
l’imposition du pouvoir ".

Dans une autre déclaration, anonymes : "Ce que nous recherchons ?
L’égalité. Politique, économique, sociale. Pour le monde entier. Notre
capacité à convaincre les consommateurs de rejeter des produits qu’ils
acceptent servilement, est plutôt limitée. Que pouvons-nous faire que
piller les supermarchés et distribuer les marchandises, dans le monde
entier, et dissoudre les mythes qui renforcent les inégalités ? "

[…]

Les grands médias ne peuvent tout simplement pas accepter l’idée que ce
qui se passe en Grèce est une révolte sociale contre le système
capitaliste et les institutions de l’État qui le renforce. Il est temps
de reconnaître que le mouvement anarchiste grec a réussi à prendre
l’initiative de présenter à tous les problèmes de la société grecque
d’une manière attrayante pour un public essentiellement jeune.

Peu de gens savent que le mouvement anarchiste grec est considérablement
le plus fort dans le monde, par rapport à une population donnée. Il
bénéficie également d’un large soutien, de par le biais de son héritage
de lutte sociale et de résistance contre la dictature militaire de 1967
à 1974. Les manifestations avec des affrontements violents sont
fréquents en Grèce. Presque tous les deux mois de dures batailles
rangées oposent la police et les anarchistes dans les rues d’Athènes et
de Thessalonique. Les événements que nous voyons maintenant ne varient
que par l’étendue et la durée, et non par leur niveau de militantisme.

Un autre facteur rarement pris en compte est que la Grèce est un pays où
l’appareil de sécurité de l’Etat est relativement tenu en échec par le
public par le public lui-même. Par exemple, le rapport de 2007 de
Privacy International sur la surveillance de la police ont montré que la
Grèce est le seul pays au monde où il ya des recours contre les abus du
gouvernement concernant le contrôle des citoyens. L’héritage de la
dictature a créé une image durable de la police comme intrinsèquement
oppressive, même parmi les couches de la classe moyenne.

Les troubles en Grèce conduiront-il à une révolution anticapitaliste ?
Seulement si l’espace ouvert dans le tissu social est élargi et
approfondi, en impliquant de plus en plus de secteurs de la société, en
créant de nouvelles structures liant les gens entre eux et en détruisant
les anciennes. Cela ne semble pas possible à court terme, car que les
syndicats bureaucratisés et le parti communiste grec vont agir pour
essayer de dompter la révolte et obtenir des bénéfices politiques en
exigeant le désarmement de la police.

Mais il ne fait aucun doute que les troubles en Grèce ont produit un
point de référence pour ce qui peut se passer dans les pays occidentaux
au cours de la période à venir avec la crise économique et la
détérioration de l’environnement. Les gouvernements européens
n’hésiteront âs à huiler le mécanisme de ses politiques de répression et
de surveillance en prévision de troubles civils qui ne ne manqueront pas
de s’intensifier. Il se peut que cela ne soit pas suffisant pour amener
les gens commencent, crise après crise, à affronter la question du
pouvoir et des privilèges.

Uri Gordon

*Universitaire activiste israëlien proche des « anarchistes contre le
mur »

auteur de "Vive l’Anarchie ! : politiques anti-autoritaire de la théorie à
la pratique"

traduction JPD

Répondre à cet article


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette