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FILIPE BIDART : libéré, mais sous conditions

dimanche 18 mars 2007, par Courant Alternatif

Arrêté en février 1988, après 7 ans de clandestinité, Filipe Bidart, militant d’Iparretarrak (cf. encart), a passé 19 années en prison. Accusé du meurtre de deux policiers (qu’il a toujours nié) et d’un gendarme, il a été condamné deux fois à la prison à vie et il s’est vu infliger 20 ans de réclusion en 2000 pour participation (non prouvée) à une fusillade au cours de laquelle un gendarme avait été tué et un autre blessé. Il était le dernier militant d’Iparretarrak emprisonné. Il a rempli sa peine.
Au-delà même, puisqu’il était libérable quatre ans plus tôt, selon l’aménagement prévu par la loi qu’est la libération conditionnelle, auquel Filipe avait droit depuis 2003.


L’obtention par Filipe Bidart de cette libération conditionnelle a été un long parcours semé d’obstacles.
Le mouvement abertzale s’est fortement mobilisé pour le soutenir dans sa démarche, depuis plusieurs années. Une centaine d’élus du Pays Basque ont signé une pétition pour demander “ que la loi soit appliquée et que la libération soit enfin accordée à Filipe ”. Des mobilisations et des manifestations ont eu lieu à plusieurs reprises, appelées par le Comité Filipe aska (Comité Libérez Filipe).
Une première demande de libération conditionnelle avait été déposée en juillet 2005. Elle a été refusée par deux jugements successifs, en janvier, puis en octobre 2006. C’est une deuxième demande, faite exactement dans les mêmes termes, qui a finalement été acceptée par le tribunal d’application des peines de Paris, le 1° février 2007. Filipe a pu sortir de la prison de Clairvaux (Aube) le 14 février, mais il est interdit de séjour pendant 7 ans dans les départements du Sud-Ouest et au Pays Basque et c’est à Béziers qu’il travaillera dans un centre d’entraide aux demandeurs d’asile de la Cimade.

Dès que Filipe Bidart a franchi les portes de Clairvaux, c’est à une véritable levée de boucliers qu’on a assisté. Les raisons ? L’attitude digne du militant et les propos politiques qu’il a tenus en sortant de la prison ont été jugés “ choquants ” par certains, dont le Garde des Sceaux lui-même, qui auraient voulu que Bidart sorte “ discrètement ” et la tête basse.
Le militant basque n’a pas dit ce que l’Etat et ses zélés serviteurs voulaient entendre.
Ils déplorent son absence de regrets et d’excuses à l’égard des CRS et des gendarmes tués (1). Ceux qui n’accordent aucune légitimité à la demande de reconnaissance du Pays Basque ne veulent voir en Filipe Bidart qu’un meurtrier de policiers et cherchent à nier son combat politique. Les voix qui s’élèvent contre sa libération, dès sa sortie de prison ont cette fonction : attirer l’attention sur les victimes policières afin de tenter de gommer le message politique d’un homme qui est resté un militant fidèle à la lutte pour la reconnaissance et l’autonomie du Pays Basque.

Au matin de sa sortie de prison, Bidart a très logiquement fait des déclarations politiques, d’ailleurs tout à fait mesurées, à propos de ses camarades et du Pays Basque : à savoir que 4 prisonniers basques sont enfermés à Clairvaux, qu’il y en a 150 dans les geôles françaises et plus de 450 en Espagne, qu’un prisonnier d’ETA Inaki de Juana en était à son 100° jour de grève de la faim le 15 février (alimenté de force), que l’Etat français continuait à ne pas reconnaître le Pays Basque, et qu’il fallait poursuivre la lutte et se rassembler pour prendre son avenir en mains.
Ces propos ne s’entendent pas habituellement hors du territoire du Pays basque et ce jour-là la presse française les a répercutés. Cet écho médiatique des déclarations de Bidart à travers toute la France n’a pas plu à l’Etat. D’ailleurs, depuis, les journaux ont rectifié le tir, préférant donner la parole aux familles des policiers et à leurs syndicats. Et d’abord à l’extrême droite (de Villiers) qui, la première, a dénoncé la libération de F. Bidart, tout en réclamant la réintroduction de la peine de mort. En cette période de campagne électorale, d’autres ne pouvaient pas faire moins, et des réactions virulentes, provenant des tendances pour la plupart proches du pouvoir, n’ont pas tardé à se faire entendre pour se plaindre de la décision judiciaire, que ce soit dans les rangs de la droite (dont le maire UMP de Béziers) (2) ou dans ceux des syndicats de police (l’UNSA-police a ouvert le feu, suivi du Syndicat général de la police SGP-FO, du Syndicat national des officiers de police - SNOP, et du Syndicat des commissaires SCPN).

Ce qui déplaît surtout à l’Etat, c’est de voir que Bidart reste fidèle à ses idées de liberté pour le Pays Basque. L’Etat pensait que la prison, briseuse de volontés, était un bon instrument pour imposer le repentir et que, dans le cas de Bidart, il faudrait que celui-ci renie son amour du Pays basque et ses buts politiques pour que soit acceptée sa libération. C’est pourquoi le Garde des Sceaux Clément, soucieux de ne pas faire perdre quelques voix à son camp, a déclaré qu’il n’excluait pas d’engager des poursuites judiciaires contre Filipe Bidart pour “ apologie de crime ”, au vu du libellé précis de sa prise de parole à sa sortie de prison. Mais il n’a rien pu y trouver qui puisse tomber sous le coup de la loi et il a expliqué piteusement qu’il avait voulu lancer “ un avertissement ” à Bidart.
Mais le Garde de Sceaux garde une autre arme en réserve ; il a rappelé que la décision du tribunal ayant accordé la libération conditionnelle s’était faite contre l’avis du Parquet général et que lui-même, ministre de la justice, y était opposé - signe qu’il y aurait peut-être du tirage entre pouvoir politique et certains magistrats - . En effet, le 5 février, la libération conditionnelle de F. Bidart a fait l’objet d’un pourvoi en cassation formé par le Parquet général, pourvoi qui représente une épée de Damoclès au-dessus de la tête du militant basque et caractérise l’acharnement répressif de l’Etat. Ainsi, ce dernier ne semble pas satisfait des lois qu’il a lui-même promulguées ou plutôt il donne à ses propres lois des profils à géométrie variable, selon le contexte et la fluctuation de ses arrangements politiciens.

Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, la libération conditionnelle que Filipe Bidart a fini par obtenir doit permettre d’ouvrir une brèche pour la libération d’autres détenu-es politiques, dont ceux-celles d’Action Directe, qui croupissent dans les geôles françaises, au mépris de la loi.

Kristine, Pays Basque, le 17-02-07

(1) Bidart (et Iparretarrak) ont toujours nié avoir participé à la fusillade de Saint Etienne de Baïgorry en 1982, causant le décès de deux CRS. Le militant a reconnu en revanche, lors du procès, avoir tiré sur un gendarme à Biscarosse, en 1987, pour échapper à un contrôle.
(2) Le maire de Béziers, Raymond Couderc, a affirmé que F. Bidart ne serait pas le bienvenu dans sa ville, pas plus que les quelques trois cent de Basques qui s’y déplacent le 17 février pour fêter sa libération. Le Maire vient d’ailleurs de leur refuser un local en centre-ville.

Allemagne : la RAF

Tant en France la libération de Filipe Bidart, qu’en Allemagne prochainement avec les prisonniers de la Fraction Armée Rouge, et malgré les polémiques suscitées, la libération de prisonniers d’Action Directe est plus que jamais à l’ordre du jour.
Brigitte Mohnhaupt, l’une des quatre membres restants de la “ bande à Baader ”, a croupir encore en prison sera sans doute libérée avant la fin mars .
Le tribunal de grande instance de Stuttgart a décidé qu’elle serait libérée de la prison d’Alchach en Bavière après l’accomplissement de sa peine de prison qui avait été fixée à vingt quatre ans. Brigitte Mohnhaupt, agée de cinquante sept ans, avait été condamnée le deux avril 82 à cinq fois la réclusion criminelle assortie d’une peine incompressible de 24 ans qu’elle vient de purger.
Elle avait été jugée coupable de neuf assassinats dont ceux commis en 77 du procureur général S.Buback, du patron de la Dresdner Bank, J.Ponto,et de HM Schleyer, le patron des patrons allemand. De ces années de plomb, trois autres membres de la Fraction Armée Rouge (RAF) restent encore emprisonnés dont Christian Klar, 54 ans. Sa peine n’expirerait qu’en 2009 mais il aurait adressé une demande de grâce à la présidence de la république. Ses deux autres compagnes de la lutte armée, Eva Haule et Brigitte Hogefeld sont toujours incarcérées. Sept autres personnes soupçonnées d’appartenir au groupe dissous depuis 98 sont encore recherchées. La naissance de la RAF se situerait dans les années 70 dans le sillage du mouvement contestataire des années 60, quand la journaliste de gauche Ulrike Meinhof lance une opération commando pour libérer Andréas Baader et Gudrun Esslin emprisonnés pour avoir incendier un grand magasin.
Il va de soi que cette libération de Brigitte Mohnhaupt et de Christian Klar rouvre les plaies de ces années de plomb.

Action Directe : Sortons-les !

26 février 1987 - 26 février 2007
2O ans après, et leurs peines de sûreté accomplies, les militants d’Action directe sont toujours en prison. Nous sommes conscients que très nombreux sont ceux et celles qui se mobilisent pour une transformation profonde de notre société. Pour nous, cette transfoirmation apsse aussi par la libération de nos camarades, depuis 20 ans derrière les barreaux... Comment pourrions-nous, après toutes ces années, les laisser sur le bord du chemin et ne pas tout tenter pour obtenir que le gouvernement les lmibère enfin

Défense active

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