Vivement après-demain
lundi 14 mai 2007, par
Au vu des résultats du premier tour de l’élection présidentielle qui vient d’avoir lieu en France, quelques constatations s’imposent : - Le nombre important des inscriptions sur les listes électorales qui ont eu lieu à la fin de 2006 (les nouveaux électeurs représentant près de 10 % des inscrits) et la participation record à ce scrutin. Le discours culpabilisant rabâché depuis cinq ans par toutes les institutions (politiques, médiatiques, syndicales, associatives…) concernant la présence de Le Pen au second tour en 2002 a porté ses fruits : les “ coupables ” d’avoir voté pour lui alors ont “ mieux ” voté (d’autant qu’il y avait l’intox d’un possible remake du processus), et le candidat FN a de ce fait perdu un million de voix que Sarkozy a récupéré en grande partie… logiquement, puisqu’il servait un plat très lepénien (hypernationalisme, immigration rendue responsable de tous les maux et mécontentements sociaux…). Une partie de l’électorat d’extrême droite en 2002 a ainsi voté “ utile ” en donnant sa voix à Sarko, tandis qu’une partie de l’électorat de gauche mais aussi d’extrême gauche votait selon la même logique en donnant la sienne à Ségo, en dépit de son positionnement fort peu socialiste. Ce phénomène du vote “ utile ” n’a pourtant pas changé fondamentalement la donne, car Le Pen n’aura jamais été autant le moteur, la référence et l’élément dynamique de la campagne qui s’est déroulée : sa conception du monde a été comme une carotte devant tous les lapins du concours… lui-même tenant la canne quelques pas derrière. C’est ainsi que Sarkozy en a remis une louche sur l’identité nationale et l’immigration pendant que Royal en appelait au drapeau bleu blanc rouge et au rôle éducatif de l’armée pour les jeunes délinquants dans les quartiers ; “ travail famille patrie ” ont été les valeurs les mieux partagées par les deux candidats qualifiés pour le second tour. Et le vote “ utile ” va fonctionner à plein là encore, avec à l’extrême gauche nombre d’électeurs et électrices qui voteront Ségo (éventuellement une pince à linge sur le nez) pour ne pas voir élue la (seconde) bête noire Sarko. Cela même si, sur la question des “ sans-papiers ”, la position de “ Ségolène ” ne diffère ni d’un Sarkozy ni d’un Bayrou : pas de régularisation massive, que du “ cas par cas ”. Le PS n’est pas porteur de la moindre promesse – s’il en faisait une, il ne la tiendrait d’ailleurs, on le sait, que devant la mobilisation des sans-papiers et de leurs soutiens ;
Notre dernière grande constatation est une confirmation : tout l’échiquier politicien continue de se déplacer vers la droite (la caricature étant la candidate PC qui bannit le terme “ communiste ” de son vocabulaire). A part chez les réacs, les aigris… qui représentent tout de même au moins 45 % des votants, cette campagne électorale, même si elle a intéressé, n’a pas fait naître beaucoup d’illusions. Il faut dire qu’elle était triste, et porteuse d’aucun rêve pour le lendemain. On a voté massivement (voir le faible taux d’abstention) contre le méchant, et bien plus rarement pour un programme politique annonçant un avenir meilleur. Pour motiver le vote Royal, certains n’hésitent pas à brandir l’étendard de l’antifascisme – ces mêmes “ antifascistes ”, défenseurs de la République, avaient appelé à voter Chirac au second tour en 2002, tout en sachant pourtant que ce dernier avait dans ses valises un certain Sarkozy.
Avec Sarkozy à la présidence, ce sera aussi dur qu’aujourd’hui (car il est au pouvoir depuis cinq ans déjà) pour les sans-papiers, les précaires, les exploité-e-s, les jeunes… Nous en prendrons plein la gueule, mais en gardant l’espoir que naissent des mouvements sociaux d’envergure.
Avec Royal, la forme de gouvernement sera très certainement moins brutale (dans un premier temps…), mais le contenu sera le même ! Tout est affaire de pédagogie ! Elue, Royal pourra très certainement compter sur la docilité de beaucoup de structures institutionnelles, dont les grandes centrales syndicales. Cela nous rappellera la “ gauche plurielle ” de 1997- 2002 (moins d’un tiers des votants en 2007)… qui glissera vers le centre.
Ne pensez-vous pas que la vraie vie sociale et politique est ailleurs ? Nous n’aurons que ce que nous prendrons par nos luttes collectives, en rejetant tous les modèles de ce monde pourri. Un autre futur est possible ! La politique, la vraie, c’est dans la rue, les lieux de travail, les quartiers… qu’elle se fait quotidiennement, et non dans l’isoloir de leurs machines à… sous !
OCL Reims