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Edito 146 Fevrier 2005

dimanche 6 février 2005, par Courant Alternatif


Certains n’hésitent pas à comparer la période actuelle avec les années Thatcher en Grande Bretagne au cours desquelles la dame de fer a mené une politique de saccage social brutale et sans concession. Le mouvement ouvrier britannique ne s’en est toujours pas remis.

Force est de constater que le gouvernement Raffarin a fait sienne la devise « ça passe ou ça casse ! » en entreprenant une politique de privatisation et de libéralisation de très grande ampleur, quitte à s’attirer une impopularité record. Conformément au mandat que lui a donné le MEDEF les cibles tombent les unes après les autres : Poste, SNCF, Santé, sécurité sociale, éducation nationale (voir article page 9), etc. C’est la curée, la dernière ruée des capitalistes aux dents longues, prêts à se jeter sur la moindre parcelle de ce qui subsiste de secteur échappant un tant soit peut au marché. Le signal vient d’en haut. Depuis les années 80, tous les gouvernements successifs ont participé à la distribution généreuse des services publics les plus rentables aux capitaux privés (voir article page 6). Il serait parfaitement illusoire d’en appeler à la sainte « République » pour sauver ce qui reste d’Etat providence.

Cette même république française se trouvera de toute façon d’ici peu volontairement pieds et poings liés à un traité constitutionnel européen consacrant en principes fondamentaux les tables de la loi du marché (voir article page 14). Tous les secteurs de l’activité humaine devront se conformer prochainement, de gré ou de force, aux règles du capitalisme, même si cela doit passer par la remise en cause de dogmes soigneusement élaborés au cours des années, comme celui de la fermeture des frontières aux travailleurs immigrés. En réalité, cette soit disante fermeture n’a jamais été qu’une illusion, l’Etat organisant sciemment la précarité des étrangers par l’élaboration subtile d’un système juridico-administratif fabriquant en grand nombre des sans papiers privés de tous droits.
Cette manière de fonctionner ne semble plus satisfaire les appétits des employeurs, puisque les déclarations sur l’ouverture de quotas d’immigrés se sont multipliées récemment. A l’échelon national, l’inévitable Sarkozy — porte parole du MEDEF par l’intermédiaire de son frère Guillaume qui est lui-même n°2 du syndicat des patrons — a mis le pied dans le plat le premier en se déclarant favorable à l’entrée de nouveaux immigrés selon des quotas repartis par nationalité et par compétence professionnelle.
Le doigt sur la couture du pantalon, le Parti Socialiste, par l’intermédiaire de Malek Boutih, s’est aussitôt rangé à cette idée géniale. Le ministère de l’intérieur a commandé un rapport pour la fin du mois de février devant établir les besoins de l’économie française en main d’œuvre étrangère. Enfin, la commission européenne s’est lancée elle-même dans une réflexion très aboutie de quotas d’immigrés utiles pour la bonne marche de l’économie de l’union. Il ne faut pas voir dans cette nouvelle orientation un changement radical de politique et encore moins une victoire dans la lutte pour la libre circulation. Les étrangers concernés seront sélectionnés de manière rigoureuse comme au bon vieux temps des marchés aux esclaves, puis exploités le temps d’un contrat de travail précaire, avant d’être instamment invités à quitter le territoire.

La relance du discours sur les quotas d’immigrés n’arrive sans doute pas par hasard au moment où l’on parle également de plus en plus ouvertement du coût trop important du travail en France. Remise en cause des 35h (voir article page 13), menaces régulières de délocalisation, viennent constamment nous rappeler que la main d’œuvre coûte moins cher ailleurs. Désormais, elle pourrait également coûter moins cher ici même par une habile mise en concurrence des travailleurs nationaux avec les travailleurs étrangers.


OCL Paris
le 30 janvier 2005

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