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Courant Alternatif n° 262, de l’été 2016, est sorti

jeudi 14 juillet 2016, par ocl-lyon


{{Sommaire

Édito p. 3

Loi travail
p. 4 Mettre la classe ouvrière à genou
P. 4-5 Aperçus lillois du mouvement
p. 5-6 Bayonne : "jusqu’au retrait"
p. 6-7 La gauche et le maintien de l’ordre

Social
p. 8-9 De la grève générale à l’épidémie de "comorophobie" à Mayotte
p. 9 Le PS à Nantes cet été

Aménagement du territoire
p. 10-11 Grand Est : 700 km de lignes TER menacées
p. 12 NDDL : Ils ont voté... et puis après ?
p. 13-15 Démantèlement des centrales nucléaires
p. 15-16 Le réacteur 2 de Fessenheim à l’arrêt
p. 16-18 Région Grand Est : la situation du nucléaire selon l’ASN

Vertement Écolo p. 19

Capitalisme vert
p. 20-22 La centrale solaire de Ouarzazate

L’économie en brèves p. 23

Big Brother p. 24-25

Notre mémoire
p. 26 De l’Organisation Révolutionnaire Anarchiste (ORA) à l’Organisation Communiste Libertaire (OCL-2)

Sport et révolte
p. 27 Mohamed Ali : la mort d’une icone

Palestine
p. 28-31 18 jours dans la cage de Gaza

Rencontres libertaires du Quercy p. 32

{{Édito

Le réveil contre la loi « travail » et son monde  

Quel chemin parcouru depuis les premières dénonciations de l’état d’urgence (fin 2015) ! Qui aurait crû qu’il y aurait, quelques semaines après, autant de manifestations publiques massives, d’actions directes, d’initiatives, … contre la politique du pouvoir ? Et pourtant, ce pouvoir a multiplié les politiques et les lois sécuritaires, xénophobes, fondamentalement antisociales, contre les « sans dents », les exclus du développement capitaliste, depuis qu’il est arrivé aux affaires. Il a fallu attendre le projet de loi modifiant le code du travail, véritable goutte d’eau faisant déborder le vase de la soumission.
Ce mouvement social du printemps 2016 (et peut-être de l’été…) est le plus long que nous ayons connu en France et le premier se déroulant dans un contexte de gauche au pouvoir. Ce dernier fait devrait encore participer à la destruction du représentatif de leur démocratie.

Cela s’explique en premier lieu par le fait que le pouvoir politique n’a rien cédé d’essentiel sur son projet de loi mais surtout par le réveil de centaines de milliers de gens, que beaucoup croyaient endormis, qui ont réactivé la luttes des classes. De là est née une réelle détermination, un désir de lutte contre le système capitaliste rarement égalés malgré l’entêtement de ce pouvoir « socialiste », la violence de ses valets policiers et juges, les manipulations des « chiens de garde » que constituent les médias aux ordres de l’Etat et du Capital.

Il faut tout de même reconnaître que ce mouvement, si déterminé soit-il, est resté minoritaire sur le terrain des manifs (moitié moins – selon la CGT- que lors des grands mouvements précédents de 1995, 2003, 2006 et 2010) et sur le terrain des entreprises où les grèves et les blocages, n’ont jamais gêné réellement l’économie très longtemps. Les assemblées/comités de lutte ont constitué des minorités actives dans la minorité mobilisée, mais nous n’avions pas les moyens de proposer une alternative au calendrier des intersyndicales malgré l’essai de coordination nationale qui n’a eu lieu qu’en juin mais qui avait le mérite d’exister. Seules les initiatives partant des « Nuits Debout » de la place de la République à Paris (et peut-être ailleurs ?) ont échappé aux décisions de celles-ci. La répartition géographique de ce mouvement a été très inégale. Certains villes, la plupart moyennes, n’ont quasiment pas bougé, d’autres l’ont fait très ponctuellement alors que d’autres ont connu des mobilisations diverses et multiples inédites. Quant à la participation à ce mouvement, elle recouvre là-aussi de réelles disparités : au niveau des jeunes scolarisé/e/s, la participation fut inégale et beaucoup étaient là non pas en tant qu’étudiant/e/s mais en tant qu’individus précaires ou en devenir. Au niveau des salariés, nous avons pu noter la quasi absence des profs et instits (et de la fonction publique en général), mais par contre une majorité de travailleurs de PME directement concernés par l’article 2 du projet de loi donnant le primat à l’accord d’entreprise sur l’accord de branche, pour tout ce qui concerne la durée du travail.

Pourtant, le mouvement social ne s’est pas sorti de la « grève par délégation » en laissant quasiment seuls des secteurs clés ou stratégiques de l’économie (transports, producteurs d’énergie, …). Bien sûr, sans eux, nous ne pouvons pas gagner, mais avec seulement eux. Il n’est pas non plus possible de faire céder le pouvoir d’autant plus que les chiens de garde du capital montent aussitôt au créneau avec leur argumentation nauséabonde de « preneurs d’otages », sans oublier l’amplification de la peur du consommateur-spectateur par des reportages télévisuels sur la queue dans les stations services. Au niveau des blocages, si on excepte ceux qui ont été réalisé avec la participation active de grévistes qui bloquaient leur lieu de travail (comme sur Le Havre), les autres n’étaient que du symbolique. Notons tout de même que dans le symbolique, il y a deux niveaux : blocage auto-organisé sans en référer au pouvoir et à ses valets, et blocage négocié avec les flics après en avoir informé la presse plusieurs jours avant ! A noter que ce dernier niveau est une spécialité d’un certain nombre de petits bureaucrates syndicaux qui sont en relation constante avec la police politique.

Le pouvoir politique espérait que la CGT siffle la « fin de la récré » depuis le mois de mai. A la base, ceux et celles qui ont connu la fin des mouvements d’ampleur nationale des décennies précédentes, le redoutaient, surtout après la manif nationale à Paris du 14 juin. Finalement la direction de la CGT n’a pas pris cette décision qui était d’ailleurs attendue par certains et certaines responsables d’Unions Locales dépassé/e/s par la détermination de dizaines ou de centaines de personnes et qui gardent les stigmates du vieux mouvement ouvrier : respect de la hiérarchie et des institutions, réformisme, valeur travail, … En fait si nous nous référons à la note, datée du 4 mai, de la direction confédérale CGT adressée à son parlement (le Comité Confédéral National), nous nous apercevons que cette stratégie s’appuyait non pas tant sur le mouvement réel contre la loi travail mais sur l’opinion publique (les sondages donnant de 2/3 à ¾ d’opinions défavorables à cette loi) où l’image de la CGT se renforçait dans « un récent sondage BVA ».

Le pouvoir n’a plus aucune légitimité représentative de la grande majorité de la population. La gestion du pays ne peut donc se faire que par la violence de ses flics et de sa justice. En face, nous devons poursuivre la solidarité qui s’est exprimée en refusant toute dissociation, nous devons poursuivre dans le temps (car les procès vont se poursuivre pendant des mois et des mois) nos pratiques de défense collective qui sont nées au cœur de ce mouvement. N’oublions pas que nous sommes passés en quelques semaines de « nous sommes tous Charlie » à la redécouverte de la fonction primaire de la police comme force de répression au service de l’Etat et du Capital. N’oublions pas non plus les violences policières dans les quartiers populaires où des dizaines et des dizaines de personnes, très souvent jeunes, la plupart du temps issues de l’immigration, ont été tuées en toute impunité.

Il est encore trop tôt pour avoir la confirmation que le pouvoir n’a pas cédé. Mais s’il y a des « victoires » qui s’avèrent démobilisatrices, il y a aussi des « défaites » qui annoncent des luttes prolongées. Ce que nous avons vécu durant ces derniers mois est inoubliable et donne la pêche pour de futurs (et présents) combats. Cela redonne des envies de luttes collectives mais aussi de remettre au goût du jour une utopie concrète, les contours d’un projet de société.

Reims le 28 juin 2016

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