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Courant Alternatif n° 259, d’avril 2016, est sorti

lundi 11 avril 2016, par ocl-lyon


{{SOMMAIRE

ÉDITO ➤ PAGE 3

DOSSIER LOI TRAVAIL
➤ PAGE 44 Une machine à remonter le temp
➤ PAGE 8 Les réformes du travail en Europe
➤ PAGE 10 Les apprentis et les élèves des lycées professionnels également concernés
➤ PAGE 12 Accidents du travail : la loi diminue la protection
➤ PAGE 14 Des tracts ici et là

POINT DE VUE
➤ PAGE 16 Pour un boycott actif de l’élection présidentielle

SOCIAL
➤ PAGE 17 EDF ça disloncte

VERTEMENT ÉCOLO ➤ PAGE 19

ATTENTATS
➤ PAGE 20 Tous les morts ne se valent pas

L’ÉCONOMIE EN BRÈVES ➤ PAGE 22

LIVRE➤ PAGE 23

BIG BROTHER ➤ PAGE 24

IRLANDE
➤ PAGE 26 Il y a100 ans : l’insurrection de Pâques 1916 à Dublin

SOLIDARITÉS
➤ PAGE 29 Cada ruraux : des visions différentes de l’accueil des demandeurs d’asile
➤ PAGE 31 Grèce : contre la barbarie, solidarité !

{{ÉDITO

De la lutte contre la régression sociale à la reprise du pouvoir sur nos vies

Les manifestations contre la loi travail ont atteint le
31 mars, avec 1,2 millions de manifestants, une ampleur
que nous n’avions pas vue depuis longtemps,
et la mobilisation ne semble pas prête de retomber.
Cette loi, portée par la ministre du travail mais inspirée
directement par le premier ministre libéral et approuvée
par un président se prétendant socialiste, constitue une régression
sociale sans précédent en France sous un gouvernement
dit « de gauche ». Comme l’expriment certaines
pancartes dans les manifs « Sarkozy en rêvait… Hollande l’a
fait ». Hollande ne fait en cela que suivre la ligne de certains
de ses prédécesseurs européens : Tony Blair et Gerhard Schröder.
Comme eux, il a commencé par des réformes sociétales
plutôt sympathiques (mariage pour tous) avant de se lancer
dans une réforme sociale d’ampleur à l’avantage des capitalistes.

François Hollande ne nous déçoit pas ; nous n’avons jamais
cru qu’il puisse apporter quoi que ce soit au niveau d’un
progrès social. Mais en passant d’une gestion « centriste » par
rapport à la diversité des positions internes au PS à un virage
clairement libéral, il se coupe de son propre électorat. On a
pu relever dans les manifestations des déclarations comme
celle-ci : « J’ai voté Hollande aux deux tours en 2012 : Le discours
du Bourget, l’inversion de la courbe du chômage, l’ennemi
de la finance… Mais il a fait exactement l’inverse ».
C’est peut-être suicidaire sur le plan de son avenir politique,
mais il pourra toujours comme Blair ou Schröder se lancer
dans les affaires ou faire des conférences grassement
payées.

Que les syndicats les plus co-gestionnaires tels que la
CFDT se contentent d’aménagements de la loi et de reculs sur
quelques points, ce n’est pas surprenant. Ils font cela depuis
des dizaines d’années. Ils ne sont là que pour leurrer une partie
des travailleurs. Là aussi, ils déçoivent une partie de leurs
militants, et on peut même se demander comment il peut leur
en rester.

Peu nous importe aujourd’hui le sort de ces dirigeants au
service des patrons. Ce qui nous motive aujourd’hui c’est de
faire plier le gouvernement et abandonner totalement cette loi
injuste qui frappe les travailleurs actuels et à venir. Ce qui est
intéressant dans le mouvement actuel, c’est la forte mobilisation
de la jeunesse (alors que le contenu de la réforme les vise
de façon moins immédiate que lors du CPE). La majorité des
jeunes semble avoir compris que si cette réforme passe, c’est
toute leur vie qu’ils en subiront les conséquences. Cela permet
une convergence d’intérêts avec les salariés. De plus, on peut
penser que la mobilisation n’a pas encore atteint son maximum
car il est toujours aussi difficile de faire grève dans les
petites entreprises. Nous espérons que les manifestations prévues
le samedi 9 avril permettront encore d’amplifier le mouvement.

Un des aspects intéressants de ce mouvement, comme
dans la plupart des mouvements sociaux d’ampleur, c’est la libération
de la parole qu’il entraîne. Evidemment en milieu étudiant
ou lycéen lors des AG, mais également lors de forums et
de débats ouverts en fin de manifestation, tous peuvent s’exprimer
et réfléchir ensemble sur les évolutions de la lutte,
mais aussi sur les choix de société. C’est le moyen de faire
émerger des réflexions plus radicales sur les changements de
société attendus. Les slogans portés sur les banderoles ne se
contentent pas de demander le retrait de la loi (comme celles
des coordinations syndicales) ou de mettre en accusation le
gouvernement, même s’ils peuvent avoir une saveur particulière
en certains cas : « gouvernement antisocial aux bottes du
patronat » à Tulle, fief de Hollande. Les slogans peuvent lier la
lutte actuelle au refus de la répression et de l’état d’urgence,
appeler à la révolution, évoquer des thèmes de mai 68, ou tout
simplement l’espoir d’une autre vie comme l’élémentaire et
fondamental « Vivre – pas survivre ».

Bien sûr, comme dans toute lutte d’ampleur, des éléments
plus radicaux peuvent aller jusqu’à de sauvages agressions
contre des locaux du PS, du patronat ou des banques. Et en
plus ces casseurs peuvent même s’en prendre aux pauvres « forces
de l’ordre » qui ne font que leur travail. Les médias à la solde des
dominants adorent après chaque manifestation insister sur ces incidents
pour dénigrer les manifestants violents et les distinguer
tout en les liant aux manifestations « commencées pacifiquement
 ». Le summum a été atteint par l’étrange décompte établi un
matin avec 32 blessés dont 30 agents des forces de l’ordre.
Voyez comme ces casseurs sont dangereux ! Evidemment, les casseurs
sont bien le patronat et l’Etat, casseurs à la fois des
droits sociaux et des manifestants qui ne se résignent pas à
rentrer chez eux. Et tous les manifestants
blessés sont passés sous silence.

Et il est fort intéressant que les manifestants ne se résignent
pas à rentrer chez eux. Le mouvement « nuit debout » s’inspire
de façon intéressante de ce qui a pu se passer dans d’autres
pays, de « occupy Wall street » à la place Tahrir en passant par
Madrid et Istanbul. Cet entêtement à vouloir rester sur place
(et y revenir lorsqu’on en a été chassé), à vouloir montrer une
opposition déterminée, à vouloir débattre de la situation et des
actions à mener, cela peut jouer un grand rôle dans la progression
des mouvements et des idées.

Nous espérons surtout que le mouvement actuel va pouvoir
continuer à s’élargir, non seulement en terme de nombre
de manifestants, mais également sur les thèmes abordés car
pour changer le monde, il ne suffira pas de bloquer une loi de
régression sociale, il faudra imposer un renversement total de
la domination capitaliste et étatique actuelle afin que toutes et
tous, d’ici et d’ailleurs nous puissions reprendre le pouvoir
sur nos vies.

Ce numéro de Courant Alternatif, s’il est largement centré
sur le refus de la loi travail est également porteur de réflexions
intéressantes sur la volonté de reprendre le pouvoir sur nos
vies, que ce soit au travers de l’évocation historique de la révolution
irlandaise de 1916, ou de l’accueil des réfugiés. Nous
ne sommes sans doute qu’à une première étape de ce qui s’annonce
comme un renouveau des luttes. Il est nécessaire de
faire en sorte que ce chemin se poursuive.

Limoges - 3 avril 2016

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