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Courant alternatif 245

Edito et sommaire

samedi 27 décembre 2014, par admi2


SOMMAIRE

EDITO PAGE 3
DOSSIER RÉPRESSION

PAGE 4-5 Le Testet, Chronique d’une mort annoncée

PAGE 6 Manifestation nantaises sous haute tension

PAGE 7 Stratégies de peur et de mort pour imposer le projet libéral

PAGE 12 Une réaction tuée dans l’oeuf

PAGE 13 Des nouvelles d’un prisonnier anarchiste

BIG BROTHER PAGE 14
TOUCHONS LE FOND

PAGE 16 Les affres d’une presse quotidienne aspirée vers la Toile

URBANISME

PAGE 19 Boulogne ; Aménagement capitaliste de l’espace : une logique
de classe et de ségrégation sociale

ECOLOGIE

PAGE 20 Loi sur la transition énergétique : un bonus pour le lobby
nucléaire

INTERNATIONAL

PAGE 22 Réflexions et rappels sur la lutte kurde, l’enjeu de Kobané
et la solidarité

NOTRE HISTOIRE

PAGE 26 Loin de paris et des clichés, trois livres sur Marseille

EUROPE

PAGE 28 Luttes dans l’espace européen et lutte contre l’UE

L’ÉCONOMIE EN BRÈVES PAGE 32

Edito

C’est désormais un phénomène confirmé  : les Etats démocratiques se transforment et évoluent vers une spécialisation de plus en plus poussée dans la gestion policière de la société. Cette gestion par la force est conçue pour nous soumettre aux décisions prises par l’Etat au cours de processus sophistiqués censés leur donner une légitimité démocratique. Il n’est guère nécessaire de s’appesantir sur les sornettes qui sont régulièrement matraquées, à l’occasion d’échéance électorales notamment, pour nous convaincre que les institutions nous représentent et qu’elles agissent pour le bien commun. Il est à peu près clair pour tout lecteur — assidu  ! — de Courant Alternatif, que l’Etat n’est pas neutre et défend avant tout les intérêts de la bourgeoisie et de la classe dominante. Malgré tout, les lois qu’il élabore nécessitent de respecter un minimum de compromis social. Même si la balance penche toujours en faveur des classes supérieures, il est toujours nécessaire de rééquilibrer un peu dans l’autre sens pour préserver un minimum de cohésion dans la société. Sans cette cohésion, les explosions sociales seraient source de désordre et nuiraient finalement aux intérêts capitalistes. C’est pour cela que nos gouvernements ne sont jamais directement issus du MEDEF. Ils en suivent fidèlement les recommandations dans les grandes lignes (baisse du coût du travail, privatisations, …) tout en atténuant les effets (mise en place d’une couverture maladie universelle, du RSA…) Il n’est même pas rare d’assister au spectacle d’un bras de fer entre un gouvernement et le patronat. Une bonne part de mise en scène est présente dans ce genre d’affrontement, destinée justement à nous montrer que l’Etat sert encore à préserver quelque peu nos intérêts. Ce subtil compromis, reflète ainsi un déséquilibre social maîtrisé et permet la poursuite des affaires en toute tranquillité.

La période actuelle ouvre sans doute une nouvelle phase du rôle des Etats démocratiques. Nous avions vu dans le précédent numéro de Courant Alternatif que les projets de traités de libéralisation des échanges commerciaux entre l’Europe et l’Amérique, de type TAFTA, introduisent une nouvelle forme d’ordre juridique. Ces traités vont avoir pour effets de donner au libre marché valeur de loi universelle supérieure, primant sur toutes les réglementations internes aux Etats. C’est dans cette logique que les litiges impliquant des entreprises seront tranchés par une justice privée, composée principalement de personnes issues des milieux d’affaire, chargées de vérifier uniquement la conformité aux accords de libre-échange et non le droit interne instaurant éventuellement des mesures de protection, à l’égard des salariés ou de l’environnement par exemple. Le monde des grandes entreprises marque ainsi un point supplémentaire dans sa volonté hégémonique de soumettre les institutions politiques à ses désidératas. Si on pouvait encore en douter, il est parfaitement clair que le compromis social actuel a du souci à se faire  ! — eh oui ce compromis existe encore un peu et permet que nous ayons toujours un SMIC et une sécu. Dés lors, dans la nouvelle configuration qui se profile, à quoi serviront les Etats  ? Comme auparavant ils seront chargés d’appliquer par la force les décisions prises en haut lieu, à la différence près que ces décisions ne seront plus issues du compromis précédent, mais de la seule volonté du capital, qui se contrefout des injustices, inégalités et désordres générés. Par conséquent, les Etat seront contraints d’augmenter substantiellement le niveau de contrainte sur leur population pour imposer ces décisions et, inévitablement, le niveau de violence de ses forces répressives.

Cette évolution a déjà commencé, il n’y a qu’à se pencher sur le quadrillage policier mis en place dans les quartiers populaires depuis plusieurs année afin de contrôler les « classes dangereuses  ». Ce sont des zones de « non droit  », comme les journalistes aiment les dénommer, mais plutôt dans le sens où ceux qui y vivent subissent le harcèlement quotidien de la police et ne sont pas à l’abri d’une « bavure  » éliminatoire. Aux Etats-Unis la gestion de la société passe entre autres par une politique d’enfermement massif des classes dangereuses et les jeune afro-américains y sont emprisonnés à hauteur de 10%. Les crimes policiers contre les jeunes de banlieue en France sont devenus monnaie courante. Cette guerre de basse intensité expérimentée contre les « classes dangereuses  » est maintenant étendue à la répression contre les mouvements qui dérangent les institutions  : Notre Dame des Landes et le Chesfrene en premier lieu, mais aussi de plus en plus contre les luttes d’usine, syndicales donc. Dans ce contexte, l’assassinat de Rémy Fraisse peut bien être qualifié d’accident, mais un accident prévisible, un risque mortel pris consciemment par les autorités quand elles équipent la police des fameuses armes « non létales  », par le type d’ordre qui est donné aux forces armées, par les interdictions de plus en plus nombreuses de manifestations et de rassemblements. C’est par la terreur que le pouvoir entend imposer son ordre social dans les quartiers populaires, c’est par la terreur qu’il tente de dissuader les résistances organisées en envoyant un signal  : manifester est devenu risqué pour quiconque remet en cause l’ordre social et politique, seule l’opposition officielle, celle qui collabore avec les institutions, est tolérée.

Paris

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