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Italie

Vague d’occupations de logements à Bologne

jeudi 21 novembre 2013, par WXYZ

Au cours du mois dernier, Bologne a été secouée par une vague d’occupations de logements. Ces occupations doivent être comprises dans le contexte des semaines nationales d’action qui ont culminé avec la manifestation nationale du 19 octobre à Rome.
Ces occupations, menées dans un certain nombre de quartiers de Bologne, impliquent une variété de mouvements populaires de base.


Au cours du mois dernier, Bologne a été secouée par une vague d’occupations de logements. Ces occupations doivent être comprises dans le contexte des semaines nationales d’action qui ont culminé avec la manifestation nationale du 19 octobre à Rome (voir à ce sujet : 18/19 octobre. Mobilisations contre l’austérité et recomposition sociale).

Les occupants justifient leurs actions comme étant des réponses à ce qu’ils décrivent comme une situation d’urgence en matière de logement.

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L’ASIA-USB (un syndicat de base à la pointe du mouvement pour le logement) cite les chiffres suivants au sujet de Bologne à partir de 2012 : environ 1000 familles ont reçu une ordonnance d’expulsion et près de 10.000 demandent un logement social ; par contraste, 7.000 appartements privés et 225 unités de logements sociaux du parc public restent vacants dans cette ville de 380 000 habitants (au centre d’une aire urbaine de près d’un million de personnes).

Le manque de logements abordables à Bologne est devenue une question clé depuis près de deux décennies. Bien que les militants sur le logement avaient dénoncé la situation depuis un certain temps, la question n’est devenue publique dans la presse locale mainstream qu’en 2009, après que Nomisma (un cabinet de consulting économique travaillant à l’échelle du pays mais basé à Bologne) ait publié un rapport détaillé sur le logement en Italie. Le rapport montrait qu’entre 1991 et 2009, il y a eu une augmentation de près de 100 % du prix des maisons à Bologne et une augmentation de 75% des loyers, contre une augmentation moyenne des revenus de seulement 18%.

<img2495|right>Les politiques locales en matière de logement n’ont fait qu’empirer la situation au lieu de l’améliorer, même à la marge. Valerio Monteventi, militant et ancien conseiller de Bologne, a souligné dans un rapport détaillé publié en 2010, que les autorités locales étaient incapables de répondre aux besoins des citadins les plus vulnérables – migrants, étudiants et ménages à faibles revenus. Les politiques du logement locales n’ont pas cherché à promouvoir la construction de résidences étudiantes et de logements collectifs bon marché et n’ont pas non plus été capables de rendre entièrement habitables les appartements existants dans le parc du logement social public.

Il y a des occupations dans un certain nombre de quartiers de Bologne, qui impliquent une variété de mouvements populaires de base.
Dans le centre-ville, l’ASIA-USB, avec une douzaine de familles déjà expulsées de leurs maisons, a occupé un grand projet de logements abandonnés.

<img2496|left>Toujours dans le centre, le « Làbas Occupato » (un collectif étudiant actuellement basé dans une ancienne caserne occupée) a lancé un projet appelé « crowdhousing » - une opération de rénovation immobilière auto-organisée et coopérative d’une partie de la caserne pour la rendre habitable, en particulier pour les étudiants.[1]

Une autre action, en réponse principalement aux besoins massifs de logement de la nombreuse population étudiante de Bologne, est le « Studentato Occupato Taksim » (Résidence étudiante occupée Taksim). Le Studentato a été ouvert par le Collettivo Universitario Autonomo (CUA), un collectif militant étudiant inter-fac, dans l’ancien internat d’un couvent situé à la périphérie de Bologne et qui était vide depuis plus de trois ans. Ils inscrivent cette occupation dans une lutte contre l’augmentation du coût des études, des frais universitaires, les prix de plus en plus élevés des cantines étudiantes, l’accès possible uniquement à des résidences étudiantes de luxe et pour répondre à leurs besoins d’espaces de socialisation auto-organisés.

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Une deuxième action à la périphérie a été l’occupation d’un immeuble résidentiel privé dans le quartier de Bolognina. Bolognina (“la petite Bologne”) est un quartier ouvrier traditionnel et historique, actuellement au centre de plusieurs grands projets de « régénération » et de rénovation urbaine massive (avec beaucoup de tertiaire) qui conduiront à une gentrification à grande échelle et l’incorporation de ce vaste quartier, qui jouxte le centre historique de la ville au nord de la gare ferroviaire et des voies ferrés, dans un nouveau centre urbain, complètement redimensionné et beaucoup plus étendu, de la métropole.
Les déclarations publiques des occupants ont explicitement désigné leurs actions comme une forme de lutte contre ce processus plus large : « L’immeuble a été occupé pour résoudre les besoins de logement de beaucoup d’entre nous, qui sont sans maison ou fatigués de payer des loyers exorbitants à Bologne, mais aussi de faire un premier pas concret dans la lutte contre la requalification de Bolognina. En effet, cette zone excite depuis un certain nombre d’années, les appétits d’affairistes et de spéculateurs qui, sous la direction de l’administration municipale, visent à transformer un quartier populaire en nouveau centre d’affaires de la métropole qui vient. Á coup d’expulsions, de projets de méga-infrastructures, de centres commerciaux et de descentes de police. »

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Bien que tolérant relativement la plupart des nouvelles occupations, le conseil municipal a expulsé celle de Bolognina. L’expulsion a été réalisée sans aucune solution de relogement pour les occupants.
Quelques jours plus tard, les occupants expulsés ont entamé une deuxième action dans un autre immeuble privé vide, toujours dans Bolognina. Les occupants ont été de nouveau expulsés et plusieurs des activistes impliqués – qui ont réussi à retarder le processus d’expulsion plus de 20 heures en grimpant sur le toit du bâtiment – ont reçu un ordre d’expulsion de Bologne[2]. Malgré cela, les activistes impliqués dans cette action ont, dans leur dernière déclaration publique, exprimé leur satisfaction. Les occupations, écrivent-ils, sont un « message clair aux autorités de Bologne », elles « continueront et les expulsions seront de plus en plus rugueuses. Nous verrons qui se lassera le premier ».

Le 19/11/2013

(d’après Struggles in Italy, Informa-azione.info…)

XYZ pour OCLibertaire

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Notes

[1] Ils le définissent comme « une pratique collective, diffuse et coopérative de réappropriation et de requalification des espaces urbains à des fins résidentielles. Une pratique qui contourne et se bat contre la spéculation et la rente immobilière, en construisant (littéralement) d’en bas le droit au logement ».
[2] La législation italienne en matière répressive dispose d’un vieil outil redoutable, le bannissement, le « foglio di via », l’avis d’expulsion qui permet d’interdire à des personnes précises de voyager dans une région dont elles ne sont pas originaires et cela pendant des durées de plusieurs années. Généralement utilisé en matière de maintien de l’ordre et de gestion des manifestations, c’est devenu une manière habituelle d’éloigner les gêneurs, les militants et les personnes actives et solidaires de certaines zones de conflit, comme le Val de Susa ou d’autres régions connaissant des conflits sociaux. Ainsi, trois militants des syndicats de base actifs dans le secteur conflictuel de la logistique sont interdits de séjour pendant trois ans dans la province de Piacenza, ainsi des militants des luttes sur le logement de la ville de Florence ont interdiction de se rendre à Rome, etc.)


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