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Edito 173 Octobre 2007

mardi 16 octobre 2007, par Courant Alternatif


La rupture ? Chiche !

La « rentrée sociale est attendue » ! Le pouvoir, requinqué par le succès participatif aux dernières élections, a, de son point de vue, les coudées franches pour « réformer ». Tout va désormais très vite. Après le moment d’affrontement démocratique et citoyen du printemps entre fractions de la bourgeoisie pour la prise du pouvoir politique et la gestion du capital national, Sarkozy a commencé par inviter certaines « personnalités » du camp défait à collaborer. Ce fut un succès qui traduit simplement le fait que toute la classe politique a fondamentalement le même projet de société, les joutes oratoires droite/gauche ne portant que sur des nuances de gestion. L’essentiel n’est-il pas de « servir la France » ? Cette « ouverture » n’est pas une nouveauté puisqu’elle fut initiée dans les années 80 par l’un des plus grands politiciens de l’Histoire de France, un certain F. Mitterrand, qui avait compris que pour garder le pouvoir le plus longtemps possible il fallait constituer un consensus le plus large possible !
Puis, les réformes annoncées ont commencé à tomber dès le mois de juillet. Les réformes, leitmotiv de tous les gestionnaires de l’Etat, sont toujours conçues pour faire baisser le coût du travail, éliminer les « archaïsmes » qui freinent le développement, gagner la lutte des classes (dont on nie par ailleurs l’existence) en mettant au pas tout mouvement social qui pourrait naître et plus globalement encadrer, réprimer et casser tous ceux et toutes celles qui ne sont pas dans « les clous ». C’est ainsi que nous avons eu droit à une loi « sur la récidive » qui vise à traiter pénalement les mineurs de 16 ans comme des adultes, la loi de débridage des heures supplémentaires permettant essentiellement d’abaisser les cotisations sociales patronales (le coût d’une HS sera identique à celui d’une heure normale), la loi relative à « l’autonomie » des universités qui verront leur dépendance vis-à-vis du patronat s’accroître et enfin la loi contre le droit de grève dans les entreprises de transports terrestres.
Cette dernière intitulée « loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs » était à l’étude depuis les grèves de 1995. En France, les grèves quasi générales dans les transports ou dans le secteur de l’énergie sont les seules à pouvoir entrainer à brève échéance la paralysie de l’économie capitaliste. C’est ainsi que, par cette loi, le pouvoir s’est attaqué au droit de grève dans le secteur des transports terrestres (SNCF, RATP et l’ensemble des transports urbains) afin de faire respecter la liberté de circulation, la liberté du travail et ... « la liberté du commerce et de l’industrie ». Sans entrer dans les détails, avant de déposer un préavis de grève 5 jours avant le début éventuel de celle-ci, les organisa-tions syndicales représentatives déposeront à l’employeur une notification des motifs pour lesquelles elles envisagent de déposer le préavis de grève entraînant une négociation obligatoire dans les 8 jours. En d’autres termes, toute grève décidée par une assemblée générale sera interdite pendant... 13 jours. Mais là n’est peut-être pas le plus grave. En effet, les travailleurs qui désirent faire grève devront se faire connaître individuellement auprès de leur hiérarchie directe 48 heures avant le début de celle-ci sous peine de sanctions disciplinaires s’ils font grève sans l’avoir annoncé ! Ces 48 heures doivent permettre l’organisation d’un service minimum. Pour organiser celui-ci, l’employeur et les organisations syndicales représentatives doivent « engager des négociations en vue de la signature, avant le 1er janvier 2008, d’un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève ». Ces syndicats sont donc invités à cogérer le service minimum... Pour terminer, au-delà de huit jours de grève, l’employeur, une organisation syndicale représentative ou le médiateur « peut décider l’organisation par l’entreprise d’une consultation ouverte aux salariés concernés par les motifs figurant dans le préavis et portant sur la poursuite de la grève ».
Cette loi n’est pas une surprise elle reprend d’ailleurs les grandes lignes de la législation en vigueur dans un certain nombre de pays européens. Dès maintenant, dans ce secteur sensible, la grève sera illégale ou ne sera pas ! (*) Elle ne concerne aujourd’hui que le secteur des transports ter-restres mais si nous ne réagissons pas, elle se généralisera petit à petit. N’oublions pas, tout de même, que ce n’est pas leur légalité qui empêchera les futurs mouvements sociaux d’éclore, qui seront peut-être plus rares mais certainement plus déterminés.
Dans la foulée, le pouvoir a décidé d’harmoniser par le bas les retraites en s’attaquant aux régimes spéciaux. Nous devons être bien conscients que le pouvoir veut supprimer tout avantage acquis dans les luttes afin de s’attaquer aux retraites de tous et toutes en 2008. Ses objectifs sont de continuer à nous contraindre à travailler au-delà de 60 ans par des pensions de plus en plus faibles rendant ainsi indispensable, pour les jeunes générations, la retraite par capitalisation.
Face à ces attaques sociales la riposte, par la grève, s’impose ! Les cheminots, les plus attaqués, sont en train de se mobiliser. La généralisation de ce mouvement à d’autres secteurs est loin d’être évidente, d’autant plus que le gouvernement peut compter sur les médias et quasiment toute la classe politique pour faire croire que ces travailleurs en lutte sont d’affreux individualistes privilégiés. Mais, ce n’est pas impossible à condition que d’autres revendications apparaissent. Avec tous les cadeaux que ce pouvoir fait à la bourgeoisie (une quinzaine de milliards prévus dans un premier temps), les revendications salariales sont tout à fait d’actualité, d’autant plus qu’il y a de gros risques que l’Etat nous impose une nouvelle politique de rigueur. En effet, la croissance espérée pour financer les cadeaux à la bourgeoisie ne sera pas au rendez-vous. Attendons nous au pire !

OCL/REIMS, le 23/09/07.

(*) Actuellement, des rencontres ont lieu afin d’organiser une importante mobilisation exigeant l’abrogation de cette loi.

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