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Courant alternatif 285 - novembre 2018

Le retour de la question macédonienne dans la politique grecque

mercredi 26 décembre 2018, par admi2


Le retour de la question macédonienne dans la politique grecque

Pour le nationalisme grec il n’est de Macédoine que grecque. Qu’une province de l’ex-Yougoslavie devenue indépendante s’autoproclame Macédoine et voilà que resurgissent les vieux démons hellènes, attisés certes par l’extrême droite, mais surtout venant à point pour remettre au second plan la question sociale qui embrasait le pays depuis quelques années.

Intérêt national et intérêt du capital

« La politique étrangère de la Grèce sur la question de Skopje s’est orientée de telle manière que la forme l’a complètement emporté sur le fond. Au lieu de poursuivre une politique de coopération/intégration économique avec nos voisins du Nord (principalement avec la Macédoine) qui aurait fait de Thessalonique le centre économique des régions du nord des Balkans, donnant ainsi de fait à notre pays le contrôle effectif sur les divers nationalismes slaves, toutes les actions du gouvernement comme de l’opposition se sont fixées sur le mot même de Macédoine. »

Cette citation provient d’un article datant de 1992, écrit par Nikos Mouzelis et publié en deux parties dans le journal To Vima des 23/8/1992 et 30/8/1992. To Vima est un journal bourgeois proche du PASOK [Parti socialiste], dont il exprime le point de vue concernant une modernisation de la Grèce calquée sur le modèle de l’Europe occidentale.

Alors que l’analyse de Mouzelis allait exactement dans le sens des intérêts de l’État grec, pourquoi c’est la fixation sur le mot même de Macédoine qui l’a emporté ? Quand Helmut Kohl et Giulio Andreotti interrogèrent à Bonn, le 14/1/1992, le Premier ministre grec de l’époque, Konstantinos Mitsotakis, sur les raisons pour lesquelles l’Allemagne et l’Italie ne devraient pas reconnaître la République de Macédoine en tant que nouvel État indépendant, sa réponse fut simplement que si la Macédoine était reconnue sous ce nom, son gouvernement s’effondrerait. Le système politique grec était alors en pleine crise [1]. La prétendue « question macédonienne » fut donc une occasion inespérée d’établir à nouveau l’unité nationale et de stabiliser le système politique. Le gouvernement grec s’est ainsi opposé à la reconnaissance de la République de Macédoine nouvellement créée, affirmant que la seule Macédoine était la Macédoine grecque, et il a contribué à l’organisation des manifestations anti-macédoniennes de 1992.

Ce refus de reconnaître la Macédoine n’était pas une décision prise en fonction des intérêts de la politique étrangère et des relations du capital grec avec son État. Il était lié à une question intérieure, c’était une tactique pour ressouder une nation secouée par une intense lutte de classe. Le caractère massif des manifestations anti-macédoniennes servit cet objectif, mais après que la situation se fut stabilisée, l’État grec était prêt à reprendre ses relations avec la Macédoine, tout en gardant de fait une position stratégique hégémonique. Depuis 1994, le nouveau politiquement correct adopté par tous les gouvernements grecs sur cette question n’est pas de s’opposer à toute utilisation du terme Macédoine, mais que le mot s’impose aux yeux de tous comme une appellation essentiellement géographique.

Les manifestations de 2018

En 2018, alors que les deux pays sont sur le point de trouver une solution, l’État grec récolte ce qu’il a semé en 1992 : de nouvelles manifestations anti-macédoniennes sont apparues, qui n’ont peut-être pas été aussi massives que celles de 1992, mais elles ont été les plus grandes en Grèce de ces dernières années, comparables à celles de 2015 à propos du référendum (*) Deux d’entre elles ont été particulièrement significatives quoique bien différentes : celle de Thessalonique et celle d’Athènes, au début de 2018. Dans les deux cas, les évêques des églises locales et les officiers de réserve ont joué un rôle déterminant, mais à Athènes les principaux organisateurs ont tenté de l’élargir autant que possible au-delà des nationalistes traditionnels. Ils ont fait du compositeur Mikis Theodorakis l’orateur central de la manifestation. Ce dernier, malgré son virage à droite depuis les années 90, est toujours considéré comme associé à la gauche en raison de son histoire et de ses liens avec le Parti communiste grec. Certains partis nationalistes de gauche tels que LAE (Unité populaire), d’anciens membres de SYRIZA et de plus petits groupes de la gauche extraparlementaire ont trouvé suffisamment de raisons pour participer à cette manifestation. Les organisateurs ont également condamné toutes les attaques fascistes à Thessalonique comme à Athènes, affirmant qu’ils n’avaient aucune affiliation avec Aube dorée ou d’autres organisations de droite, ni avec aucun parti politique en général. De nombreux dirigeants politiques tels que l’ancien Premier ministre grec Antonis Samaras [Président de Nouvelle démocratie – ND, droite –et Premier ministre de 2012 à 2015], Vasilis Leventis (président de l’Union des centristes), Adonis Georgiadis (vice-président de ND) et Nikolaos Michaloliakos (secrétaire général d’Aube dorée) ont également pris part à la manifestation [2].

Bien que les principaux organisateurs aient insisté sur le fait qu’il ne fallait absolument pas utiliser le terme de Macédoine, de nombreuses organisations politiques présentes à la manifestation d’Athènes ne se sont pas pliées à cette injonction. Certaines ont soutenu la manifestation en évoquant un supposé irrédentisme de la part de la Macédoine, d’autres ont trouvé là une occasion de faire pression sur le gouvernement pour obtenir des élections anticipées, d’autres encore y ont vu une occasion d’empêcher la Macédoine de devenir membre de l’OTAN et de l’Union européenne, d’autres enfin ont établi des liens abstraits entre les manifestations anti-macédoniennes et les manifestations anti-Memoranda [ce sont des plans de sauvetage négociés que le gouvernement grec se doit de mener à bien] via la question de la souveraineté nationale.
Le poids de cette extrême diversité d’expressions nationalistes a finalement fait imploser la manifestation d’Athènes ; face à tous ces intérêts et ces idées dont beaucoup se contredisent, quelle pourrait être la principale revendication d’une future manifestation ? Une tentative pour en organiser une similaire à Patras a échoué en raison de désaccords entre les organisateurs [3].

SYRIZA surfe sur la « nationalisation » du mouvement social

Nous avons dit que l’État grec récoltait maintenant ce qu’il avait semé en 1992. Il serait pourtant insuffisant d’attribuer les expressions actuelles d’« antimacédonisme » à ce seul « lointain » passé. Le sentiment qui domine dans ces manifestations est qu’utiliser le nom même de Macédoine menace la souveraineté nationale de la Grèce. Cette remise en question de l’identité et de la souveraineté nationales grecques par un certain irrédentisme macédonien abstrait ne réside peut-être que dans la tête des manifestants anti-macédoniens. En effet, depuis 2010, la perte réelle de la souveraineté nationale à cause des mémorandums a été le thème principal de tous les événements majeurs en Grèce. Bien sûr, la vérité est que cette perte a été volontairement réalisée au nom de l’État grec, et que pour tous les États membres de l’UE c’est une réalité dès le premier moment de l’entrée dans l’UE. Mais vous avez beaucoup plus à gagner à entrer dans une coalition qu’à rester seul.

Les manifestants accusent les gouvernements ayant voté le mémorandum d’être des « traîtres » soutenant les « intérêts de l’Allemagne », ce qui est un non-sens absolu. Alors que, quand la récession et la crise se sont aggravées, l’État est apparu comme ce qu’il est réellement en supprimant explicitement toute possibilité de prise de décision des citoyens, et en créant ainsi une rupture entre eux et la représentation parlementaire, les oppositions ont pris une teinte nationaliste dirigée contre le régime supranational du marché européen. Mais, en réalité, les mesures votées par le Parlement avaient été désirées par les fractions dirigeantes de la bourgeoisie grecque pendant des années. Ce n’est qu’ en jouant sur la perte d’une partie de la souveraineté nationale et l’urgence liée à la crise que le gouvernement a pu faire passer ces lois malgré les troubles populaires. En conséquence, Merkel a été déclarée par beaucoup l’ennemi absolu de la nation, tandis que l’État et le capital écartaient non seulement la classe ouvrière, mais également les fractions du capital qui n’étaient pas suffisamment compétitives. C’est sur cette « nationalisation » du conflit social que SYRIZA et l’ANEL ont surfé, et c’est elle qui leur a permis d’arriver au pouvoir. Le discours dominant du conflit social est devenu celui sur les « Germanotsoliades » [4] et les « traîtres à la nation » contre les gouvernements votant le mémorandum. Au sein du mouvement plus vaste contre l’austérité – les indignés de la place Syntagma, les assemblées de quartier, les comités contre le haraç [5], etc. –, SYRIZA et l’ANEL ont activement défendu un discours nationaliste aboutissant à la demande de rétablissement de la souveraineté nationale sous le nom de « démocratie réelle ».

Aux yeux du peuple grec, ce n’est pas une mince affaire que de voir dans le gouvernement des personnes qui, jusqu’à hier, étaient sur les routes et sur les places avec eux ; en fin de compte, cela diminue la distance entre ces gens et l’État. C’est la preuve la plus tangible, mathématique, de la victoire du populisme en tant que mouvement permettant que renaisse une volonté de lutte contre les « Allemands » et les « usuriers ».

Néanmoins, une des particularités historiques du gouvernement de coalition SYRIZA-ANEL tient à la rapidité avec laquelle le mouvement des places s’est coulé dans le moule étatique, la définition de l’intérêt national vu comme intérêt populaire ayant été abandonnée au profit d’une définition d’intérêt d’État, en quelques mois, et à travers un processus « démocratique » par excellence comme le référendum. Le mouvement des places de la période 2010-2012 lui-même pouvait vouloir simultanément la Grèce au sein de l’UE, l’euro comme monnaie, et rejeter la troïka et les coupes budgétaires. Le gouvernement de coalition SYRIZA-ANEL a reflété le point culminant de ces contradictions qui, à l’été 2015, ont entraîné son implosion démocratique. Contradiction entre une coexistence, simultanée mais instable, d’une realpolitik nationaliste d’État qui reconnaît que, sans l’intervention de la BCE et son crédit au système bancaire grec (avec un intérêt inférieur à celui des marchés internationaux afin de maintenir un niveau de liquidités adéquat), l’État aurait fait faillite, avec des conséquences analogues à celles de l’Argentine, et un nationalisme populaire et « indigné » où toute référence concrète aux intérêts des travailleurs a été abandonnée. Bien sûr, aucun mot sur les relations de pouvoir sexistes et raciales. Avec ou sans Grexit, tous ceux qui se sentent une fibre nationale et sont en haut de la pyramide sociale savent très bien qui doit subir les chocs violents de la sortie de crise quand ils disent : « Les premières années seront difficiles, mais la croissance viendra ensuite. » Il s’agit principalement des migrants.

Il est fini le temps de la solidarité avec les migrants

La phase de l’« euphorie humanitaire » est révolue depuis longtemps. La plupart des abris initialement « ouverts » sont devenus « fermés » ; beaucoup de migrants qui y habitent ne sont pas autorisés à en quitter les limites, et l’entrée en est interdite à ceux qui « n’ont pas de travail là-bas » (la police contrôle les autorisations à entrer ou non). La plupart des abris sont construits par l’armée, qui en assure la gestion. Des soldats et des policiers sont placés à l’intérieur pour surveiller ceux qui y résident. Les ONG, qui jouaient au début un rôle central dans la gestion des migrants, sont maintenant pour la plupart soit en train de démissionner pour protester contre leurs mauvaises conditions de vie, soit évincées par l’État. L’interaction entre les migrants et les civils est devenue quasi interdite : la police et l’armée sont les seuls responsables de la gestion des migrants. Les civils appartenant à des ONG ou à des groupes auto-organisés qui en sauvent en mer après des naufrages sont maintenant persécutés, traduits devant les tribunaux et accusés de « participation à la traite des êtres humains » pour les avoir aidés à pénétrer illégalement dans le pays.

Au cours des derniers mois, plus de 15 actes racistes ont été officiellement enregistrés à Chios, Samos et Lesbos, des îles où des migrants sont détenus. Cela va de proclamations racistes venant de responsables municipaux à des attaques contre les manifestations de migrants par des milices autoproclamées : les luttes des migrants ne sont pas réprimées uniquement par l’État mais aussi par des associations locales d’habitants. À l’époque de l’« euphorie humanitaire », lorsque la Grèce avait ouvert ses frontières septentrionales pour permettre aux migrants de poursuivre leur voyage vers d’autres pays de l’UE, ces associations locales étaient la plupart du temps amicales envers ceux qu’elles considéraient comme des portefeuilles ambulants : la Grèce était simplement un pays de transit où ils restaient quelques jours ou quelques semaines, ils étaient donc surtout perçus comme des acheteurs de produits de base (qui leur étaient vendus très cher). Maintenant que la Grèce est devenue l’un des centres de rétention de l’UE, l’attitude des habitants envers eux a changé et est devenue ouvertement raciste. Aucune solidarité ne vient du prolétariat national, à l’exception de certains groupes locaux d’anarchistes et de gauchistes. Et, malheureusement, les conflits violents entre différents groupes ethniques et religieux de migrants vivant dans les mêmes camps et centres de détention ne sont pas moins fréquents que leurs luttes pour satisfaire leurs besoins.

L’accord de Prespa en Macédoine

En Macédoine, l’opposition à l’accord de Prespa [selon cet accord, entre autres, l’appellation République yougoslave de Macédoine (FYROM) doit changer en République de Macédoine du Nord] est également contrastée. Il y a bien sûr les nationalistes traditionnels de droite. Mais il existe également des organisations de gauche macédoniennes (Levica, par exemple) qui s’opposent à l’accord au nom du droit démocratique à l’autodétermination, ou simplement par tactique anti-impérialiste pour empêcher leur État d’entrer dans l’OTAN et l’Union européenne [6]. Il est vrai que l’accord de Prespa sert de facto les intérêts de l’OTAN et de l’UE en ouvrant la voie à l’intégration de la Macédoine dans les coalitions occidentales contre les influences de la Russie et de la Turquie dans les Balkans. Il est révélateur qu’Ivan Savvidis, le tristement célèbre homme d’affaires gréco-russe étroitement lié à Poutine et très présent à Thessalonique, ait financé des groupes de droite macédoniens pour protester contre cet accord. Certaines organisations de gauche grecques et anarchistes ont également choisi de s’opposer cet accord par tactique anti-impérialiste contre l’expansion de l’OTAN et de l’UE dans les Balkans. Le principal problème de ce discours anti-impérialiste est qu’il considère les gouvernements grec et macédonien comme des agents de l’impérialisme occidental, sans prendre en compte les intérêts des deux États et de leurs bourgeoisies. L’intérêt national d’un État ne peut être défini uniquement par sa politique intérieure, il doit tenir compte de la place de cet État dans la hiérarchie internationale. Entrer dans l’un des « clubs d’élite » tels que l’OTAN et l’UE est un objectif important qui ne peut être ignoré dans une realpolitik nationaliste.

Lors du vote du Parlement macédonien en faveur des changements constitutionnels, certains membres de VMRO (Organisation révolutionnaire macédonienne intérieure, droite conservatrice très nationaliste, participe à une coalition au pouvoir) se sont prononcé contre la politique de leur parti visant à appliquer les changements nécessaires pour que l’accord prenne effet. De ce fait, ce parti, dominant de la vie politique macédonienne, est en train de se déliter ce qui va entraîner une redistribution des cartes dans toute la vie politique du pays.

La question macédonienne va passer au second plan, pas le nationalisme

Selon le dernier numéro de l’Autorité de statistique hellénique [9], pour l’année 2017, le PIB grec a augmenté de 1,5 %, le taux de chômage annuel moyen est de 21,5 %, et la dette brute de 176,1 % du PIB. Bien que cela puisse sembler contradictoire à ceux qui ne vivent pas en Grèce, les courbes économiques les plus crédibles (principalement celles qui traitent du taux de croissance de la demande intérieure, du taux de croissance des importations et des exportations, de la valeur ajoutée brute) montrent que l’économie grecque s’est progressivement stabilisée à un niveau inférieur à celui d’il y a dix ans, après que le PIB ait diminué de près de 30 % de 2007 à 2017. Mais il est difficile de faire le grand bond en avant en matière de développement capitaliste, les perspectives ne sont bonnes pour personne. Le gouvernement SYRIZA-ANEL a beaucoup contribué à la réalisation de cet objectif en étouffant les conflits sociaux, et en s’efforçant de coopérer avec les fonctionnaires de l’UE afin de moderniser la politique fiscale et le mécanisme de l’État. C’est à partir de ces données qu’on peut expliquer le retour de la question macédonienne ici en Grèce, car les liens politiques et financiers avec l’Occident, en particulier l’UE, sont beaucoup plus forts maintenant, mais aussi les liens militaires : n’oublions pas que, pour la première fois, ce sont des frégates européennes qui ont patrouillé le long des frontières avec la Turquie [10] afin d’empêcher les migrants de les franchir. Après la récente démission de Nikos Kotzias [11], ministre grec des Affaires étrangères et architecte de l’accord de Prespa, SYRIZA a annoncé l’extension prochaine des eaux territoriales grecques à 12 milles marins, et, contrairement aux accusations des nationalistes de droite, Syriza se présente comme le véritable défenseur de l’intérêt national contre la Turquie, avec laquelle il y a plus de deux décennies de différend à propos des eaux territoriales. À l’approche de la triple élection (locale, parlementaire et européenne) censée avoir lieu au printemps 2019, il est inévitable que le nationalisme revienne à l’ordre du jour de la haute politique, sans pour autant penser que la question macédonienne restera non résolue. Comme aucune perspective sociale réelle n’est en jeu, il reste à voir si un nationalisme d’en bas peut émerger à sa place, mais cela ne semble pas avoir de réelles possibilités.

Athènes, le 10 novembre 2018
Makis-Giorgos

Traduction JPD (Les précisions entre crochets et italique, les renvois avec un * ainsi que les intertitres et l’introduction sont du traducteur)

Notes

1. Nous ne pouvons pas entrer ici dans les détails, mais durant ces années de graves scandales politiques sur la corruption ont éclaté, alors que se déroulaient des grèves massives et vigoureuses, principalement des travailleurs de la DEI (la société publique nationale d’électricité) contre les licenciements et d’EAS (entreprise nationale de transport urbain) contre sa privatisation et les licenciements.

(*) Suite à l’échec des négociations avec la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le FMI le gouvernement Tsipras organise un referendum portant sur l’acceptation ou non de la proposition de cette troika. Le non l’emporte avec 61 % des voix et sonne comme une victoire pour Tsipras.

2. Ajoutons que les deux manifestations, à Thessalonique et à Athènes, n’étaient pas identiques en termes de participation. À Thessalonique, les appels à manifester sont passés par des associations culturelles, des groupes Facebook, des syndicats défendant « la Macédoine est grecque », etc., ainsi que des clubs de football, des maires de villes du nord de la « Grèce grecque macédonienne », de nombreux évêques locaux, etc., suivis plus tard par des partis appartenant à l’opposition. La manifestation à Athènes a quant à elle résulté surtout d’une agitation politique, émanant principalement de groupes et de partis d’extrême droite. Dans les deux cas, cependant, l’atmosphère évoquait davantage un rassemblement d’indignés, un rassemblement patriotique classique, qu’un ensemble d’attitudes et d’expressions « fascistes ».

3. Cette incapacité à reproduire la série de manifestations de masse de 1992 traduit les limites et, pour être clair, l’absence ou l’impossibilité d’un « nationalisme d’en bas », à la fois structurel et historique. Structurel, car il ne peut s’affirmer sans se connecter à l’État. Historique, parce qu’il a changé de forme et de contenu au cours de l’Histoire, le cas grec le montre : les immigrés constituant une partie importante du prolétariat, le nationalisme ne peut véritablement intégrer l’ensemble des aspirations prolétariennes et donc exprimer la question sociale dans son ensemble. C’est pourquoi, de nos jours, il apparaît forcément publiquement comme une expression du populisme, un privilège réservé aux « citoyens autochtones », avec sa composante raciste bien vivante. Comment pourrait-il en être autrement dans un contexte où l’État grec occupe une position spécifique dans la division européenne du travail en ce qui concerne les « flux migratoires » ?

4. Ce terme péjoratif grec désigne les bataillons de sécurité, groupes militaires grecs ayant collaboré avec l’Allemagne et l’Italie lors de l’occupation de la Grèce par l’Axe.

5. Nom populaire donné à l’ENFIA (impôt unique sur la propriété foncière). Le véritable haraç était une taxe foncière prélevée sur les non-musulmans de l’Empire ottoman. L’utilisation de ce terme traduit la crainte d’une menace nationale émanant d’un ennemi national indéterminé.

6. Voir cette interview avec Levica sur http://www.criticatac.ro/lefteast/l....
7. Voir http://www.balkaninsight.com/en/art....
8. Voir http://www.balkaninsight.com/fr/art....
9. Voir http://www.statistics.gr/documents/... 96d- acef-46c1-9009-b5b375743ac5.
10. Voir par exemple https://www.theguardian.com/world/2....
11. Voir https://www.naftemporiki.gr/story/1....

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